Armées de courage, les populations veulent faire tout annuler

Au cœur d’une bataille foncière sans merci, le nord de la ville de Thiès attire toutes les convoitises. Ce dimanche, les jeunes des quartiers de Thionakh et Thiapon ont laissé éclater leur colère pour faire cesser le morcèlement constaté sur leur terrain de football. Avant eux, le comité de veille des Sérères noons a eu à s’insurger contre la désaffectation des parcelles de leurs proches de la part des autorités municipales.
On pensait en avoir fini avec les combats fonciers qui opposent les populations aux maîtres bradeurs dans la région de Thiès. Après les litiges fonciers notés à Mbour 4, aux HLM route de Dakar, à Sinthiou Kéba, dans la commune de Fandène, mais aussi à Darou Alpha, dans la commune de Notto Gouye Diama dirigée par Maguèye Ndiaye, une autre bataille foncière se dessine dans la commune de Thiès-Nord. Désaffectation de parcelles par-ci, morcèlement de nouveaux espaces par-là, sont les maux qui risquent de plonger cette commune dirigée par Lamine Diallo dans une ‘’guerre sans fin’’.
Avant-hier, les jeunes des quartiers de Thiapon et de Thionakh ont sonné la révolte. Ils ont constaté que des bornes ont été plantées sur leur terrain de football. Avant leur séance d’entraînement, ces jeunes ont décidé de tout enlever et se disent prêts à se battre pour conserver leur unique espace de jeu. Ce sera, disent-ils, œil pour œil, dent pour dent.
‘’Cet espace nous a été attribué. Ça fait très longtemps qu’on y joue au foot. C’est injuste de vouloir priver les jeunes de cet unique espace de loisirs. Peu importe celui qui veut nous faire partir d’ici. Nous sommes prêts à nous battre pour garder notre terrain’’, a lancé avec force Mamadou Moustapha Mbow. De plus, le porte-parole des jeunes a rappelé aux spéculateurs qu’ils peuvent continuer à initier ces actions irrégulières. Mais, s’empresse-t-il d’ajouter, ses camarades et lui ne vont ‘’jamais permettre’’ une quelconque construction sur ce site dédié au sport. ‘’Nous les attendons de pied ferme. Ils peuvent faire les morcellements irréguliers, mais ils ne construiront jamais ici’’, a prévenu Mamadou Moustapha Mbow, précisant que le combat pour la conservation de leur terrain va se poursuivre.
La colère des Noons, à l’origine des désaffectations
Si les jeunes des deux quartiers précités se battent pour la conservation de leur terrain de foot, le Comité de veille des Sérères noons, regroupant les quartiers de Thialy, Petit-Thialy Extension et de Thionakh ont enclenché, en vain, le combat pour la restitution des parcelles à leurs propriétaires victimes d’une désaffectation décidée par l’autorité municipale.
Membre dudit comité, Patrice Ndione estime que cette ‘’forfaiture’’ risque d’être le plus ‘’gros scandale’’ foncier que la ville de Thiès ait jamais connu. ‘’La plupart des terrains qui ont été désaffectés ont été automatiquement réaffectés. Les gens qui ont bénéficié de ces désaffectations ont revendu leurs parcelles. Les anciens propriétaires de terrains affirment que parmi les récents bénéficiaires, il y a des gens du cadastre et des domaines. C’est comme une sorte de conférence de Berlin qu’ils ont tenue et très vite organisée. Certaines parcelles ont été morcelées en deux pour être revendues. C’est un grand scandale foncier ce qui se passe à Thiès. C’est extrêmement grave’’, a tempêté le jeune homme.
Dans un document adressé au receveur des impôts et des domaines, en date du 20 mai 2020, le comité dirigé par Patrice Faye ‘’s’insurge contre la désaffectation de parcelles qui avaient été attribuées à des familles comme dédommagement de leurs peines dans le cadre de lotissements antérieurs sur leurs champs’’. Mais aujourd’hui, les Noons de Thiès disent être victimes à nouveau d‘une ‘’véritable forfaiture’’, à la limite d’une ‘’injustice’’.
C’est pourquoi le coordonnateur de leur comité et ses camarades ‘’exigent la restitution des parcelles à leurs légitimes propriétaires, que justice soit faite et que de pareilles situations ne se reproduisent plus dans notre localité’’.
Par contre, ça sera sans compter sur le soutien des autorités municipales qui disent avoir suivi ‘’en toute légalité’’ la procédure de désaffectation.
Un autre problème auquel fait face cette population est l’exploitation ‘’anarchique’’ des pierres latéritiques qui longent le canal de la zone, par un promoteur du nom de Sy. Le coordonnateur du Comité de veille des Noons prévient et affirme que c’est une violation du plan de lotissement de 1996. Elle peut entraîner des conséquences graves telles que les inondations des maisons riveraines par les eaux de pluie venant du canal. Ainsi, Patrice Faye et toute la communauté noon des quartiers précités soutiennent que ‘’ceci constitue une menace sérieuse pour les populations’’.
Ils exigent, par conséquent, l’arrêt sans condition des travaux initiés par le sieur Sy.
GAUSTIN DIATTA (THIES)