La vérité sur l’orientation des bacheliers dans les EPES
Cela fait plus de six mois que le Bureau National (BN) du Syndicat Autonome de l’Enseignement Supérieur (SAES) passe le plus clair de son temps à clamer partout que l’Etat du Sénégal a enrichi des établissements privés d’enseignement supérieur (EPES) en y envoyant des bacheliers de l’année 2012. Pire le BN du SAES, contrairement à sa tradition, a versé dans la diffusion de fausses informations en déclarant dans un communiqué paru dans plusieurs quotidiens que l’Etat a injecté 6 milliards de francs cfa dans certains EPES en 2013. Vu l’ampleur des tâches engagées par le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, au lieu de verser dans des petites querelles, nous avons toujours mobilisé toute notre énergie autour des grands défis de l’enseignement supérieur au Sénégal. Cependant, nous nous sentons aujourd’hui le devoir, à l’endroit des citoyens, de rétablir la vérité sur l’opération d’orientation des bacheliers de 2012 par l’Etat dans les EPES.
Chers concitoyens, l’Etat du Sénégal ayant épuisé la capacité d’accueil dans ses universités publiques, a décidé en février 2013 d’orienter des bacheliers Sénégalais de 2012 dans des EPES présentant des formations accréditées par le Conseil Africain et Malgache de l’Enseignement Supérieur (CAMES). L’opération d’orientation de ces bacheliers s’est déroulée comme suit :
Soixante deux (62) formations accréditées par le CAMES ont été proposées par onze (11) EPES.
Les bacheliers ont été invités à se connecter sur le site www.campusen.sn pour choisir librement entre huit (8) et seize (16) formations à classer dans l’ordre de préférence.
Les orientations ont été faites par une application en ligne sur la base des choix des étudiants, de leur performance au baccalauréat et des capacités d’accueil dans chaque formation.
Ce processus a abouti à la répartition suivante pour ce qui est des bacheliers effectivement inscrits : IAM, 906 ; ISEG, 803 ; ITECOM, 795 ; ISM, 763 ; UCAO, 659 ; UNIS, 657 ; SUPDECO, 427 ; ESTM, 303 ; ISI, 255 ; ETICCA, 220 ; AFI, 201. Soit un effectif global de cinq mille neuf cent quatre vingt neuf (5989) étudiants orientés par l’Etat et inscrits dans ces onze (11) EPES. Contrairement aux six milliards annoncés par le SAES, en 2013, les frais relatifs à la prise en charge de la formation de ces étudiants correspond à une enveloppe de trois milliards cinq cent quatre vingt treize mille quatre cent mille francs Cfa (3 593 400 000 f Cfa).
Nous aimerions aussi attirer l’attention des camarades du Bureau National sur le fait que nous enseignants du supérieur devrions être les derniers à dénoncer le fait que l’Etat paye les études d’enfants de citoyens sénégalais dans le privé. En effet, comme dans le secteur de l’enseignement, l’Etat a agréé des établissements privés de santé (EPS) ; comme pour les bacheliers dans les EPES, l’Etat prend en charge l’essentiel des frais de consultation et d’hospitalisation des universitaires et de leur famille dans des établissements privés de santé ; comme pour les universitaires dans les EPS, ce sont les bacheliers qui ont choisi librement parmi des établissements privés titulaires d’un agrément définitif et présentant des filières accréditées par le CAMES. Arrive-t-il jamais à l’idée de l’un de nous, universitaires de dénoncer les sommes que l’Etat, à travers les institutions d’enseignement supérieur, verse à ces EPS ? Non. Au contraire.
Par ailleurs, nous jugeons qu’en créant les conditions de l’enrichissement des établissements privés d’enseignement supérieur, l’Etat est dans l’un de ses rôles les plus régaliens. Plus généralement, l’Etat devrait, chaque fois que l’occasion se présente, injecter des fonds importants dans les secteurs de l’économie qui sont en mesure de faire baisser le taux de chômage et contribuer à la résorption du déficit de la balance commercial qui s’élève à 1405 milliards. Dans tous les pays développés ou en bonne voie de l’être, l’Etat porte une attention particulière à son secteur privé, et se présente parfois comme le principal client. Aussi, le Sénégal, pays peu gâté par la nature, devrait-il mobiliser tous les atouts de son secteur privé afin de se positionner favorablement au niveau des échanges internationaux. Or, l’un des points forts du pays est la notoriété de son enseignement supérieur liée au fait que l’Université de Dakar est la mère des universités de l’Afrique francophone, et que le Sénégal a été pendant longtemps, grâce à cette université, l’une des plaques tournantes de l’enseignement supérieur en Afrique. Fort de l’appui de l’Etat, les établissements privés d’enseignement supérieur du Sénégal devraient exploiter cet avantage dans le but de capturer le maximum d’étudiants étrangers. L’arrivée massive de ces derniers ayant des retombées considérables sur les secteurs de l’immobilier, de la restauration, du transport, et la balance des paiements ne s’en porterait que mieux. Sans mentionner le rayonnement culturel et diplomatique qu’un tel phénomène procurerait à notre pays. Ne serait que pour ces raisons, à l’instar du tourisme, l’Etat a le devoir de promouvoir le secteur de l’enseignement supérieur privé, de rendre la destination Sénégal pour l’enseignement supérieur plus attrayante que jamais.
Chers concitoyens, chers camarades du Bureau National du SAES, l’une des richesses de notre pays est certes la liberté d’expression et de mouvement, et il est fort heureux que le Sénégal ne vit pas une convergence totale au niveau politique et idéologique. Et, pour notre part, la contradiction constitue une source d’énergie, d’oxygène pour la vitalité de notre réflexion. Ce qui fait que nous refusons de verser dans la guerre des points de vue. Nous sommes tout simplement attentifs à l’opinion de tous, même si elle diffère de la nôtre. Cependant, tant que nous aurons une parcelle de responsabilité dans les affaires publiques, nous nous obligerons à rétablir la vérité sur les actions que nous y menons chaque fois que le besoin se fera sentir.
Professeur Abdou SENE
Directeur de l’Enseignement Supérieur Privé