Fatimé Raymonde Habré lève le voile sur la traite arabe

Invitée des "Débats d’idées et de rencontres" à l'Institut français de Dakar, l’autrice du roman ‘’Symbil et le décret royal", Fatimé Raymonde Habré a présenté son ouvrage. Elle a parlé de la situation des esclaves noirs déportés vers les pays arabes. Des faits que les Arabes tentent d'effacer des annales de l’histoire, d’après elle. Son roman a remporté le Grand Prix du livre féminin Ken Bugul.
S’il y a assez de documentations sur la traite atlantique, la situation est différente par rapport aux esclaves noirs déportés vers les pays arabes. Ces derniers s'efforcent d'occulter cette partie de l'histoire, selon Fatimé Raymonde Habré. Invitée des "Débats d’idées et de rencontres" à l'Institut français de Dakar, l’autrice de ‘’Symbil et le décret royal" a donné des détails sur cette œuvre, Grand Prix du livre féminin Ken Bugul de l'édition 2024.
Ce livre évoque, en effet, la question de la traite arabe dans les pays de l’Afrique noire. Ayant envie d'écrire sur ce thème difficile à aborder, parce que tabou, Mme Habré a relevé des expériences féminines tirées de cette douloureuse histoire. "J'ai voulu parler de ces expériences vécues, des douleurs, des peines, des joies, des rêves tirés d'une histoire", a-t-elle soutenu devant un parterre de personnes.
Ce livre relate l’histoire de Symbil, une jeune fille de 15 ans enlevée par des caravaniers, près d’une palmeraie, en plein désert du Sahara. La romancière retrace le parcours de la jeune fille dans tout son périple jusqu'à ce qu'elle soit vendue par le harem d’un sultan arabe. ‘’Ça me permet, moi, de décrire complètement c'est quoi un harem et comment on y vit, quelle est son évolution et tous les problèmes qui se trouvent au niveau de ce livre : la question de l'esclavage, toute la douleur qu'on peut en ressentir’’, a expliqué Fatimé Raymonde Habré.
Elle renseigne donc que le harem, ce n'est pas ce qu'on pense être. ‘’Parfois, les peintres orientalistes ont vraiment beaucoup fantasmé au niveau du harem où l’on voit que des belles femmes et tout ; c’est loin d'être la réalité. Le harem, c'est la matrice de la monarchie. C'est là que vont naître les princes. Ce n'est pas du tout simplement une question de dire, c'est pour le roi et c'est la satisfaction de sa libido. Non, pas du tout’’, a dénoncé la juriste de formation.
Madame Habré explique également que le harem permet, dans le temps, aux clans organisés de garder le pouvoir. "À partir de ce moment-là, vous avez le harem, le devoir dynastique qui est attribué aux femmes pour pouvoir donc procréer, assurer une descendance et garder le pouvoir", dit-elle.
Le lecteur suit cette histoire jusqu’à ce que Symbil retourne chez elle, en Afrique, à plus de 10 000 km, soixante-cinq ans après. Elle avait 80 ans. Elle aura passé 65 ans et ses parents n'ont eu aucune nouvelle. Qu'est-ce qu'elle est devenue sur le plan de son identité aussi ? On va voir que son identité a été écrasée complètement alors qu'elle revient chez elle et essaie de s'insérer dans sa société’' détaille Fatimé Raymonde Habré.
Ayant remporté la première édition du Grand Prix du livre féminin Ken Bugul, elle s’est réjouie de cette consécration. ‘’Ça m'a fait beaucoup plaisir. Parce que d'abord, cette initiative est à saluer. Le prix est pour les femmes, ça leur donne une visibilité. Ça leur permet aussi de faire entendre leur voix. Donc, c'est quelque chose de très important. C'est encourageant aussi’, dit-elle.
Par ailleurs, en marge des "Débats d’idées et de rencontres’, il a été également question de procéder à la présentation de deux recueils des ateliers d’écriture du Salon du livre féminin 2024. Il s’agit de "Liées et déchaînées" dont les autrices sont Diariatou G. B. Mbow, Kiné Hélène Niang, Selbé Diouf alias ‘’Sister LB’’, Paule Kadja Traoré, Gina N.F Goudiaby, Mame Sack Mariama Diallo, Oumy Ndiaye, Absa Sarr et Paule Sama. L’autre ouvrage collectif est ‘’Pluri’Elles’’. Ces deux ouvrages sont issus des résidences de création et d'écriture de nouvelles tenus en marge du salon du livre féminin organisé par Amina Seck.
BABACAR SY SEYE