Publié le 7 Jul 2025 - 15:17
THÉÂTRE ET SCIENCE- REPRÉSENTATION DE LA PIÈCE "JANAX YI AK NIT ÑI"

Sensibiliser aux risques sanitaires et agricoles liés aux rongeurs

 

Inspirée des travaux de recherche menés par l’IRD et l’UGB, la pièce de théâtre “Janax yi ak Nit ñi” vise à renforcer la sensibilisation sur les problématiques des rongeurs surtout au Sénégal.

 

Des comédiens jouent le rôle de rongeurs, cultivateurs, médecins, parents, etc. Un public acquis à sa cause qui rit devant une pièce de théâtre traitant un sujet grave : risques sanitaires et agricoles liés aux rongeurs. La pièce “Janax yi ak Nit ñi’’, présentée au centre culturel Blaise Senghor,  met ainsi en scène les interactions entre les humains et les rongeurs aussi bien en milieu urbain que rural. Elle est portée par une équipe de scientifiques de l’IRD, la metteuse en scène Marianne Heinrich (compagnie du Gratte Noyau) et des comédiens professionnels de Saint-Louis.

‘’C’est une pièce où se rencontrent la science et le théâtre de manière à sensibiliser et informer sur les problématiques des rongeurs au Sénégal spécifiquement, et notamment les problématiques liées à l’agriculture et à la santé’’, a déclaré la metteuse en scène Marianne Heinrich.

En effet, la pièce montre qu’au Sénégal, comme dans de nombreux pays du monde, certaines espèces de rongeurs sont bien plus que de simples ravageurs des cultures : ‘’Responsables de lourdes pertes agricoles, ils sont aussi porteurs de pathogènes responsables de maladies infectieuses touchant le bétail et les humains.’’

“Janax yi ak Nit ñi’’ fait constater que si l'on sait que de tout temps une partie des rongeurs est nuisible pour l'humain, certaines années sont plus dévastatrices que d'autres. Elle relève que tous les 5 à 10 ans, une pullulation hors norme induit de graves problèmes de santé et d'alimentation au sein de la population et du bétail. Et que si les dégâts matériels se révèlent alors de façon plus évidente, il est bien plus difficile de réaliser les impacts directs d'une telle pullulation sur la santé. ‘’On peut avoir un contact avec un rongeur et deux semaines plus tard une fièvre apparaît’’, renseigne un acteur. Le comédien, docteur Raphaël Binet, chercheur en sciences biomédicales, note qu’il y a environ 2 500 espèces de rongeurs  dans le monde dont plus de trente rien qu'au Sénégal.

Le public apprend aussi que les symptômes ressemblent à ceux du paludisme ce qui peut faire penser à tort qu'il s'agit de cas de paludisme résistant au traitement alors que ça pourrait être la borréliose, une maladie transmise par les tiques qui sont sur les rongeurs et piquent les humains lors de leur sommeil ou lors du travail aux champs. La borréliose, fait-on savoir, est une maladie qui touche en moyenne 11 % de la population dans certaines régions du Sénégal…

Inspirée des travaux de recherche menés par l’IRD et l’UGB, la pièce souligne que certaines maladies sont en expansion avec l'arrivée de nouvelles espèces de rongeurs favorisées par l'augmentation des transports de marchandises et par le dérèglement climatique.

‘’Ainsi plus de 30 % de rongeurs dans le département de Dagana portent les bactéries responsables de la borréliose, 18 % dans celui de Fatick et moins de 10 % à Kédougou’’, a-t-on indiqué. D'après les chercheurs, d’autres espèces de bactéries ont également été détectées chez les rongeurs de ces régions et pourraient être à l'origine de différentes maladies parfois insoupçonnées touchant le bétail ou les humains.

En outre, ceux qui sont en contact régulier avec l'eau de la rivière pourraient avoir attrapé la leptospirose ou encore la bilharziose, des parasites que les rongeurs disséminent dans l'environnement par leur urine dans le premier cas ou leurs déjections dans le deuxième cas...

 Des chiffres ont été avancés. En ce qui concerne la leptospirose, il y a un million de cas et autour de 60 000 décès chaque année. Pour les bilharzioses, il y a 250 millions de personnes atteintes et plus de 200 000 décès par an. Les bilharzioses sont la seconde endémie parasitaire humaine après le paludisme en termes d'impacts socioéconomiques.

Par ailleurs, la poule pourrait être malade. C’est pour cela que l’Isra surveille les risques de grippe aviaire. Ce qu’il faut c’est de mettre en place un système de surveillance et d’alerte précoce. En ce qui concerne le mouton, il peut être infecté par des maladies où les rongeurs sont impliqués comme la leptospirose ou peut-être même le virus de la vallée du Rift.

‘’Les rongeurs hébergent une soixantaine de pathogènes différentes qui touchent directement les populations humaines. Ils sont impliqués dans 40 % des infections connues passant des animaux aux humains et sont ainsi à l'origine de 400 millions de personnes malades chaque année dans le monde’’, a-t-on indiqué.

La plupart sont répertoriées comme des maladies tropicales négligées. Selon le rapport de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) publié en 2024, les maladies tropicales négligées sont associées à des conséquences sanitaires, sociales et économiques dévastatrices. Les maladies tropicales négligées touchent principalement les communautés les plus vulnérables, les plus pauvres et donc les moins solvables dans les pays du Sud global. Les maladies tropicales négligées touchent plus d'un milliard de personnes, selon les estimations.

Lutter contre les multiples menaces existantes pour la santé et les écosystèmes

Ainsi, les rongeurs vivant aux côtés de l'humain, apportent leur lot de maladies et de destructions, touchant les populations les plus démunies est l'un des problèmes. Les agents des services décentralisés de la santé humaine, de la santé animale, de l'environnement, de l'hygiène et de l'assainissement sont invités à se connecter et mener des actions efficaces au service des populations. Il faudrait aussi mettre en place des brigades, des équipes intersectorielles qui vont régulièrement sur le terrain analyser, prévenir et endiguer tout de suite les zoonoses, au service de la santé des populations, de l'élevage et de l'environnement. Ces brigades sont des groupes mixtes de recherche et d'actions où toutes les institutions sont représentées. Elles font des suivis, des prélèvements et des analyses ensemble dans un laboratoire régional à proximité des populations.

Une expérience magnifique pour les comédiens. Gnagna Ndiaye, artiste venue de Saint-Louis,  déclare : ‘’C'est une belle expérience pour moi. Parce que c’est la première fois que j'interprète le rôle de rat. Et ce n’était pas du tout facile au début parce  que ce n’est pas ma zone de confort. Mais la metteuse en scène,  très qualifiée, m’a aidée. Et  je suis allée au-delà de mes émotions. Même son de cloche pour la jeune Loubna Dalecky Heinrich. Cet enfant, dont la mère est aussi comédienne, magnifie aussi une expérience inoubliable avec des comédiens ‘’très sympathiques’’.

BABACAR SY SEYE

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