‘’Cordaba’’, au-delà des mythes
Ceux qui le souhaitent peuvent désormais apprendre à jouer de la Kora. Ablaye Cissoko le leur permet en ouvrant une école à cet effet à Saint-Louis.
L’école ressemble à une maison comme toute autre quand on la voit de loin. D’un peu plus près, l’écriteau accroché devant la porte lui donne une allure particulière. Ceci n’est pas qu’une banale maison où habite une famille comme toute autre mais plutôt une école de musique. A Ndioloffène à Saint-Louis où elle se situe, on y dispense des cours de Kora sur initiative du musicien Ablaye Cissoko. ‘’Cordaba’’ (ndlr grande kora en langue mandingue) est ainsi baptisé cet établissement ouvert officiellement lors de la 24e édition du festival de jazz de Saint-Louis. C’était en présence du directeur général de la Bicis Pierre Bérégovoy. C’est la Bicis et la fondation BNP Paribas qui ont financé la construction de cette école. ‘’La fondation BNP Paribas et la Bicis me soutiennent et me tiennent la main’’, a d’ailleurs dit le ‘’Koriste’’.
Dans cette école d’initiation à la kora, on trouve des filles et des garçons. Pourtant, jusque-là, cet instrument de musique était défendu aux femmes. Non pas parce qu’il est sacré. Mais plutôt parce qu’on considérait que les femmes connaissent des moments d’impureté et que les anciens ne souhaitaient pas qu’elles y touchent. Ablaye Cissoko considère à son tour que les hommes aussi ont leurs moments d’impureté. C’est ainsi que dans son école, on brave l’interdit et on donne la chance aux filles qui souhaitent se familiariser avec cet outil. D’ailleurs, parmi ceux qui ont joué à l’ouverture officielle figurent deux filles.
Elles font partie des huit jeunes encadrés actuellement dans cette école et qui ont joué à l’ouverture pour les invités d’Ablaye Cissoko. Tous suivent les cours trois fois par semaine. C’est Younoussa Cissoko qui leur inculque les bases de la kora. ‘’Au début, je joue et ils écoutent. C’est pour éveiller leurs oreilles musicales. Après, certains jouent, d’autres écoutent. C’est après leur avoir appris les notes en leur montrant quelle corde correspond à quelle note’’, a informé M. Cissoko. Qui poursuit : ‘’Ce n’est pas difficile de leur apprendre à jouer. L’enfant, quand il veut quelque chose, il le réussit facilement’’. Encore que c’est à leur âge qu’il faut se familiariser avec la kora. ‘’Ils ont l’âge idéal pour apprendre la kora. Parce que l’apprentissage de cet instrument musical est laborieux. Ce n’est pas facile. Il faut y aller à 7 ans. Car il faut un temps pour s’adapter, un temps pour apprivoiser l’instrument et un moment pour se l’approprier’’, a-t-il ajouté.
Par ailleurs, cette école n’est pas seulement ouverte aux enfants issus de familles démunies. Car, en plus des cours d’initiation, y sont dispensés des cours d’apprentissage et des cours de perfectionnement. ‘’La kora est un instrument réservé aux griots. Eux seuls en jouent. On est dépositaire de cet instrument, pas les gardiens. Donc on doit pouvoir initier d’autres à y jouer. Moi, j’ai grandi dans une lignée au sein de laquelle on compte beaucoup de grands joueurs de kora. Il ne faut pas qu’on perde cet instrument. Il nous faut initier d’autres à cet art’’, a déclaré Ablaye Cissoko.
BIGUE BOB