‘’Je suis intéressé, par exemple, par où vont mes cacas’’
Il s’appelle Almamy Mala Talla, mais tout le monde l’appelle ‘’Fou Malade’’. Il est rappeur et ce sobriquet est son nom de scène. Il se comporte comme un ‘’fou’’ tel que vu par la société. Malal Talla dit tout ce qui lui passe par la tête et ne s’encombre d’aucune fioriture dans le discours. Les choses, il les dit comme il les pense. Vous en saurez quelque chose en parcourant cette interview qu’il a accordée à ‘’EnQuête’’. Il défend Guy Marius Sagna, mais n’affiche pas le même engagement pour le journaliste Adama Gaye dont l’arrestation est jugée arbitraire par beaucoup. Malal Talla évoque sa carrière ratée de journaliste, son coup de foudre pour un livre d’Abasse Ndionne et son statut de polygame. Comme sous l’arbre à palabres !
‘’Ousseynou ak Assane’’ est le titre de votre dernier album sorti avec Niagass. Où en êtes-vous dans la promotion ?
La promotion se poursuit. Toute cette semaine, avec mon acolyte Niagass, on a fait des interviews radio. La semaine dernière, on était les invités de Sidath dans l’émission ‘’Keur-Gui’’. Pour nous, la promotion d’un album peut s’étendre sur une longue durée. Nous n’avons pas assez de médias. Si l’on décide, juste après la sortie de l’album, de faire une promotion à travers les médias, on peut la boucler en une semaine. C’est pourquoi, dans notre plan de communication, nous avons choisi de faire d’abord une conférence de presse et faire après des tournées. On n’a presque pas fait d’émissions radio. Pour la plupart, entre les questions que nous attendions et celles qui nous étaient posées, il y avait un grand fossé. Souvent, les gens ne connaissent pas les artistes. Ils ne les connaissent que de nom. Ils ne s’intéressent pas à la philosophie de l’artiste, ne creusent pas dans les profondeurs de ses textes ou de sa dimension artistique. Ils ne cherchent pas à savoir le lien que cet album ‘’Ousseynou ak Assane’’ entretient avec les réalités socio-culturelles. Souvent, les émissions deviennent lassantes. On n’a, finalement, pas envie de faire de radios ou de télés parce que, très souvent, il y a un grand décalage entre les animateurs et les artistes, en termes de niveau. Les artistes hip hop sont à un niveau très, très élevé. Les animateurs gagneraient à renforcer leur culture générale.
Il y a beaucoup de rappeurs qui font le même reproche aux journalistes. Finalement, est-ce que ce n’est pas vous qui avez un problème de communication ?
Le problème ne se trouve pas chez l’artiste. Le problème, c’est le journaliste, l’animateur ou le chroniqueur. Un mouvement qui existe depuis plus de 30 ans est un patrimoine. Aujourd’hui, les premiers acteurs du hip hop ont presque la cinquantaine. Ce qui veut dire que c’est du sérieux. Il y a énormément de choses qui ont été réalisées par les acteurs du hip hop, que cela soit dans le rap, le graffiti ou la danse.
Pour moi, il est urgent et même indispensable, pour donner à ce mouvement ce qu’il mérite, que les journalistes se ressourcent afin de mieux comprendre le hip hop au Sénégal, aux Usa, en France, dans le monde. Il leur faut comprendre l’interconnexion qui existe entre ces hip hop et surtout les mutations qu’il y a dans ce secteur. Quand on ne les comprend pas, l’artiste fait des interviews qui ne le ravissent pas. On ne discute pas avec lui de ce qui fait la substance de son art. Moi, j’aime que la personne qui m’invite sache qui je suis ; c’est quoi ma trajectoire ; c’est quoi mon rapport avec le hip hop et, de manière générale, c’est quoi le hip hop. Trente ans, ce n’est pas une année. Le hip hop au Sénégal a résisté et les acteurs, de quels que bords qu’ils soient, ont très bien travaillé pour imposer cette culture. Aujourd’hui, on ne peut pas faire sans le hip hop. Le hip hop est partout. Il influence des décisions politiques. On a vu le mouvement Buul Faalé. On a vu le mouvement Y en a marre. On a vu, en 2019, des rappeurs soutenir Sonko. C’est dire que le hip hop est impliqué, il a son mot à dire. Même pour les problèmes sociaux. Le hip hop est un baromètre assez sérieux. Il faut voir aussi là où la nouvelle génération est en train d’amener le hip hop. Des artistes talentueux sont en train d’explorer la dimension créative et économique du hip hop.
Tout cela a été possible grâce aux anciens acteurs qui ont décidé de se reconvertir, en mettant en place des structures comme Guédiawaye hip hop, Africulturban, Optimist Production, Jolof for Life, etc. Ces anciens ont senti qu’il y avait un besoin de formation de leurs acteurs. D’un point de vue professionnel, les hip-hoppeurs se professionnalisent beaucoup plus que les acteurs des autres secteurs de la musique (…). Les hip-hoppeurs s’informent et regardent ce qui se fait de bien ailleurs. Après, il y a les Old School qui veillent au grain pour que le hip hop ne perde pas de sa substance, de ce qui fait effectivement son âme au Sénégal. Cette dernière est politico-sociale. Ce caractère doit forcément être associé à ce côté économique qu’apporte la nouvelle génération. Ce qui fait qu’il y a un pont entre les deux générations qui crée un lien d’interdépendance et de complémentarité entre les deux.
Cette âme politico-sociale vous a amené à intégrer Y en a marre. Le mouvement a organisé dernièrement un forum sur ‘’Jeunesse et assainissement’’. Quel était l’objectif de cette rencontre ?
Y en a marre, en collaboration avec Niel, qui est une agence et en même temps une Ong, a jugé nécessaire de mettre en place un forum sous-régional sur l’assainissement. Les questions d’assainissement ne sont pas connues et les jeunes ne se les approprient pas. Ils peuvent dire que le gouvernement pille nos ressources, le pétrole est volé. Mais les questions prioritaires, quotidiennes, immédiates, proches ne sont pas abordées. Pourtant, tout le monde, par exemple, est concerné par la question de l’assainissement. Je suis intéressé, par exemple, par où vont mes cacas. Je dois me poser cette question. Que deviennent-ils ? Sont-ils réduits à arroser des pommes de terre ? Est-ce qu’ils peuvent être transformés en eau potable ? Ne dois-je pas, moi qui habite un quartier comme Guédiawaye où il y a véritablement des problèmes d’assainissement, où des voitures peinent à pénétrer dans certains quartiers à cause de leur exiguïté, me poser ces questions-là ? Moi qui me réveille et qui voit qu’après la pluie, toutes les eaux usées sont reversées dans la rue et après elles entrainent des maladies. Moi qui habite dans un quartier où beaucoup de familles n’ont pas de toilettes, je suis intéressé par cette question. Savions-nous que nous produisons des milliers de cacas par jour ? C’est une question très sérieuse. Il faut qu’on la pose. Les artistes comme les mouvements sociaux doivent s’intéresser à toutes les questions. La question alimentaire est importante, mais celle liée aux matières fécales également l’est.
Ce forum nous a permis de comprendre qu’il y a beaucoup de choses qui sont dites sur les matières fécales et qui ne sont pas exactes. On nous a dit que les Américains sont en train de nous pousser à consommer de l’eau potable issue de nos matières fécales. Nous sommes allés jusqu’à l’usine et nous avons même compris que la matière dure issue des matières fécales peut être utilisée comme combustible. Cela peut produire de l’énergie. C’est de la connaissance. Cela peut permettre à des jeunes de travailler. Cela nous renvoie à une célèbre citation qui dit : ‘’Rien ne se gâche, rien ne se perd, tout se recrée.’’
La citoyenneté ou le social est important, mais les gens vous reprochent de ne pas être très actifs dans les luttes, comme ce fut le cas en 2012…
Nous ne nous définissons pas comme des activistes, nous nous définissons comme des militants pour le bien-être social des Sénégalais. Y en a marre, c’est deux ailes. Il y a celle contestataire et celle de la proposition. Les gens nous ont vus plusieurs fois mener des actions sur le terrain, nous indigner contre des forfaitures, des malversations de nos hommes politiques, etc. Il faut quand même noter qu’après Y en a marre, beaucoup de mouvements sont nés et veulent se faire une place. Pour cela, il faut critiquer Y en a marre. Le politique, au moment où le mouvement s’organise pour devenir beaucoup plus fort aussi, s’organise pour ne pas laisser la place à un mouvement, parce que ce dernier est contre l’action du politique.
Il le surveille et éveille les consciences. Le politique n’est pas intéressé par l’éveil des consciences. Les politiques se vantent de gérer la cité. Une cité, on ne la gère pas, c’est une entreprise qu’on gère. Une cité, elle est entretenue avec les populations. Les populations, elles, sont gérées parce qu’on ne leur demande pas leurs avis sur des questions d’assainissement et bien d’autres qui pourtant les concernent. Y en a marre est né en 2011. Le président Macky Sall, qui a vu Y en a marre naître, ne voudrait pas qu’il continue à se renforcer. Le président s’organise avec ses éléments pour discréditer le mouvement. Ça, c’est connu. On dit qu’on ne nous voit plus sur le terrain, mais ce qui définit la force d’un mouvement est le contexte. Il y a eu des contextes qui ont été favorables pour le mouvement et d’autres qui ne l’ont pas été. C’est cela la réalité et les mutations qui existent (…).
Pensez-vous que le contexte actuel est favorable au mouvement et pourrait faire resurgir le Y en a marre de 2011 ?
Ce que les gens ne comprennent pas, c’est que Y en a marre, son rôle, c’est de dire des choses. C’est à partir de ce que Y en a marre dit que les populations décident de se lever ou pas. En 2011, il y a eu en permanence des coupures d’électricité, la cherté de la vie, une volonté de dévolution monarchique affichée, etc. Il y avait un problème autour duquel les Sénégalais étaient fédérés : les coupures d’électricité. Elles concernent le tailleur, la vendeuse de poissons, le grand intellectuel, etc. Ce qui veut dire que, quel que bord où l’on est, ce problème nous fédère.
Aujourd’hui, il y a l’initiative Aar Li Nu Bokk. Y en a marre a été le premier à dire ‘’fédérons-nous’’, après le reportage de Bbc. Après, il y a eu une dynamique autour de cela. Mais l’Etat, pour que la dynamique naissante ne l’écrase pas, travaille à l’écraser. C’est ce qui explique l’arrestation de Guy Marius Sagna. Ils ont eu la chance qu’il y ait la Coupe d’Afrique des nations au beau milieu du tollé. Après, il y a eu cette histoire du t-shirt de Wally Seck qui détourne l’attention des Sénégalais de l’essentiel. Les questions de sauvegarde sociale sont prioritaires chez les Sénégalais. Vous avez entendu parler des deux jeunes licenciés à la pharmacie Guigon, parce qu’ils tenaient à prier aux heures indiquées. Vous avez vu toutes les réactions que cela a suscitées sur les réseaux sociaux. Certains même sont allés jusqu’à appeler au boycott de cette pharmacie. Tous ces débats-là effritent la mobilisation autour de la question du pétrole. Mais Aar Li Nu Bokk a réussi sa communication. Aliou Sall était récemment a stade Amadou Barry et les jeunes chantaient ‘’Sunu 400 mille’’. A l’accueil des Lions, devant les grilles du palais, les jeunes scandaient ‘’Sunu 400 mille’’. Ils ont profité de l’accueil des Lions pour s’adresser à leur président. La question qu’on doit se poser aujourd’hui, c’est ‘’sommes-nous en train d’assister à une autre manière de nous mobiliser ?’’. Ce qui faisait une mobilisation en 2012, peut ne pas le faire en 2019. Nous avons l’effervescence et la force des réseaux sociaux et une autre manière de décliner les questions sociales.
Aujourd’hui, toute la communication autour du pétrole se résume à un hymne : ‘’Sunu 400 mille’’. Je ne sais pas qui l’a créé, mais il marche bien. En tant que mouvement, ce que nous pouvons, c’est de poser le débat sur la place publique. Après, c’est à chaque citoyen de décider de sa manière de communiquer autour de la question posée.
Vous avez parlé de l’arrestation de Guy Marius Sagna. Mais comment analysez-vous celle d’Adama Gaye ?
Adama Gaye est un expert sur les questions du pétrole et il a une culture générale très importante. Pour moi, il aurait dû mettre beaucoup plus l’accent sur ce qu’il connait, sur les questions du pétrole au lieu d’évoquer des questions liées au sexgate. C’est là où je l’attendais. Pour moi, les Sénégalais ont encore besoin qu’on leur explique des choses sur la question du pétrole. Il y a un non-dit dans cette affaire. Pourquoi dit-il ‘’je sais des choses’’ ? Pourquoi parle-t-il de ‘’yolom guenio’’ ? Je ne l’aurais pas dit comme ça. Il y a un côté privé du président, il ne faut pas l’oublier.
Soupçonneriez-vous, à travers certains de ses écrits, une volonté de régler des comptes personnels ?
Plus ou moins ! Pour Guy Marius Sagna, je ne pense pas qu’il soit arrêté pour des problèmes de fausse alerte. Il est tout simplement arrêté parce qu’il est un grand leader, très sincère et très engagé dans son combat et qui gêne. Et il gêne peut-être beaucoup plus que Malal. Pour moi, Guy Marius Sagna a touché du doigt le problème. Il s’agit de la dilapidation de nos ressources. Nos hôpitaux ne sont pas équipés. On a encore des abris provisoires dans des écoles, en 2019. Il y a cette histoire du pétrole. Guy Marius Sagna parle de tout cela avec clarté et précision. Il est régulier et constant dans sa lutte. On lui cherche des puces et des punaises qu’on ne trouve pas. C’est pourquoi il faut prétexter de quelque chose pour l’envoyer en prison. Mais nous le soutenons et nous sommes avec lui.
Alors, Malal Talla aurait pu être un confrère d’Adama Gaye. Vous avez tenté le concours d’entrée au Cesti…
(Il coupe) J’ai passé le concours et j’ai échoué en 2000. J’ai réussi la présélection, mais je n’ai finalement pas été retenu. Au moment où je le faisais, je n’étais pas tellement convaincu quand même. Ma mère me disait que je ne pouvais pas continuer à faire du rap. J’étais dans un dilemme. Mes amis avec qui j’étais à l’université avaient réussi au concours d’entrée à l’Ena, d’autres devenaient professeurs. Alors que pour moi, rien n’était encore clair avec le rap. Il y avait une sorte de peur qui me gagnait. Il me fallait me caser quelque part. C’est ainsi que j’avais tenté le concours du Cesti sans conviction. C’est ‘’Catapulte’’, Demba Malick Mbodj, notre ancien Dj, qui est passé et est sorti major de sa promotion. J’avais choisi le Cesti, parce que j’ai grandi dans une famille de journalistes. Cela a commencé avec notre papa Mamadou Baïla Talla. Il a beaucoup servi au Mali en travaillant aux côtés de Modibo Keita avec lequel il a d’ailleurs été emprisonné pendant 10 ans. Baïla Talla est le frère de mon père. Il a transmis le virus du journalisme à Racine Talla qui l’aurait transmis à Mamadou Thierno Talla, qui l’aurait à son tour transmis à Badou Talla, notre frère décédé, qui l’aurait également transmis à El Hadj Talla qui était conseiller en communication de l’ex-Premier ministre. Le virus a été aussi transmis à Mamoudou Wane qui est mon oncle. J’ai grandi dans ça.
Quel était votre rêve d’enfant, quand vous pensiez à une profession ?
Moi, j’ai toujours voulu devenir artiste. J’ai grandi en jouant avec mon grand frère Abdoul Wahab Talla qui est professeur d’anglais au lycée de Yeumbeul. Il voulait chanter, mais ne savait pas chanter. J’ai grandi en voyant mon grand frère Badou Talla, qui était journaliste et musicien, dans ses œuvres. Nous, c’est Badou qui nous a émancipés. Nous sommes une famille ‘’torodo’’ très exigeante et très conservatrice. C’est Badou qui a commencé à chanter et quand on lui disait ‘’a wanna gawlo’’ (tu n’es pas un griot, en langue pular), il disait ‘’komin gawlo miskinabé’’ (je suis le griot du bas peuple). C’est cette approche que j’ai reprise de Badou pour me défendre des critiques qui pourraient venir de mes parents, en me disant ‘’tu es torodo’’.
Aussi, puisque le journaliste parle, il dénonce, c’est un militant, il est entre le peuple et les autorités publiques. Le rappeur aussi est un journaliste urbain, subversif. Il décline son article à travers une chanson, une performance graphique ou un spectacle de danse. De la mélodie musicale, on peut entendre le cri du cœur. Pour moi, nous sommes des parleurs de ceux qui ne parlent pas.
A côté de cela, j’ai eu toute mon éducation politique l’oreille collée aux discussions de mes grands frères. Ils étaient des militants de gauche. Ils dirigeaient des grèves à l’université, dans les lycées. Grandir dans cet environnement m’a aidé à construire aussi quelque chose qui m’est propre et en relation avec ma génération.
On imagine que vous avez beaucoup lu. Quel livre vous a le plus marqué ?
J’ai lu ‘’La ville en spirale’’ d’Abasse Ndionne. Ce livre m’a beaucoup marqué. Il m’a été suggéré par mon grand frère Abdoul Wahab Talla. Quand j’ai lu ce livre-là, j’ai tout de suite voulu rencontrer Abasse Ndionne. En lisant le livre, j’avais l’impression que c’était moi qu’on racontait. C’est comme si c’était mon quartier qui y était représenté et des gens que je connaissais. C’est un livre magnifique (il le répète). J’aimerais reprendre quelques passages de son livre pour en faire des chansons.
Il s’appelle Almamy Mala Talla, mais tout le monde l’appelle ‘’Fou Malade’’. Il est rappeur et ce sobriquet est son nom de scène. Il se comporte comme un ‘’fou’’ tel que vu par la société. Malal Talla dit tout ce qui lui passe par la tête et ne s’encombre d’aucune fioriture dans le discours. Les choses, il les dit comme il les pense. Vous en saurez quelque chose en parcourant cette interview qu’il a accordée à ‘’EnQuête’’. Il défend Guy Marius Sagna, mais n’affiche pas le même engagement pour le journaliste Adama Gaye dont l’arrestation est jugée arbitraire par beaucoup. Malal Talla évoque sa carrière ratée de journaliste, son coup de foudre pour un livre d’Abasse Ndionne et son statut de polygame. Comme sous l’arbre à palabres !
BIGUE BOB ET MAMADOU DIOP (STAGIAIRE)
‘’Ousseynou ak Assane’’ est le titre de votre dernier album sorti avec Niagass. Où en êtes-vous dans la promotion ?
La promotion se poursuit. Toute cette semaine, avec mon acolyte Niagass, on a fait des interviews radio. La semaine dernière, on était les invités de Sidath dans l’émission ‘’Keur-Gui’’. Pour nous, la promotion d’un album peut s’étendre sur une longue durée. Nous n’avons pas assez de médias. Si l’on décide, juste après la sortie de l’album, de faire une promotion à travers les médias, on peut la boucler en une semaine. C’est pourquoi, dans notre plan de communication, nous avons choisi de faire d’abord une conférence de presse et faire après des tournées. On n’a presque pas fait d’émissions radio. Pour la plupart, entre les questions que nous attendions et celles qui nous étaient posées, il y avait un grand fossé. Souvent, les gens ne connaissent pas les artistes. Ils ne les connaissent que de nom. Ils ne s’intéressent pas à la philosophie de l’artiste, ne creusent pas dans les profondeurs de ses textes ou de sa dimension artistique. Ils ne cherchent pas à savoir le lien que cet album ‘’Ousseynou ak Assane’’ entretient avec les réalités socio-culturelles. Souvent, les émissions deviennent lassantes. On n’a, finalement, pas envie de faire de radios ou de télés parce que, très souvent, il y a un grand décalage entre les animateurs et les artistes, en termes de niveau. Les artistes hip hop sont à un niveau très, très élevé. Les animateurs gagneraient à renforcer leur culture générale.
Il y a beaucoup de rappeurs qui font le même reproche aux journalistes. Finalement, est-ce que ce n’est pas vous qui avez un problème de communication ?
Le problème ne se trouve pas chez l’artiste. Le problème, c’est le journaliste, l’animateur ou le chroniqueur. Un mouvement qui existe depuis plus de 30 ans est un patrimoine. Aujourd’hui, les premiers acteurs du hip hop ont presque la cinquantaine. Ce qui veut dire que c’est du sérieux. Il y a énormément de choses qui ont été réalisées par les acteurs du hip hop, que cela soit dans le rap, le graffiti ou la danse.
Pour moi, il est urgent et même indispensable, pour donner à ce mouvement ce qu’il mérite, que les journalistes se ressourcent afin de mieux comprendre le hip hop au Sénégal, aux Usa, en France, dans le monde. Il leur faut comprendre l’interconnexion qui existe entre ces hip hop et surtout les mutations qu’il y a dans ce secteur. Quand on ne les comprend pas, l’artiste fait des interviews qui ne le ravissent pas. On ne discute pas avec lui de ce qui fait la substance de son art. Moi, j’aime que la personne qui m’invite sache qui je suis ; c’est quoi ma trajectoire ; c’est quoi mon rapport avec le hip hop et, de manière générale, c’est quoi le hip hop. Trente ans, ce n’est pas une année. Le hip hop au Sénégal a résisté et les acteurs, de quels que bords qu’ils soient, ont très bien travaillé pour imposer cette culture. Aujourd’hui, on ne peut pas faire sans le hip hop. Le hip hop est partout. Il influence des décisions politiques. On a vu le mouvement Buul Faalé. On a vu le mouvement Y en a marre. On a vu, en 2019, des rappeurs soutenir Sonko. C’est dire que le hip hop est impliqué, il a son mot à dire. Même pour les problèmes sociaux. Le hip hop est un baromètre assez sérieux. Il faut voir aussi là où la nouvelle génération est en train d’amener le hip hop. Des artistes talentueux sont en train d’explorer la dimension créative et économique du hip hop.
Tout cela a été possible grâce aux anciens acteurs qui ont décidé de se reconvertir, en mettant en place des structures comme Guédiawaye hip hop, Africulturban, Optimist Production, Jolof for Life, etc. Ces anciens ont senti qu’il y avait un besoin de formation de leurs acteurs. D’un point de vue professionnel, les hip-hoppeurs se professionnalisent beaucoup plus que les acteurs des autres secteurs de la musique (…). Les hip-hoppeurs s’informent et regardent ce qui se fait de bien ailleurs. Après, il y a les Old School qui veillent au grain pour que le hip hop ne perde pas de sa substance, de ce qui fait effectivement son âme au Sénégal. Cette dernière est politico-sociale. Ce caractère doit forcément être associé à ce côté économique qu’apporte la nouvelle génération. Ce qui fait qu’il y a un pont entre les deux générations qui crée un lien d’interdépendance et de complémentarité entre les deux.
Cette âme politico-sociale vous a amené à intégrer Y en a marre. Le mouvement a organisé dernièrement un forum sur ‘’Jeunesse et assainissement’’. Quel était l’objectif de cette rencontre ?
Y en a marre, en collaboration avec Niel, qui est une agence et en même temps une Ong, a jugé nécessaire de mettre en place un forum sous-régional sur l’assainissement. Les questions d’assainissement ne sont pas connues et les jeunes ne se les approprient pas. Ils peuvent dire que le gouvernement pille nos ressources, le pétrole est volé. Mais les questions prioritaires, quotidiennes, immédiates, proches ne sont pas abordées. Pourtant, tout le monde, par exemple, est concerné par la question de l’assainissement. Je suis intéressé, par exemple, par où vont mes cacas.
Je dois me poser cette question. Que deviennent-ils ? Sont-ils réduits à arroser des pommes de terre ? Est-ce qu’ils peuvent être transformés en eau potable ? Ne dois-je pas, moi qui habite un quartier comme Guédiawaye où il y a véritablement des problèmes d’assainissement, où des voitures peinent à pénétrer dans certains quartiers à cause de leur exiguïté, me poser ces questions-là ? Moi qui me réveille et qui voit qu’après la pluie, toutes les eaux usées sont reversées dans la rue et après elles entrainent des maladies. Moi qui habite dans un quartier où beaucoup de familles n’ont pas de toilettes, je suis intéressé par cette question. Savions-nous que nous produisons des milliers de cacas par jour ? C’est une question très sérieuse. Il faut qu’on la pose. Les artistes comme les mouvements sociaux doivent s’intéresser à toutes les questions. La question alimentaire est importante, mais celle liée aux matières fécales également l’est.
Ce forum nous a permis de comprendre qu’il y a beaucoup de choses qui sont dites sur les matières fécales et qui ne sont pas exactes. On nous a dit que les Américains sont en train de nous pousser à consommer de l’eau potable issue de nos matières fécales. Nous sommes allés jusqu’à l’usine et nous avons même compris que la matière dure issue des matières fécales peut être utilisée comme combustible. Cela peut produire de l’énergie. C’est de la connaissance. Cela peut permettre à des jeunes de travailler. Cela nous renvoie à une célèbre citation qui dit : ‘’Rien ne se gâche, rien ne se perd, tout se recrée.’’
La citoyenneté ou le social est important, mais les gens vous reprochent de ne pas être très actifs dans les luttes, comme ce fut le cas en 2012…
Nous ne nous définissons pas comme des activistes, nous nous définissons comme des militants pour le bien-être social des Sénégalais. Y en a marre, c’est deux ailes. Il y a celle contestataire et celle de la proposition. Les gens nous ont vus plusieurs fois mener des actions sur le terrain, nous indigner contre des forfaitures, des malversations de nos hommes politiques, etc. Il faut quand même noter qu’après Y en a marre, beaucoup de mouvements sont nés et veulent se faire une place. Pour cela, il faut critiquer Y en a marre. Le politique, au moment où le mouvement s’organise pour devenir beaucoup plus fort aussi, s’organise pour ne pas laisser la place à un mouvement, parce que ce dernier est contre l’action du politique.
Il le surveille et éveille les consciences. Le politique n’est pas intéressé par l’éveil des consciences. Les politiques se vantent de gérer la cité. Une cité, on ne la gère pas, c’est une entreprise qu’on gère. Une cité, elle est entretenue avec les populations. Les populations, elles, sont gérées parce qu’on ne leur demande pas leurs avis sur des questions d’assainissement et bien d’autres qui pourtant les concernent. Y en a marre est né en 2011. Le président Macky Sall, qui a vu Y en a marre naître, ne voudrait pas qu’il continue à se renforcer. Le président s’organise avec ses éléments pour discréditer le mouvement. Ça, c’est connu. On dit qu’on ne nous voit plus sur le terrain, mais ce qui définit la force d’un mouvement est le contexte. Il y a eu des contextes qui ont été favorables pour le mouvement et d’autres qui ne l’ont pas été. C’est cela la réalité et les mutations qui existent (…).
Pensez-vous que le contexte actuel est favorable au mouvement et pourrait faire resurgir le Y en a marre de 2011 ?
Ce que les gens ne comprennent pas, c’est que Y en a marre, son rôle, c’est de dire des choses. C’est à partir de ce que Y en a marre dit que les populations décident de se lever ou pas. En 2011, il y a eu en permanence des coupures d’électricité, la cherté de la vie, une volonté de dévolution monarchique affichée, etc. Il y avait un problème autour duquel les Sénégalais étaient fédérés : les coupures d’électricité. Elles concernent le tailleur, la vendeuse de poissons, le grand intellectuel, etc. Ce qui veut dire que, quel que bord où l’on est, ce problème nous fédère.
Aujourd’hui, il y a l’initiative Aar Li Nu Bokk. Y en a marre a été le premier à dire ‘’fédérons-nous’’, après le reportage de Bbc. Après, il y a eu une dynamique autour de cela. Mais l’Etat, pour que la dynamique naissante ne l’écrase pas, travaille à l’écraser. C’est ce qui explique l’arrestation de Guy Marius Sagna. Ils ont eu la chance qu’il y ait la Coupe d’Afrique des nations au beau milieu du tollé. Après, il y a eu cette histoire du t-shirt de Wally Seck qui détourne l’attention des Sénégalais de l’essentiel. Les questions de sauvegarde sociale sont prioritaires chez les Sénégalais.
Vous avez entendu parler des deux jeunes licenciés à la pharmacie Guigon, parce qu’ils tenaient à prier aux heures indiquées. Vous avez vu toutes les réactions que cela a suscitées sur les réseaux sociaux. Certains même sont allés jusqu’à appeler au boycott de cette pharmacie. Tous ces débats-là effritent la mobilisation autour de la question du pétrole. Mais Aar Li Nu Bokk a réussi sa communication. Aliou Sall était récemment a stade Amadou Barry et les jeunes chantaient ‘’Sunu 400 mille’’. A l’accueil des Lions, devant les grilles du palais, les jeunes scandaient ‘’Sunu 400 mille’’. Ils ont profité de l’accueil des Lions pour s’adresser à leur président. La question qu’on doit se poser aujourd’hui, c’est ‘’sommes-nous en train d’assister à une autre manière de nous mobiliser ?’’. Ce qui faisait une mobilisation en 2012, peut ne pas le faire en 2019. Nous avons l’effervescence et la force des réseaux sociaux et une autre manière de décliner les questions sociales.
Aujourd’hui, toute la communication autour du pétrole se résume à un hymne : ‘’Sunu 400 mille’’. Je ne sais pas qui l’a créé, mais il marche bien. En tant que mouvement, ce que nous pouvons, c’est de poser le débat sur la place publique. Après, c’est à chaque citoyen de décider de sa manière de communiquer autour de la question posée.
Vous avez parlé de l’arrestation de Guy Marius Sagna. Mais comment analysez-vous celle d’Adama Gaye ?
Adama Gaye est un expert sur les questions du pétrole et il a une culture générale très importante. Pour moi, il aurait dû mettre beaucoup plus l’accent sur ce qu’il connait, sur les questions du pétrole au lieu d’évoquer des questions liées au sexgate. C’est là où je l’attendais. Pour moi, les Sénégalais ont encore besoin qu’on leur explique des choses sur la question du pétrole. Il y a un non-dit dans cette affaire. Pourquoi dit-il ‘’je sais des choses’’ ? Pourquoi parle-t-il de ‘’yolom guenio’’ ? Je ne l’aurais pas dit comme ça. Il y a un côté privé du président, il ne faut pas l’oublier.
Soupçonneriez-vous, à travers certains de ses écrits, une volonté de régler des comptes personnels ?
Plus ou moins ! Pour Guy Marius Sagna, je ne pense pas qu’il soit arrêté pour des problèmes de fausse alerte. Il est tout simplement arrêté parce qu’il est un grand leader, très sincère et très engagé dans son combat et qui gêne. Et il gêne peut-être beaucoup plus que Malal. Pour moi, Guy Marius Sagna a touché du doigt le problème. Il s’agit de la dilapidation de nos ressources. Nos hôpitaux ne sont pas équipés. On a encore des abris provisoires dans des écoles, en 2019. Il y a cette histoire du pétrole. Guy Marius Sagna parle de tout cela avec clarté et précision. Il est régulier et constant dans sa lutte. On lui cherche des puces et des punaises qu’on ne trouve pas. C’est pourquoi il faut prétexter de quelque chose pour l’envoyer en prison. Mais nous le soutenons et nous sommes avec lui.
Alors, Malal Talla aurait pu être un confrère d’Adama Gaye. Vous avez tenté le concours d’entrée au Cesti…
(Il coupe) J’ai passé le concours et j’ai échoué en 2000. J’ai réussi la présélection, mais je n’ai finalement pas été retenu. Au moment où je le faisais, je n’étais pas tellement convaincu quand même. Ma mère me disait que je ne pouvais pas continuer à faire du rap. J’étais dans un dilemme. Mes amis avec qui j’étais à l’université avaient réussi au concours d’entrée à l’Ena, d’autres devenaient professeurs. Alors que pour moi, rien n’était encore clair avec le rap. Il y avait une sorte de peur qui me gagnait. Il me fallait me caser quelque part. C’est ainsi que j’avais tenté le concours du Cesti sans conviction. C’est ‘’Catapulte’’, Demba Malick Mbodj, notre ancien Dj, qui est passé et est sorti major de sa promotion. J’avais choisi le Cesti, parce que j’ai grandi dans une famille de journalistes. Cela a commencé avec notre papa Mamadou Baïla Talla. Il a beaucoup servi au Mali en travaillant aux côtés de Modibo Keita avec lequel il a d’ailleurs été emprisonné pendant 10 ans. Baïla Talla est le frère de mon père. Il a transmis le virus du journalisme à Racine Talla qui l’aurait transmis à Mamadou Thierno Talla, qui l’aurait à son tour transmis à Badou Talla, notre frère décédé, qui l’aurait également transmis à El Hadj Talla qui était conseiller en communication de l’ex-Premier ministre. Le virus a été aussi transmis à Mamoudou Wane qui est mon oncle. J’ai grandi dans ça.
Quel était votre rêve d’enfant, quand vous pensiez à une profession ?
Moi, j’ai toujours voulu devenir artiste. J’ai grandi en jouant avec mon grand frère Abdoul Wahab Talla qui est professeur d’anglais au lycée de Yeumbeul. Il voulait chanter, mais ne savait pas chanter. J’ai grandi en voyant mon grand frère Badou Talla, qui était journaliste et musicien, dans ses œuvres. Nous, c’est Badou qui nous a émancipés. Nous sommes une famille ‘’torodo’’ très exigeante et très conservatrice. C’est Badou qui a commencé à chanter et quand on lui disait ‘’a wanna gawlo’’ (tu n’es pas un griot, en langue pular), il disait ‘’komin gawlo miskinabé’’ (je suis le griot du bas peuple). C’est cette approche que j’ai reprise de Badou pour me défendre des critiques qui pourraient venir de mes parents, en me disant ‘’tu es torodo’’.
Aussi, puisque le journaliste parle, il dénonce, c’est un militant, il est entre le peuple et les autorités publiques. Le rappeur aussi est un journaliste urbain, subversif. Il décline son article à travers une chanson, une performance graphique ou un spectacle de danse. De la mélodie musicale, on peut entendre le cri du cœur. Pour moi, nous sommes des parleurs de ceux qui ne parlent pas.
A côté de cela, j’ai eu toute mon éducation politique l’oreille collée aux discussions de mes grands frères. Ils étaient des militants de gauche. Ils dirigeaient des grèves à l’université, dans les lycées. Grandir dans cet environnement m’a aidé à construire aussi quelque chose qui m’est propre et en relation avec ma génération.
On imagine que vous avez beaucoup lu. Quel livre vous a le plus marqué ?
J’ai lu ‘’La ville en spirale’’ d’Abasse Ndionne. Ce livre m’a beaucoup marqué. Il m’a été suggéré par mon grand frère Abdoul Wahab Talla. Quand j’ai lu ce livre-là, j’ai tout de suite voulu rencontrer Abasse Ndionne. En lisant le livre, j’avais l’impression que c’était moi qu’on racontait. C’est comme si c’était mon quartier qui y était représenté et des gens que je connaissais. C’est un livre magnifique (il le répète). J’aimerais reprendre quelques passages de son livre pour en faire des chansons.
Qui est votre artiste préféré ?
Mamadou Lamine Maïga ! C’est lui qui m’a poussé à percer mon oreille en 1992. En 1991, j’avais créé le fan club Mamadou Lamine Maïga, quand il avait quitté le Super Diamono. Quand il a été exclu du Super Diamono, j’ai pleuré pendant presque une semaine, parce que je l’aimais beaucoup. C’est encore mon frère Abdoul Wahab Talla qui m’avait fait découvrir le Super Diamono. Maïga habitait Guédiawaye et était l’ami d’un de mes grands frères qui s’appelait Pathé Kâ. Quand j’entendais Mamadou Lamine Maïga chanter, j’avais des frissons. Mon titre préféré était ‘’Lu Baax’’ (il commence à le fredonner avec le sourire). Il avait une voix magnifique. Ce que j’aimais chez le Super Diamono, c’était leur côté freestyle. Quand le Super Diamono a accepté d’être formaté par la société et s’appeler Super Diamono New-Look, cela m’a dégoûté du Super Diamono. C’est quand ils ont arrêté les tresses pour dire oui, maintenant nous sommes sérieux. Un artiste n’accepte pas le formatage social. C’est un marginal et il doit l’assumer jusqu’à la fin.
Dans le hip hop, quand vous pensez à la relève, vous pensez à qui ?
Je n’ai pas envie de dire Iss 814. On dira que c’est mon frère. Il a beaucoup de talent, énormément de talent. Je trouve que les Dip sont déjà là. On ne peut dire que Dip sera la relève. Il est le number one. Et ce qui est très intéressant, Iss 814 est une bonne symbiose de toutes les générations. Sa culture politique est multidimensionnelle. La manière dont il aborde la musique est exceptionnelle. Mais à côté de ça, quand j’écoute Samba Peuzzi, c’est un fou lui. Il y a un grand qui va venir et qui s’appelle As The Best.
Vous vous voyez en Samba Peuzzi ?
J’aime beaucoup Samba Peuzzi. Il a une voix, une technique… c’est inexplicable. Samba Peuzzi, c’est un fou, c’est véritablement un fou.
Mala Talla polygame, vous vous en tiendrez à deux ou vous allez en prendre une troisième, voire quatrième ?
Dieu seul sait. En prenant une première femme, je ne savais pas que j’allais en prendre une autre. Dieu seul sait. On ne sait pas de quoi demain sera fait. Toi, tu ne sais même pas si, en sortant d’ici, tu vas arriver à ton journal. Je ne le souhaite pas, mais je peux me retrouver un jour sans femme. Mes femmes peuvent se fâcher contre moi et décider de partir.
Vous êtes le premier rappeur polygame ?
Non ! Il y avait le rappeur de Man du yaw qui avait trois femmes. Dieu seul sait si j’en aurais trois. Je peux me retrouver avec quatre, cinq ou six.
Ce n’est pas possible ça !
(Il sourit) Je peux me retrouver, j’ai dit. Dieu seul sait de quoi demain sera fait.
Mamadou Lamine Maïga ! C’est lui qui m’a poussé à percer mon oreille en 1992. En 1991, j’avais créé le fan club Mamadou Lamine Maïga, quand il avait quitté le Super Diamono. Quand il a été exclu du Super Diamono, j’ai pleuré pendant presque une semaine, parce que je l’aimais beaucoup. C’est encore mon frère Abdoul Wahab Talla qui m’avait fait découvrir le Super Diamono. Maïga habitait Guédiawaye et était l’ami d’un de mes grands frères qui s’appelait Pathé Kâ. Quand j’entendais Mamadou Lamine Maïga chanter, j’avais des frissons. Mon titre préféré était ‘’Lu Baax’’ (il commence à le fredonner avec le sourire). Il avait une voix magnifique. Ce que j’aimais chez le Super Diamono, c’était leur côté freestyle. Quand le Super Diamono a accepté d’être formaté par la société et s’appeler Super Diamono New-Look, cela m’a dégoûté du Super Diamono. C’est quand ils ont arrêté les tresses pour dire oui, maintenant nous sommes sérieux. Un artiste n’accepte pas le formatage social. C’est un marginal et il doit l’assumer jusqu’à la fin.
Dans le hip hop, quand vous pensez à la relève, vous pensez à qui ?
Je n’ai pas envie de dire Iss 814. On dira que c’est mon frère. Il a beaucoup de talent, énormément de talent. Je trouve que les Dip sont déjà là. On ne peut dire que Dip sera la relève. Il est le number one. Et ce qui est très intéressant, Iss 814 est une bonne symbiose de toutes les générations. Sa culture politique est multidimensionnelle. La manière dont il aborde la musique est exceptionnelle. Mais à côté de ça, quand j’écoute Samba Peuzzi, c’est un fou lui. Il y a un grand qui va venir et qui s’appelle As The Best.
Vous vous voyez en Samba Peuzzi ?
J’aime beaucoup Samba Peuzzi. Il a une voix, une technique… c’est inexplicable. Samba Peuzzi, c’est un fou, c’est véritablement un fou.
Mala Talla polygame, vous vous en tiendrez à deux ou vous allez en prendre une troisième, voire quatrième ?
Dieu seul sait. En prenant une première femme, je ne savais pas que j’allais en prendre une autre. Dieu seul sait. On ne sait pas de quoi demain sera fait. Toi, tu ne sais même pas si, en sortant d’ici, tu vas arriver à ton journal. Je ne le souhaite pas, mais je peux me retrouver un jour sans femme. Mes femmes peuvent se fâcher contre moi et décider de partir.
Vous êtes le premier rappeur polygame ?
Non ! Il y avait le rappeur de Man du yaw qui avait trois femmes. Dieu seul sait si j’en aurais trois. Je peux me retrouver avec quatre, cinq ou six.
Ce n’est pas possible ça !
(Il sourit) Je peux me retrouver, j’ai dit. Dieu seul sait de quoi demain sera fait.
BIGUE BOB ET MAMADOU DIOP (STAGIAIRE)