Publié le 28 Dec 2012 - 22:15
ARONA SY CONTRE ALIOUNE TINE ET SEYDI GASSAMA

 Un procès fleuve riche en déballages

 

 

 

 

 

Le procès pour dénonciation calomnieuse opposant le commissaire Arona Sy à Alioune Tine et Seydi Gassama, responsables de la Raddho et de la section sénégalaise d’Amnesty international, a été marqué hier par un trouble d’audience. Mais aussi par des déballages de la partie civile, à l’endroit de l’actuel régime et d'Alioune Tine. En attendant le délibéré prévu le 24 janvier 2013, chaque partie réclame des dommages et intérêts, pour laver son honneur.

 

C’est un Arona Sy très décontracté et très provocateur qui a fait face hier, au tribunal Correctionnel de Dakar, pour soutenir ses complaintes à l’endroit d'Alioune Tine et de Seydi Gassama, respectivement président de la Rencontre africaine des droits de l’Homme ( RADDHO) et secrétaire général de la section sénégalaise d’Amnesty international. De la rage et de l’amertume, l’ex-commissaire central en avait également. Car, après avoir réussi à un concours pour une mission des Nations-unies au Darfour, il a été recalé. ‘’Il y avait 600 candidats au départ dont 4 commissaires sénégalais. Après présélection, puis sélection, il ne restait que 9 candidats y compris moi et nous avons suivi une interview en vidéo conférence avec les Nations-unies’’, a rappelé le policier.

 

Selon son avocat, après avoir réussi cet entretien, Arona Sy a été retenu, car il était premier de la liste suivi d’un Gambien. Mais se désole Me Baboucar Cissé : ‘’Au moment où mon client s’affairait aux formalités d’une visite médicale, les prévenus ont écrit aux Nations-Unies, disant que le commissaire Sy fait l’objet d’une procédure dans le cadre de la mort de Mamadou Diop.’’ Ce qui rend toujours Arona Sy très amer. ‘’J’ai été accepté, présélectionné ensuite, et sélectionné. Il ne restait que la signature du contrat et s’ils n’étaient pas partis dire aux Nations-unies que j’ai violé les droits humains, la procédure serait poursuivie’’, a enragé l’ex-commissaire central. ‘’Est-ce que les Nations-unies vous ont dit que c’est à cause de cette dénonciation qu’ils ne vous ont pas retenu ?’’ lui a demandé le représentant du Parquet. ‘’Vous savez qu’ils ne le diront pas’’, a rétorqué la partie civile qui reste persuadé que sans l’acte posé par Alioune Tine et Seydi Gassama, il ne serait pas recalé.

 

La candidature de Arona Sy était soutenue par l’actuel régime

 

Selon les explications du commissaire Arona Sy, il avait le soutien de l’actuel gouvernement qui l’avait choisi. ‘’Les Nations-unies ne traitaient pas avec moi, mais avec le gouvernement’’, a-t-il renseigné. Poursuivant ses révélations, il a indiqué, à l’instar de son avocat, que lorsque les organisations des droits de l’Homme ont saisi les Nations-unies, Me Alioune Badara Cissé, ex-ministre des Affaires étrangères, avait saisi ses collègues de la Justice et de l’Intérieur. D’après Me Cissé, ces derniers ont réfuté les allégations de poursuite judiciaire contre Arona Sy. ''A la suite de cela, le gouvernement de Macky Sall qui a subi la répression a présenté la candidature du commissaire Sy’’.

 

Cette révélation de l’avocat a provoqué la surprise des prévenus. Aussi, Seydi Gassama a déploré la ‘’duplicité’’ du gouvernement. Sur les accusations de la partie civile, les deux défenseurs des droits de l’Homme ont clamé leur innocence, tout en soulignant qu’ils n’ont fait que leur travail d’alerte. ‘’Vous avez nargué les familles des victimes’’, a lancé M. Gassama à l’endroit de la partie civile avant d’ajouter qu’ils ont été même félicités. Embouchant la même trompette, Alioune Tine de renchérir : ‘’ Dès qu’il y a un soupçon de violation des droits humains, l’État doit engager des poursuites, conformément au traité des Nations-Unies’’. Et d’ajouter : ‘’Ce n’est pas la compétence du commissaire Sy que nous remettons en cause, mais sa manière de faire régner l’ordre, car nous l’avons ressenti dans notre chair et toutes ces victimes présentes dans cette salle.’’

 

''Alioune Tine voulait rencontrer Wade''

 

Ces propos ont fait sortir le policier de ses gonds. Il a nié avoir commandé les violences policières électorales. Selon ses explications, le commissaire central ne commande pas les opérations, mais plutôt le commandant du Groupement d’intervention mobile (GMI). Ces précisions faites, le policiers n’a pas manqué de verser dans le déballage. Tout en précisant qu’il a de bons rapports avec le président de la RADDHO, il a révélé que lorsqu'Alioune Tine a été arrêté par la DIC et gardé à vue, dans le cadre de la mort du policier Fodé Ndiaye, il lui a confié ‘’qu’il s’était égaré et qu’il a été entraîné, pour faire des choses qu’il ne voulait pas faire’’. Pis, le policier a, dans ses déballages, indiqué que le président de la RADDHO lui avait dit qu’il voulait rencontrer le président Abdoulaye Wade.

 

Une révélation que M. Tine a niée, en secouant la tête. Finalement, le président est intervenu pour recadrer le commissaire qui, selon son avocat, ‘’a été bloqué par méchanceté’’. C’est pourquoi Me Cissé a réclamé deux milliards de francs Cfa pour la réparation du préjudice subi. ‘’Même Ban Ki-moon n’aura pas 2 milliards à la fin de son mandat’’, a répliqué Me Abdoulaye Tine. Et son confrère Me Amadou Diallo de renchérir : ‘’Il veut récupérer le manque à gagner avec les 2 milliards réclamés’’.

 

 

Selon lui, le commissaire Sy qui sera impliqué un jour ou l’autre dans les violences policières, a initié cette procédure pour donner l’impression qu’il est blanc comme neige. Pour lui et ses confrères, Alioune Tine et Seydi Gassama doivent être tout simplement relaxés. ‘’La dénonciation calomnieuse n’existe pas, car les Nations-unies n’ont pas la qualité pour infliger une sanction pénale ou administrative à Arona Sy’’, ont-ils argué. ‘’ Nos clients n’ont jamais dit que le commissaire est impliqué, mais qu'il est mis en cause dans la mort de Mamadou Diop’’, a précisé Me Ibrahima Mbengue, selon qui leurs clients ne peuvent pas être condamnés pour manquement à leur obligation comme sollicité par le conseil de la partie civile. Fort de tous ces arguments, ils ont jugé la citation abusive et ont réclamé une demande reconventionnelle et le paiement de dommages et intérêts de 100 millions pour chaque prévenu. Délibéré le 24 janvier prochain.

 

 

FATOU SY

 

 

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