Mbarodi* du Fouladou
Présent sur la scène musicale depuis presque 8 ans, Mc Balédio, ‘’le Lion du Fouladou’’, comme le surnomment ses fans, est un artiste incontournable à Kolda. A la fois auteur et compositeur, il prépare la sortie d’un single dont il préfère garder le titre secret pour le moment. L’occasion pour ‘’EnQuête’’ d’aller à la rencontre de cet artiste talentueux afin de vous le faire connaître et de revenir sur son parcours remarquable.
Mamadou Diao alias ‘’Mc Balédio aka le Lion du Fouladou’’ (Mbarodi en langue pulaar) est un jeune chanteur qui s’identifie à sa terre natale, Kolda. A juste titre. Les populations de cette partie sud du pays le chouchoutent telle une star. Il n’empêche qu’il s’est installé au Fouladou pour bâtir une carrière musicale solide et s’assurer une bonne promotion. Du talent, il en a et peut arriver à s’imposer au-delà de sa terre natale. Car c’est une âme qui est née et qui vit pour chanter. C’est d’ailleurs ce qui l’a empêché de terminer son cursus scolaire. Il a, en effet, quitter les bancs dès son plus jeune âge.
Né le 23 mars 1983 au quartier Doumassou, commune de Kolda, il a fait son cours d’initiation à l’école élémentaire Abdoulaye Diallo de son quartier, en 1987. Il abandonne les études à l’âge de 11 ans. Puis s’est rendu en Guinée-Bissau pour apprendre la mécanique auto. Mais son séjour n’a pas duré longtemps, à cause de la guerre civile qui opposait l’ancien président Nino Vieira et le général Tagme Na Wai, Chef d’Etat-major des forces armées bissau-guinéennes d’alors. Une guerre qui l’obligera à plier bagages. Ainsi, il est revenu au bercail dans la même année. ‘’Lorsque je suis revenu au Sénégal, j’ai embrassé le métier d’apprenti chauffeur. J’étais à la gare routière de la commune de Kolda où j’ai passé 10 ans. J’ai, par la suite, pu avoir un permis de conduire. J’ai commencé à conduire un minibus’’, a-t-il raconté.
Piqué par le virus de la musique, Mc Balédio range les clefs de son véhicule. Il se lance, en 2010, définitivement dans le métier de la musique. ‘’C’est cette année-là que je me suis rendu en Gambie, plus précisément à Serrekunda, où j’ai sorti deux singles’’, a-t-il ajouté. Il fait de la variété musicale et fait découvrir sa musique inspirée par les airs du Fouladou à ses fans. Il n’est pas pour autant dans un genre purement traditionnel. Il est plutôt entre ce dernier et un style moderne.
Contre les mariages forcés
Né dans une région où les mariages forcés et surtout précoces sont une tradition culturelle qui voudrait que les familles choisissent elles-mêmes un époux ou une épouse pour une personne sans le consentement de l’intéressé, le jeune artiste sensibilise la population sur les conséquences d’un tel procédé. Ainsi, pour atteindre sa cible, il chante en pulaar et invite les populations à se départir de cette pratique.
‘’Dans les milieux défavorisés, les familles pauvres voient dans le mariage de leur enfant une stratégie économique (dot pour subvenir à leur famille et mettre leur enfant à l’abri du besoin). Or ces mariages forcés sont une violation des droits de l’enfant, en particulier des droits des filles. Privées de leur enfance, elles n’ont ni la maturité ni le discernement suffisant pour accepter et comprendre un tel engagement. Les conséquences sont énormes’’, a-t-il souligné.
D’après lui, les mineures sont violées lors de la nuit des noces et victimes de violences sexuelles. Parce qu’elles ne sont pas prêtes, ni mentalement ni physiquement, à vivre une grossesse et un accouchement. ‘’Aussi, beaucoup d’entre elles accouchent prématurément, donnant naissance à un enfant qui aura moins de chance de survie. L’expérience longue et pénible de l’accouchement peut être fatale, à la fois pour la jeune mère et pour l’enfant’’, a-t-il fait savoir. D’ailleurs, son single sur les mariages forcés lui a permis d’engranger du succès. Un titre bien aimé et le message a été bien perçu. Aujourd’hui, beaucoup de parents ont compris qu’il est risqué de donner des adolescentes, des enfants, en mariage.
La langue pulaar est son arme
S’il arrive ainsi à toucher un large public, c’est grâce au pulaar. Il précise : ‘’J’ai décidé de chanter dans ma langue, parce que je suis fière d’être un Peulh. Et je me suis dit que partout au Sénégal et dans le monde entier, on parle notre langue. Donc, forcément, mon message est compris par le plus grand nombre.’’ Il ajoute tout de même qu’au début, ‘’c’était trop difficile. Parce que les gens ne me prenaient pas au sérieux. Ils me ridiculisaient et se moquaient de moi. Mais, au fil du temps, ils ont fini par aimer mes morceaux. Maintenant, ils m’encouragent tous à continuer ma mission qui est d’abord de faire la promotion de la langue pulaar’’.
Avec sa voix captivante, le Lion du Fouladou aborde, dans ses différentes compositions, des thèmes d’amour et d’actualité. D’ailleurs, il dit à qui veut l’entendre que la musique est sa passion et la langue pulaar son arme. Il prépare très prochainement la sortie d’un nouveau single.
EMMANUEL BOUBA YANGA
*Mbarodi : lion en langue pulaar