Publié le 8 Sep 2023 - 00:18
CANDIDAT UNIQUE

Un Benno peut en cacher un autre

 

En 2012, la coalition la plus importante de l’opposition avait payé cher sa dislocation, au seuil de la Présidentielle. En 2024, la majorité présidentielle court le même risque, en tardant à partager le nom de son candidat et préparer ses militants et sympathisants.

 

Plus que cinq mois de l’élection présidentielle de 2024. Benno Bokk Yaakaar (BBY), la coalition au pouvoir, n’a toujours pas un candidat. Chez les alliés, c’est encore l’omerta. Interpellé au téléphone, le porte-parole du Parti socialiste, Abdoulaye Wilane, a été très évasif. Il déclare : ‘’Nous allons rester nous-mêmes et attendre. Gor sa wax ja (Il faut respecter la parole donnée).’’ Avec le député, par ailleurs président du Conseil départemental de Kaffrine, il ne faut même pas chercher à en savoir plus. À la question de savoir s’il peut être plus clair, il s’agace et rétorque : ‘’Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit. Je n’ai aucun autre commentaire à faire. J’ai dit : ‘Gor sa wax ja.’ Restons nous-mêmes et attendons. Chacun de nous doit le comprendre. Nous devons tous avoir la patience d’attendre celui à qui on a demandé de choisir un candidat. Est-ce que j’ai été clair ?’’

Dans la majorité, c’est toujours le branle-bas. Comme à son habitude, le président de la République, président de la coalition, a jusque-là caché son jeu. Mais selon plusieurs observateurs, cette lenteur dans le choix du candidat pourrait causer plus de dommages que de bienfaits à la majorité présidentielle. D’aucuns craignent le syndrome de la coalition de l’opposition Benno Siggil Sénégal en 2012. Donnée pour favori à la succession du président Abdoulaye Wade, cette coalition avait, pendant longtemps, fait croire à ses militants et sympathisants qu’il est possible de trouver un candidat unique. Il a fallu attendre le mois de décembre, à deux mois de la Présidentielle, pour trancher le différend Niasse-Tanor, à travers un vote qui avait vu un plébiscite en faveur du leader de l’Alliance des forces de progrès. Malgré cette défaite cuisante, Ousmane Tanor Dieng et Cie avaient forcé leur candidature sous le label de Benno Ak Tanor.

Pour les militants et sympathisants, c’était le rêve brisé, une grande déception qui en avait découragé plus d’un. À travers cette implosion, les leaders venaient de montrer que ce qui importe le plus, ce sont les égos surdimensionnés et l’obsession pour le pouvoir et ses privilèges, moins pour la prise en charge des intérêts des populations. C’est du moins la perception partagée par beaucoup d’électeurs à l’époque. Les conséquences de cette division ont été fâcheuses pour la coalition donnée comme principal challenger de Wade. Ce qui avait largement profité aux autres candidats de l’opposition les mieux placés, dont le principal a été le futur président Macky Sall, qualifié au second tour.

Les possibles conséquences de ces lenteurs

Benno Bokk Yaakaar n’en est peut-être pas encore là, mais c’est une des conséquences les plus redoutées, avec les lenteurs dans la publication du choix présidentiel. Déjà, ils sont nombreux les prétendants au titre de candidat de la majorité à se déployer sur le terrain avec leur artillerie lourde pour ratisser large. Parmi ces derniers, on peut citer Mahammad Boun Abdallah Dionne, Aly Ngouille Ndiaye, Amadou Ba (le discret favori), mais surtout Abdoulaye Daouda Diallo qui ne se cache plus avec ses nombreuses opérations de communication, comme pour dire que rien ne peut faire obstacle à la sienne. Dans une vidéo en circulation dans ses plateformes relookées, on revient sur son parcours : un parfait profil pour occuper le poste, est-on tenté de croire.

Pendant ce temps, d’autres sillonnent le territoire, font des tractations pour rallier le maximum de soutiens à leur cause. Vont-ils oublier leurs ambitions pour faire plaisir à leur chef et mettre en avant l’intérêt de la coalition ? Pour beaucoup d’observateurs, ceci relève de l’utopie et que la dislocation serait inéluctable.

Mais à qui va profiter une dislocation de Benno Bokk Yaakaar ? En tout cas, ce n’est pas au bloc de la majorité. Comme pour Benno Siggil Sénégal en 2012, il y aura nécessairement une dispersion des voix. En ce qui concerne les autres risques, il y a surtout la peur des responsables non candidats qui peuvent être tentés de rallier un candidat de l’opposition qui, pour eux, peut avoir plus de chances. Aussi, il y a le découragement des sympathisants qui peuvent ne pas se mobiliser et s’abstenir d’aller accomplir leur devoir.

Sans Macky Sall et sans unité, BBY peut mettre un trait sur sa volonté de rempiler dès le premier tour

Récemment, lors d’une rencontre avec des responsables de son parti, Macky Sall disait toutefois signifier que le choix est déjà clair dans sa tête. Selon ‘’l’Observateur’’ qui donnait l’information, le président confiait qu’il n’y a ‘’aucune ambiguïté’’ à son niveau et que sa position est de mettre en selle le meilleur candidat pour le parti et la coalition ; et ce sera celui qui inspire la confiance et que la population aime. Il soulignait également qu’il serait ‘’insensible à la pression et à l’influence’’ des uns et des autres. Dans tous les cas, plusieurs sources ont annoncé que la publication de la décision serait imminente ; d’aucuns ont avancé le samedi 9 septembre comme le jour décisif et qu’il sera suivi d’un remaniement.

Mais c’est des dates à prendre avec des pincettes, car le président s’est toujours présenté aux Sénégalais comme quelqu’un d’imprévisible et d’impénétrable.

Il devra toutefois se hâter le pas, si l’on sait que la date limite pour le lancement des parrainages arrive à grands pas, en fin septembre.

En effet, avant les dernières réformes, le retrait des formulaires pour le parrainage était prévu 180 jours au plus tard avant le scrutin. Désormais, c’est 150 jours avant le scrutin, soit vers le 28 septembre.

 Mais tout porte à croire qu’aussi imprévisible et impénétrable qu’il soit, le patron de BBY ne va pas tarder à rendre public son choix. Ce responsable de l’Alliance pour la République rassure : ‘’C’est juste pour calmer les mécontents.’’ Sans Macky Sall et sans unité, BBY pourrait mettre un trait définitif à une réélection dès le premier tour. Certains peuvent même être tentés de se demander si la coalition ne risque pas de rater les préqualifications pour le second tour, comme Moustapha Niasse et Ousmane Tanor Dieng à l’époque.

MOR AMAR

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