La belle voix qui veut faire autrement
Dans sa volonté d’apporter plus de variété dans la musique, la chanteuse Maya Abdul, de son vrai nom Maimouna Touré, produit des mélodies particulières. Avec sa magnifique voix qui donne des frissons, elle s’est spécialisée dans la musique de film. Et ses chansons passent dans les séries les plus suivies au Sénégal. Perfectionniste, Maya prépare depuis longtemps son premier album.
Son nom vous parle moins que ses morceaux. Ses compositions sont connues par les fans de séries sénégalaises comme ‘’Pod et Marichou’’, ‘’Golden’’ ou ‘’Maitresse d’un homme marié’’. Maya Abdul est l’auteur de quelques musiques originales qui rythment la vie des personnages de ces fictions. Cela va de ‘’No More’’ à ‘’Be Strong’’, en passant par ‘’Lima fi Bayi’’ et ‘’Niou Dem’’. De sa voix douce et mélodieuse, elle berce bien de téléspectateurs. Une voix qui peut transporter loin, mais qui a ce don de se muer suivant les humeurs de Maya. Un instrument à multiples cordes, a-t-on envie de la comparer.
Pourtant, celle qui l’a détient n’a appris à jouer avec ses cordes vocales nulle part ailleurs. Elle n’a fréquenté aucune école, disons classique, de musique. Elle a juste pu bénéficier d’un très beau parcours. Ce dernier est à la fois riche et surprenant. Elle peut s’en enorgueillir d’ailleurs, bien qu’elle reste encore inconnue du grand public.
Tout a commencé alors que Maimouna Touré dite ‘’Maya’’ n’était qu’une enfant. Née dans une famille de mélomanes, elle a commencé à écouter de la musique très tôt. Son enfance fut ainsi bercée par des sonorités étrangères telles que le blues, le jazz et la soul, grâce à son père, un amoureux de la musique. Inoculée, Maya Abdul a voulu suivre une carrière musicale. C’est ainsi qu’elle a commencé à gratter la guitare et à chanter, avec l’aide d’Edu Bocandé, un ami à son père. Elle s’est donné à fond pour vivre pleinement sa passion. Aux côtés de Fada Freddy, elle s’est davantage bonifiée.
Maya Abdul est aussi cette voix féerique que vous entendiez lors de concerts live de Daara J Family. Une choriste hors pair qui méritait tout autant une place de lead vocal. ‘’Travailler avec Fada m’a aussi beaucoup aidée, parce qu’il a une superbe voix. Il a participé à ce que ma voix est devenue aujourd’hui’’, avoue-telle. Même si, affirme-t-elle, c’est avec les live de Car’Rapid Music, qu’elle a pu auparavant travailler sa voix et trouver celle qu’elle souhaitait réellement avoir. ‘’C’est avec ce groupe que j’ai commencé mes live. Grâce aux activités que nous menions, j’ai découvert ma puissance vocale’’, sourit-elle avec modestie.
Aujourd’hui, Maya Abdul s’est spécialisée, en attendant de réaliser d’autres projets, dans la musique de film. Un bon tuyau, compte tenu de la floraison des séries qui sont bien appréciées par les Sénégalais. En effet, son label Neegurap Music travaille en étroite collaboration avec Marodi, une maison de production de séries. La comédienne voix off a ainsi produit dans ‘’Golden’’, dans la saison 3 de ‘’Pod et Marichou’’ et travaille pour la saison 4 de cette série. Elle a également composé le générique de ‘’Maitresse d’un homme marié’’.
Son secret ? ‘’En générale, on fait des chansons qu’on leur (producteurs de films) propose, et eux, ils les font passer dans la série, s’ils les aiment, explique-t-elle. Evoquant l’importance de la musique de film, l’artiste considère que c’est ce qui donne vie aux émotions. ‘’Elle apporte le frisson dans le jeu des acteurs’’, fait-elle savoir. Ainsi, avec 5 singles dans son répertoire, Maya s’est déjà bâti un nom dans la musique au Sénégal. Elle a fait des featuring avec certains artistes, et pas des moindres. Le magnifique son ‘’Be Strong’’ est fait avec Admow Flow. Et le morceau ‘’Niou Dem’’ est produit avec un de ses collaborateurs de Car’Rapid Music, son ancien crew. Ce sont d’ailleurs ces derniers qui sont les propriétaires du label Neegurap Music.
Le thème de l’amour est le champ privilégié de la chanteuse. Jusque-là, toutes ses mélodies tournent autour. Elles sont assez douces, voire dramatiques, vu les contextes des séries sénégalaises dans lesquels Maya les a chantées. Et elle se définit comme une personne sensible. Mais elle va plus loin : ‘’L’amour, c’est ce qu’on vit le plus. Il reste le sujet le plus inspirant. Et c’est ce qui marche le mieux au Sénégal.’’ Dans la société où l’homme est défini comme étant un être violant par nature, l’amour n’est-elle pas le sujet le plus approprié pour apporter de la fraicheur dans le climat des relations humaines ? D’autant que ‘’la culture contribue à lisser les comportements dans le sens d’une vie sociale apaisée’’, affirmait le psychologue Ousmane Ndiaye dans un entretien accordé à ‘’EnQuête’’.
Maya Abdul prépare son premier album. Elle promet d’y traiter d’autres sujets sociétaux. Cependant, ‘’quel que soit le thème abordé en musique, l’histoire tourne toujours autour des relations humaines’’, assure-t-elle. L’opus devait sortir l’année dernière. Mais Maya est en train de le retravailler davantage. Elle est perfectionniste. Le fan de l’interprète de ‘’We Sing in Time’’ n’est pas le genre d’artiste qui sort un produit à la va-vite. ‘’Je n’étais pas vraiment prête, parce j’avais besoin d’y travailler encore. Je suis venue pour proposer quelque chose de diffèrent. Donc, je compte prendre le temps qu’il faut pour travailler les textes, les sonorités et tout’’, dit-elle.
Si Maya a plus d’influences musicales étrangères, elle reste tout de même ouverte aux sonorités locales. D’ailleurs, au-delà de Fada Freddy, de Beyonce et de Rihanna qui l’inspirent, Viviane Chedid reste une référence pour elle. ‘’Ce que j’aime chez elle est sa capacité à s’adapter à la musique de son époque. Les gens disent souvent qu’elle fait des reprises. C’est peut-être vrai, mais c’est toujours bien. On aime écouter ce qu’elle fait ; elle nous fait danser.
Et elle est très belle’’, apprécie-t-elle. Il faut dire que Viviane propose un mbalax teinté de soul et de r’n’b. En réalité, Maya se laisse guider par ses sensibilités qui la mènent d’habitude vers l’acoustique, le jazz, le folk, la musique soul… ‘’En général, on me donne des instrumentales, et si je ressens quelque chose, j’écris. C’est comme ça que je fonctionne’’, explique-t-elle. Et comme elle apprend des autres en les écoutant, sa playlist est composée de sonorités particulières. ’’Moi, je suis dans la musique populaire. J’aime les musiques particulières, parce qu’elles m’apportent quelque chose de différent. C’est comme quand un étudiant lit un livre. Donc, quand j’écoute un artiste, c’est que cette personne a quelque chose de singulier dont moi j’ai besoin’’, sourit-elle.
BABACAR SY SEYE