Publié le 22 Jun 2015 - 13:35
MOTS CHOISIS

« Peuls »  de Thierno Monénembo_Editions du Seuil – 497 Pages 

 

L’histoire des Peuls racontée par Sérère ne peut être que cocasse !!!

Voilà la prouesse trouvée par Thierno Monénembo, l’un des plus grands écrivains de l’Afrique contemporaine et peut être même le plus grand. Ici, il donne la voix à ce parent à plaisanterie,  nous raconter l’histoire des Peuls, son  peuple.

D’emblée, en dédicace, tient-il à égratigner ses cousins sérères pour ce livre écrit en la mémoire de Mangoné  Niang, ce grand intellectuel qui repose  dans ma ville de Rufisque et précisément à Thawlène depuis décembre 2012,  de Siradio Diallo, de Hampathé Bâ, de William Sassine, d’Oncle Macka, de Abou « Pop’lation » Camara…., bref de ces intellectuels qui ont marqué toute une génération.

Eh oui ! Et pour « ces idiots de Sérères » nous dit-il enfin, certainement pour qu’ils comprennent définitivement les origines de la lignée Peul, ce grand peuple.

N’empêche et malgré tout, le Sérère se demande toujours comment diable le Peul, « cet être frêle et belliqueux, sibyllin et acariâtre, goûtant à la solitude et pétri d’orgueil, cette âme insaisissable qui ne fait rien comme les autres », est-il arrivé de l’état de « chien errant à celui de bâtisseur d’empires ; de pillard impur à celui de fanatique musulman ».

 Le Sérère admet qu’il n’a pas une tête suffisamment large pour résoudre cette équation. Lui,  il a son repère qui situe les Peuls au Tékrour, cet Etat fondé par les Dia-Ôgo (les maîtres du fer en langue peule, nous apprend-il ) qui  y ont régné  jusque vers le XIème siècle. Tout au plus, situe-t-il  l’apogée des Peuls au XVIème siècle avec Koly Tenguéla, un Peul du clan des Bâ, de l’invivable tribu des Yalalbé qui marqua de ses exploits et de ses déchirements quatre siècles d’histoire. Il nous dit que ce même Koly Tenguéla se tailla un immense Etat sur les décombres du Tékrour pour y faire naître l’empire des Dényankobé, le pivot du remuant empire Peul. Cet empire servira de tremplin aux fameuses hégémonies peules d’inspiration musulmane qui, à partir du XVIIIème siècle, déferleront de la Mauritanie au Lac Tchad et ne s’achèveront qu’avec la colonisation européenne à la fin du XIXème siècle.

Aussi, pour ironiser, dit-il au Peul : « Et votre départ du pays mythique de Héli et Yoyo situé entre le fleuve Milia (le Nil)  et la mer de la Félicité (la mer Rouge) ! A vous entendre, le trône y supportera le fessier de vingt-deux rois peuls. Juste vingt-deux, pas un de plus, pas un de moins. Le premier s’appelait Ilo Yalâdi et était contemporain du roi Salomon et, comme lui, élevait des autruches ! Un pays septénaire selon ta scabreuse légende : sept montagnes, sept lacs, sept mines d’or, sept variétés de céréales, sept raisons d’y naître et d’y vivre heureux… Ouf, déjà ma mémoire s’embrouille… petit Peul ».

Et comme le Peul insiste, le Sérère se décide d’ouvrir la bouche pour lui dire qui il est. Et là, Thierno Monénembo insuffle au Sérère les mots, les phrases, les cycles de l’histoire pour nous dévoiler au travers de ce roman tous les grands moments qui ont rythmé l’histoire des Peuls en Afrique de l’Ouest avec Dôya Malal qui fut le premier Peul et qui eut sept fils et cinq filles. Les deux premiers mâles étaient des jumeaux : Birom et Birane. La saga des Peuls commence avec eux..

Par une reconstitution précise de la vie de ce peuple et tel un griot, Monenembo retrace l’histoire des peuls, des origines, prenant repères vers 1400  jusqu'à la prise en main par les français au début du vingtième siècle, nous restituant si admirablement  des moments épiques de leur évolution comme les alternances entre les Alphaya et les Sorya, les petits fils de Seïdy, le mystique de Macina qui avait fondé Timbo. Ici, on apprendra que les alternances ne sont pas venues avec l’ère de la démocratie à « l’occidentale », elles constituaient des modes de fonctionnement dans ces royaumes et ceci, bien avant la colonisation. C’est aussi à savoir, tout comme l’hymne de la Guinée dont il nous enseigne qu’il a été inspiré sur celui de Alpha Yaya, ce grand résistant et qui, avec Samory Touré,  demeurent les deux héros officiels de la Guinée.

Un livre succulent, un roman historique à découvrir. Il constitue  une contribution majeure à notre patrimoine culturel et  permet une meilleure compréhension de l’histoire de ce grand peuple Peul et par là-même, la nôtre.

Aussi, permet-il encore d’apprécier ce cousinage à plaisanterie entre  Sérères et Peuls qui nous démontrent par les liens séculaires qui les unissent, cette formidable Afrique, terre de fraternité et de tolérance !!!

Ameth GUISSE

 

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