Publié le 30 May 2024 - 12:07
LE FINANCEMENT DE L’AGRICULTURE

UN MAILLON IMPORTANT POUR ATTEINDRE LA SECURITE ALIMENTAIRE ET CONTRIBUER A LA CREATION D’EMPLOI A TRAVERS L’ENTREPRENARIAT

 

QUELQUES PREALABLES POUR UN FINANCEMENT DURABLE DU MONDE RURAL                                                                                                                                                                          

Pour palier toutes les contraintes relatives à l’accès au financement plusieurs leviers doivent être actionnés :

  1. DE LA PRODUCTIVITE ET DE LA PRODUCTION AGRICOLE

Quelle que soit la souplesse des lignes de crédit, la rentabilité de l’activité agricole est une nécessité et un préalable certain pour assurer un retour sur investissement. Cela passera par un renforcement des structures comme la SAED, la SODAGRI, la DHORT, l’Institut National de Pédologie, l’ISRA etc. Si nous comptons créer des zones agricoles attractives, ces structures méritent d’être appuyées pour réussir les objectifs qui leur sont assignés.

Compte tenu des contraintes relatives aux menaces climatiques et aux risques agricoles d’une manière générale, la recherche doit être au cœur du dispositif afin de consolider les acquis et d’anticiper sur plusieurs problématiques de l’agriculture telles que : la proposition de variété de semences adoptées, la fertilité des sols, la salinité dans certaines zones de production, la rareté des fertilisants etc.  En sus les lignes de financement dédiées doivent être débloquées conformément aux objectifs de production, de transformation, d’exportation etc. Des mécanismes sécurisants doivent être mis en place pour éviter les détournements d’objectifs.

En d’autres termes, tout acteur impliqué dans un processus de détournement d’objet de production devra être sanctionné. De concert avec les techniciens, le secteur privé national, les partenaires techniques et financiers et les acteurs des différentes chaines de valeurs, les objectifs de financement de la production et de tous les autres maillons des chaines de valeurs agricoles doivent être fixés et planifiés et évalués à la fin de chaque campagne.

  1. DES CHAINES DE VALEUR

Au Sénégal, dans la majorité des cas, l’entrepreneur agricole n’a que sa force de travail. Pour être en phase avec les principes bancaires, il est souvent incapable de proposer une garantie pour décrocher un crédit de campagne ou d’investissement. Dans ce sillage, à travers les partenaires au développement (projet, ONG etc.) et les structures d’appui techniques à la base (SAED, SODEFITEX, SODAGRI, ANCAR, DRDR etc..) une synergie d’actions doit être de mise afin d’organiser les acteurs des chaines de valeur sous forme d’associations de coopératives fortes, performantes et dirigées par des leaders avertis et capables de manager une entreprise. Ces coopératives, à travers leurs leaders, devront être périodiquement capacités sur des aspects relatifs à la gestion, le management, la communication, les techniques d’expression, les techniques de l’Information et de le Communication (TIC) etc. Cela aboutira incontestablement à la mise en place d’entreprises fortes à travers toutes les chaines de valeurs agricoles et agroalimentaires.

Dès lors, les institutions financières auront plus de visibilité sur l’activité des acteurs du monde rural et prompt à mobiliser des ressources à réinjecter au profit de tous les acteurs. Elles pourront aussi développer plusieurs offres de produits et de services à travers les différentes zones agroécologiques. On peut citer entre autres le crédit de production, la mise en place de fonds de commercialisation le warrantage, le système de récépissé d’entrepôt, la tierce détention, l’affacturage, le crédit-bail etc… Avec l’appui des partenaires et des structures publiques décentralisées, la contractualisation entre les entrepreneurs agricoles à travers les différents maillons des chaines de valeur agricoles pourrait aussi être une réalité.

En définitive, entre autres :

  •  Pour les chaines de valeur à haute valeur économique et commerciale : dans ce cadre, se fixer dans le court terme un objectif qui consiste à satisfaire les besoins nationaux et dans le moyen terme se positionner dans la sous-région et dans le marché international.
  • Pour les chaines de valeurs céréalières (riz, mil, maïs et autres) : beaucoup de travaux relatifs à la structuration des chaines de valeur et l’érection des interprofessions ont été effectués par des structures comme le FNDAPS mais hélas n’ont encore mis en œuvre. Pour les céréales, l’objectif devrait être d’assurer les taux de couverture au profit des ménages.

Toutes les structures d’encadrement devraient aller dans le sens de repositionner les interprofessions dans leurs prérogatives. Le renforcement de la recherche et du dispositif d’encadrement constitue incontestablement des inputs pour révolutionner notre agriculture au sens large.

  1. LE FINANCEMENT AVEC DES TAUX CONCESSIONNELS :

 L’offre de crédit devra reposer sur des prêts à moyen et long terme, entre 5 et 10 ans en fonction des types de financement, à des taux inférieurs à ceux des crédits de campagne bonifiés, autour de 5 % l’an.  Pour se faire, l’Etat du Sénégal devra accompagner activement et inlassablement la Banque Agricole, la seule Institution Financière accréditée aux fonds verts climat, à accéder aux lignes de financement vert afin de faire face aux besoins de sa cible en termes de crédits d’investissement à des taux favorables et de longues maturités.

Si nous voulons intensifier notre agriculture incontestablement, des mécanismes de financement innovant doivent être mis en place pour permettre aux associations de coopératives d’acquérir de gros investissement comme les tracteurs, les moissonneuses batteuses, des infrastructures de stockage et de conditionnement, la réhabilitation et l’extension des périmètres irrigués dans certaines zones agroécologiques du pays.

Enfin, pour accéder aux petits matériels agricoles et faire de gros investissements, les institutions financières doivent être appuyés pour booster leurs portefeuilles de crédit-bail et de micro-leasing à travers des modèles de financements intégrés de concert avec certaines industries comme la SISMAR, le privé et autres.

Parallèlement, la niche des artisans locaux, de concert avec la recherche, doit être explorée pour la confection de petits matériels agricoles au profit de l’exploitation famille qui constitue plus de 80% du secteur. Des succès stories sont enregistrés dans ce domaine mais il reste beaucoup à faire pour relever le défi relatif à la formalisation et la structuration de ce segment pourvoyeur d’emploi au profit de la jeunesse.

Pour le sous-secteur de l’élevage et surtout des produits à haute valeur ajoutée, la mise en place de système de marchés à travers des interrelations et des schémas contractuels entre les acteurs serait une excellente opportunité pour les institutions financières pour toucher les différents maillons des chaines de valeur.

DES RISQUES DE CREDITS

Dans notre pays, le financement de l’agriculture est confronté à des risques inhérents à la production agricole et aux aléas climatiques. De nombreux exploitants agricoles ont souvent des besoins de financement non couverts par le système financier. Ces besoins non couverts, relèvent du financement de court terme (crédit de campagne, mais aussi de commercialisation), de moyen terme (équipement, bâtiments, etc.), de long terme (aménagements fonciers). L’offre de financement agricole tend à se développer, mais reste néanmoins très inférieure à la demande et mal adaptée aux besoins de notre agriculture. Il existe encore des facteurs qui freinent le financement de l’agriculture comme : la mauvaise appréciation du risque agricole, le manque de garantie des acteurs agricoles, l’insuffisance de relations durables, solides et de confiance entre les entrepreneurs agricoles et les institutions financières.

Le crédit à l’agriculture est confronté essentiellement à trois types de risques : les risques opérationnels, les risques liés au marché et les risques inhérents au crédit.

Pour les institutions financières impliquées dans le financement de l’agriculture, le coût principal est dû au risque de crédit, particulièrement important et imprévisible dans le domaine agricole. Mais il ne faut pas négliger les risques de marché dus aux taux d’intérêt et de change qui fragilisent les systèmes financiers et occasionnés souvent par la volatilité des prix des produits agricoles et agroalimentaires. L’absence de ressources humaines de qualité et/ou spécialisées dans l’appréciation des dossiers agricoles pour réduire le risque constitue parfois un risque opérationnel dans certaines institutions financières.

A cela, s’ajoute le risque de crédit souvent causé par le fait que les producteurs contractant un prêt peuvent être dans l’incapacité de le rembourser, pour diverses raisons parmi lesquelles on peut citer : dommages infligés à la production par les aléas climatiques (sécheresse, inondation, vague de chaleur etc.), aux maladies des plantes et des animaux, à la salinité des sols, à la commercialisation de la production, aux intrants (disponibilité, qualité, prix), aux ravageurs et d’autres sinistres.

Les risques de crédit sont donc particulièrement nombreux en agriculture. Ils sont difficiles à cerner et assurément plus imprévisibles que les risques de crédit octroyés à des particuliers ou à des entreprises d’autres secteurs. C’est la principale raison pour laquelle les institutions de la place ont toujours eu une grande réticence à financer l’activité agricole qui pourtant reste une grande opportunité pour le secteur financier. A date, seule la Banque Agricole prend un risque assez conséquent pour accompagner la production. Parallèlement, les autres institutions financières s’intéressent à ce secteur mais avec des conditions souvent difficiles à remplir par l’exploitant agricole.

En définitive, la mise en place de mécanismes de garantie et d’assurance des risques agricoles est primordial. La Compagnie Nationale d’Assurance Agricole du Sénégal (CNAAS) a été mise en place par le gouvernement du Sénégal pour pallier les risques agricoles. Cet instrument très efficace, au fil du temps a mis en place une stratégie qui a abouti à des offres de produits et services au profit des acteurs des chaines de valeur agricoles. Cette compagnie, à travers les différentes zones agroécologiques a permis à plusieurs entrepreneurs agricoles de décrocher un crédit après souscription à l’assurance, de faire face aux risques agricoles et de continuer leurs relations avec les institutions financières après avoir fait face à un sinistre. Toutefois, pour consolider ses acquis, renforcer son dispositif, avoir plus de proximité avec les entrepreneurs agricoles et anticiper sur les éventuelles sinistres exposés à l’activité agricole, cette institution mérite d’être appuyée et accompagnée pour toucher toutes les chaines de valeurs agricoles et agroalimentaires. Elle doit être fortement linkée avec la recherche, les structures d’accompagnement et d’encadrement etc. En sus, des mécanismes incitatifs devraient être mis en place pour faciliter le partenariat entre la Compagnie Nationale d’Assurance Agricole du Sénégal et les partenaires techniques au développement.

M. Djibril BA

Ingénieur Agroéconomiste

Ingénieur Financier

MBA en Finance et Management

Enseignant-Chercheur Vacataire

Doctorant en sciences économiques et Gestion

Responsable du Parti Fepp Tawfekh à Thies

SG National chargé de la formation et de l’académie du Parti Fepp Tawfekh

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