''Comment j’ai débuté ma carrière au Super Diamono''
Musicien de dimension internationale, Habib Faye s’est très tôt révélé comme étant l’un des meilleurs compositeurs et arrangeurs de sa génération. Après avoir longtemps accompagné Youssou Ndour dont il a composé les plus grands succès, il s’est lancé dans une carrière solo avec un album international, H2O. Juste le temps d’une pause dans un studio d’enregistrement, il raconte à EnQuête ses débuts en qualité de bagagiste au Super Diamono et sa riche expérience avec le Super Étoile.
A quand remonte votre départ du Super Étoile de Dakar ?
Disons que je ne garde pas un moment précis sur cela mais la dernière fois que j’ai joué avec le Super Étoile, c’était en décembre 2011 si mes souvenirs sont bons.
Avez-vous participé à la réalisation du dernier album de Youssou Ndour ?
Oui, j’ai participé à la réalisation de cet album. Je crois qu’il est sorti en 2001.
En tant qu’instrumentiste ou en qualité d’arrangeur et compositeur ?
J’ai arrangé quelques morceaux. C’est un album de rappel avec des pots pourris où l’on devait reprendre une dizaine de chansons que nous avions déjà jouées. Jimmy Mbaye, Oumar Sow et moi avions fait les arrangements.
Où avez-vous commencé votre carrière de musicien ?
Avant de venir au Super Étoile, j’étais élève, donc j’avais une carrière plutôt estudiantine. Cela n’empêche que je jouais souvent en tant qu’amateur, avec des groupes pour des concerts organisés dans les écoles et d’autres établissements scolaires. C’est à partir de là que j’ai intégré un peu le Super Diamono où j’ai fait un petit parcours.
Voudriez-vous raconter votre passage au Super Diamono ?
C’était dans les années 1982-83 avec des musiciens comme Bob Sène et Lappa Diagne. J’étais un bagagiste au Super Diamono. Il me fallait porter les instruments à longueur de journée pour avoir un accès au spectacle de la soirée. Cela suffisait pour que Bob Sène me laisse jouer de la basse sur un deux morceaux. Ça me suffisait.
Est-ce à l’époque où Adama Faye, votre frère aîné, était au Super Diamono ?
Non, c’était avec Lamine [Faye]. Parce que le Super Diamono avec Adama, c’était à la maison et j’étais très jeune. Mais je comprenais beaucoup de choses à cette époque-là. Il me suffisait de regarder les grands frères faire de la musique pour comprendre. Je me rappelle que j’avais six ou sept ans et il y a Omar Pène qui habitait à la maison. J’ai grandi avec ce groupe-là.
Et comment êtes-vous arrivé au Super Étoile ?
Youssou Ndour avait demandé à Adama Faye de former la deuxième formation du Super Étoile. Il a fait appel à moi. J’y étais avec mon ami Ibou Cissé et mon frère Moustapha qui était plutôt batteur que claviériste à l’époque. Je me rappelle que c’est nous qui avions répété le répertoire des chansons comme Ndobine et Wagane avant que le Super Étoile ne le reprenne. Après, nous étions tenus d’enregistrer ces morceaux. C’est ainsi que j’ai intégré le Super Étoile.
Quel est votre premier album avec le Super Étoile ?
C’est Wagane et Ndobine. A l’époque, tout sortait sur cassette. On avait fait deux volumes avec six titres sur chaque cassette.
Comment aviez-vous vécu vos débuts aux côtés d’Adama Faye au Super Étoile ?
C’est des moments inoubliables. Parce que je dois à Adama – qui n'est plus de ce monde - toute l’expérience que j’ai connue dans la musique. Non seulement il m’a appris des choses, mais j’ai eu la chance d’évoluer à ses côtés. Je crois que dans la famille [Faye], j’étais le seul à avoir la chance de partager le même groupe avec lui. J’avais tellement appris de lui qu’après son départ du Super Étoile, j’ai pu tenir les rênes.
Pourquoi un musicien de sa trempe est-il méconnu du public ?
Cela est certainement dû au fait que les gens des médias n’ont pas assez de culture en matière de cette musique sénégalaise qu’ils veulent promouvoir. Je veux dire par là qu’ils ne s’intéressent pas aux musiciens qui sont intervenu dans l’œuvre d’un quelconque chanteur. S’ils prenaient le temps de parcourir le Curriculum Vitae des grands noms de la musique tels qu’Omar Pène, Youssou Ndour et Thione Ballago Seck, ils auraient vu le nom d’Adama Faye figurer dans leurs discographies.
Est-ce que ce n’était pas un fardeau pour vous de diriger vos devanciers tels que Jimmy Mbaye et Pape Oumar Ngom au sein du Super Étoile ?
C’était un peu lourd. Mais puisqu'il y avait la confiance du chef Youssou Ndour qui tenait à ce que je prenne les rênes du Super Étoile, c’était moins compliqué.
Que faites-vous depuis votre départ du Super Étoile ?
Je suis en train de faire ma carrière solo. J’ai un album qui est sur le marché international.
Quelle est la couleur sonore de cet album ?
C’est de la fusion, de la musique World. C’est une musique sénégalaise ouverte au reste du monde qui voyage au-delà nos frontières. L’album continue son petit bonhomme de chemin et il se porte très bien. C’est distribué un peu partout dans le monde et on fait des tournées au Sénégal.
Qui vous a accompagnée dans votre album ?
Sur la pochette, il y a une vingtaine d’artistes sénégalais et étrangers. Il y a Vieux Mac et Lamine qui ont travaillé sur l’album. Je pourrai citer d’autres noms comme Youssou Ndour, Manou Dibango, Angélique Kidjo, Moctar Samba, etc.
Si vous nous parlez de votre collaboration avec Angélique Kidjo...
Avec Angélique Kidjo, j’ai eu à faire un album en 2009. Ensuite, je suis parti en tournée avec elle pendant un an et demi. Après je me suis arrêtée pour préparer mon album.
Cela explique-t-il votre irrégularité avec le Super Étoile ces dernières années ?
Disons qu’après tout ce que je faisais, je suis toujours revenu au Super Étoile qui est ma famille. D’ailleurs, cela n’a jamais posé de problème avec Youssou Ndour qui savait que je pouvais aller honorer des contrats et revenir.
Quels sont vos projets ?
Les projets, il y en a beaucoup. Je vais d’abord monter un label de production pour aider les jeunes. En collaboration avec El hadji Ndiaye, je vais reprendre le Studio 2000 pour participer à la construction de la musique sénégalaise. Parce qu’on a notre mot à dire.
Peut-on s’attendre à vous revoir sur scène avec Youssou Ndour ?
Pourquoi pas (rire). Mais pour le moment, ce n’est pas à l’ordre du jour dans mes projets.
Selon vous, le Festival international de jazz de Saint-Louis est-il une aubaine pour les musiciens sénégalais ?
Le Festival international de jazz de Saint-Louis gagnerait avec les musiciens locaux qui font du bon travail dans ce domaine. Cela montrerait les nombreuses potentialités du Sénégal dans le jazz.
Mais le Jazz manque de promotion au Sénégal...
C’est vrai que le Jazz n’est pas promu au Sénégal, un festival comme celui de Saint-Louis est une bonne occasion pour montrer ce que les musiciens sénégalais font dans le jazz. Mais s’il faut que les musiciens étrangers occupent le devant de la scène, on ne fera jamais la promotion des locaux.
Par Almami CAMARA
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