Le contrôle des armes, sujet tabou avant la présidentielle
La fusillade d'Aurora relance le débat sur le contrôle des armes à feu, mais reste en marge des discours des candidats démocrate et républicain...
La fusillade dans un cinéma d'Aurora, au Colorado, où 12 personnes ont été tuées par un tireur qui semble avoir acquis légalement son arsenal, ne modifiera pas en profondeur les termes du débat sur le contrôle des armes à feu, à trois mois et demi de l'élection présidentielle américaine.
32% des foyers américains possèdent une arme à feu
Le dernier texte important adopté par le Congrès sur la question, la loi Brady - du nom d'un conseiller de Ronald Reagan grièvement blessé lors de la tentative d'assassinat du président en 1981 - remonte à 1994, et impose de contrôler les antécédents psychiatriques et judiciaires de l'acheteur d'une arme neuve.
En vingt ans, le pourcentage d'Américains qui soutiennent des lois «plus sévères» s'est équilibré, passant de 78% en 1990 à 44% en 2010, selon un sondage de l'institut Gallup, tandis que 32% des foyers américains possèdent une arme à feu, selon Jim Kessler, ancien responsable d'Americans for Gun Safety, un groupe favorable au contrôle.
La perte d'influence des partisans du contrôle des armes se traduit aussi financièrement. Les revenus du Brady Center, l'organisation la plus importante en faveur du contrôle, atteignaient 5,9 millions de dollars en 2010 (4,7 millions d'euros), alors que la National Rifle Association (NRA), le lobby le plus connu du camp opposé, a réuni 253 millions de dollars (202 millions d'euros) la même année.
Ni Obama ni Romney n’ont abordé le sujet lors de leurs condoléances
Le débat sur les armes à feu reste en marge des discours du président démocrate Barack Obama, candidat à sa réélection, et de son probable adversaire républicain, Mitt Romney, qui n'ont ni l'un ni l'autre abordé le sujet lors de leurs messages de condoléances aux victimes de la fusillade d'Aurora.
«Je ne vois aucun signe d'une discussion sérieuse sur le contrôle des armes», a déclaré la chercheuse Kristin Goss, auteur d'un ouvrage sur la question, qui attribue en partie la frilosité des démocrates, traditionnellement partisans d'un contrôle accru, à la défaite de leur candidat Al Gore, qui en avait fait une thématique de campagne, à l'élection présidentielle de 2000.
«Les paroles apaisantes, c'est bien, mais il est peut-être temps que les deux personnes qui veulent être président des Etats-Unis nous disent ce qu'ils vont faire à ce propos», a dit vendredi à la radio le cofondateur de Mayors Against Illegal Guns, une coalition de maires pro-contrôle.
Une prudence habituelle
Dans le camp républicain, globalement pour un assouplissement de la règlementation, les positions de Mitt Romney en ce sens sont cependant restées prudentes et n'ont pas suscité l'enthousiasme de la NRA, qui lui a tout de même apporté son soutien.
Les opposants à tout durcissement s'abritent derrière le deuxième amendement de la constitution des Etats-Unis, qui garantit le droit de porter une arme.
La prudence des réactions politiques au massacre d'Aurora rappelle celles qui ont suivi d'autres fusillades, à l'université Virginia Tech en 2007, ou à la base militaire de Fort Hood en 2011, après lesquelles les débats sur le contrôle des armes s'étaient vite éteints. Les opposants au contrôle ont régulièrement souligné que ces tueries, bien que spectaculaires, ne justifiaient pas forcément un durcissement de la législation sur les armes.
Ces derniers font valoir que des événements similaires se sont produits hors des Etats-Unis, malgré un contrôle plus strict, par exemple en Allemagne, où neuf étudiants et trois professeurs ont été tués dans une école près de Stuttgart en 2009.
20minutes