Saint-Louis : Sur des airs amers

Pour la première fois, de mon existence de « Doomou Ndar se réveillant à Dakar », je quitte Saint-Louis avec un cœur désempli et le corps entier comme ayant subi un trop plein de coups de massue. Plus amplement, j’ai quitté Dakar comme on va à quelque rencontre heureuse et avec la certitude de pouvoir redire que « Saint-Louis est un infini poème d’amour ». Que nenni ! Hélas. Pour la première fois, depuis un demi de siècle, tout invite aux doutes et à l’impératif de revoir bien des copies. En urgence, au moins deux questions, et d’essentielles : le Festival de Jazz et la Religion en nos trajectoires de mortels encore présents ici-bas. Le Festival de Jazz n’est pas une idée neuve : elle est, et à raison, en bonne place, depuis le 20è siècle, inscrite dans le calendrier (socio) culturel de la République. Sa prédestination était, est et impose qu’il demeure un volet de portfolio : l’image la plus forte que Saint-Louis présente au monde. La réalité paraît autre. C’est avouer que je sors de Ndar avec les notes et airs de Jazz d’un Festival à revoir et à corriger. Sérieusement. Froidement. Sans le moindre état d’âme et sans aucune étroitesse d’esprit. Avec, surtout, les compétences et consensus nécessaires et en aptitude de relever tous les challenges présents et à venir. Ce qui ne saurait être, à quelque niveau qu’on se situe, que bénéfique pour la ville et les populations. Et parce que le Festival de Jazz est un legs, un fait essentiel dans le répertoire des éléments de notre patrimoine, la générosité sera le moteur pour contraindre et forcer les administrateurs, du moment, non pas à organiser des Assises, mais un week-end, ouvert au public le plus large possible, à fin d’évaluation (s) et de perspectives d’une prise en charge plus efficiente et plus efficace de l’événement.
La seconde réalité à vicier mon séjour est la profanation du cimetière catholique. Au-delà du dégoût et de l’immense honte qu’un tel fait inspire, globalement, à toute personne en la ville, il y’a à encore rappeler la chance que nous avons, à Saint-Louis en particulier, au Sénégal en général, de pouvoir, haut et fort, et sur tous les dômes, qualifier de combat d’arrière-garde, le dialogue islamo-chrétien que d’aucuns, pour si peu, convertiraient en fonds de commerce. Encore une fois, nous ne sommes pas, nous ne serons jamais et jamais ne parviendrons à réveiller les vieux démons, voire quelque barbarie humaine ! Avant d’être musulmans ou catholiques, protestants ou animistes, socialistes ou libéraux, anarchistes ou cocos, féministes ou situationnistes, nous sommes et, comme jamais, devons rester une nation d’alliés inaliénables ! Oui ! Un peuple de cousins et de voisins, en permanence, debout et en veille à fin que la cohésion sociale et le commun devoir de coexistence soient plus que des slogans : nos viatiques et parchemins primordiaux !
Serait-ce trop demander que la Mosquée s’en aille, à l’Eglise, présenter des excuses ? Même pour des crétins et autant de brebis galeuses.
Elie Charles Moreau