Une discipline en émergence
La danse hip-hop ou bboying est essentiellement pratiquée par des jeunes. Beaucoup s’y intéressent aujourd’hui. Pourtant, peu de Sénégalais les connaissent. Ces jeunes sont pour l’instant loin des projecteurs, mais pourraient aller loin suivant la dynamique du moment.
Presque tous les rappeurs ‘’old school’’ du Sénégal ont commencé par la danse hip-hop avant de prendre le micro. Le bboying a gagné en premier les cœurs de Matador, Dug-E Tee, etc. avant que le rap ne prenne le dessus. Comme le confirme d’ailleurs l’une des grandes promotrices de la danse urbaine au Sénégal, Gacirah Diagne. ‘’Cette danse est née aux Usa puis a été reprise par les jeunes de la diaspora africaine avant de venir en Afrique et qu’on en fasse quelque chose qui correspond à la façon dont on vit notre culture. C’est une danse qui existe depuis les années 1980 au Sénégal. D’ailleurs les rappeurs étaient au début des bboys’’, rappelle-t-elle. Initiatrice avec l’association ‘’Kaay Fecc’’ qu’elle dirige du battle national, Gacirah arrive aujourd’hui à faire participer de jeunes Sénégalais au championnat mondial de bboying (battle of the year).
Cependant, arriver à ce stade n’a pas été facile. ‘’Il y a eu des hauts et des bas parce que les premiers danseurs sont devenus des rappeurs. Par conséquent, la danse a perdu un peu de terrain. Mais dans les années 2000, cela a recommencé et c’est devenu une activité assez intense’’, indique-t-elle. Ce qui a rendu opportune la mise en place du ‘’battle national’’ en 2006. Une compétition à laquelle prennent part tous les crews du Sénégal. D’ailleurs, depuis l’année dernière, l’organisation est décentralisée. Thiès et Kolda ont déjà reçu le concours successivement en 2015 et en 2016. D’ailleurs, lors de cette dernière session, ‘’Kaay Fecc’’ a enregistré la participation de plus de 90 danseurs. Ce qui fait dire à Gacirah Diagne ‘’qu’il y a un réel engouement’’. En outre, l’engouement ne se traduit pas que par le nombre de groupes créés. Mais aussi par les manifestations parallèles qui voient le jour à l’instar de ‘’Urbanation Bboy’’. Elle est aussi organisée par ‘’Kaay Fecc’’, en collaboration avec Africulturban. Mais cette initiative est ouverte aux danseurs de la sous-région.
Les initiatives se multiplient mais les moyens ne suivent pas. C’est pourquoi Gacirah Diagne pense qu’il faut qu’on soutienne ceux qui sont dans ce secteur. ‘’Depuis 2014, les jeunes s’intéressent davantage à la danse hip-hop. Mais il se pose un problème d’infrastructures. Aussi, il n’y a pas assez d’événements qui permettent à ces danseurs-là de s’exercer ou de pratiquer leur art. A part le battle national, le festival ‘’Kaay Fecc’’, il n’y a pratiquement pas grand-chose pour nous’’, dénonce Mbagne Kassé dit Ben-J, bboy. Ce soutien ne les aidera pas qu’à exprimer leur art. Il leur permettra aussi d’en vivre. ‘’La danse peut nourrir son homme si on reconnaît sa valeur. Si aussi on en fait un métier. Pour ma part, c’est la danse qui me nourrit totalement. J’ai pu réaliser pas mal de choses grâce à elle’’, reconnaît Ben-J. En effet, ce jeune trentenaire né à la Médina a la chance de former des jeunes ou encore d’animer des workshops, ici comme à l’étranger. Il est aussi souvent invité à des festivals ou des spectacles pour prester. Il arrive à monnayer son talent. Mais ce n’est pas tout le monde qui a cette chance.