Une ‘’Signature’’ sans faute
La soixantaine bien entamée, Ndèye Seck ‘’Signature’’ a bien changé entre la sortie de son tube phare et aujourd’hui. Mais elle reste quand même toujours amoureuse du chant et projette même, malgré une longue absence sur la scène musicale, de sortir un nouvel album. A l’occasion de la journée internationale de la femme célébrée hier, EnQuête lui rend hommage en revenant sur son parcours.
On ne l’entend presque plus. Pourtant, elle est là et bien là. Même si elle a perdu de sa superbe. Rencontrée chez elle à Thiès, bien habillée avec un grand boubou blanc à la broderie en couleur fine assortie d’un ensemble de bijoux en or, Ndèye Seck Signature n’est plus cette belle dame aux formes généreuses, aux lèvres pulpeuses et au regard perçant rehaussé par un super joli teint noir.
Aujourd’hui, elle a perdu du poids même si sa noirceur et son sourire restent encore éclatants. Le poids de l’âge est passé par là. Malgré tout, la cantatrice d’origine thiessoise s’accroche à la vie et à son métier. Car, même si depuis bien longtemps elle est restée aphone, là elle est prête à reprendre du service. ‘’J’ai un album qui est prêt et que je veux laisser à la postérité’’, informe-t-elle d’une voix douce et hésitante. Pourtant rien ne l’y oblige. Son legs personnel et l’héritage qu’elle a reçu de sa grand-mère Mbayang Madior ne sont pas en péril. En effet, Seydou Mbaye, l’un de ses fils, s’essaie au chant. ‘’Il est bien et je pense qu’il peut s’en sortir’’, assure notre interlocutrice. Mais en attendant que son fils prenne de l’envol, Ndèye Seck va encore s’occuper de son répertoire. Surtout qu’elle trouve que ‘’la jeune génération doit encore apprendre des générations anciennes’’. ‘’Il y a certains jeunes qui chantent bien mais il leur manque tout de même certaines petites choses. Mais ici, on ne termine presque jamais son apprentissage parce qu’il suffit de sortir une ou deux chansons pour se targuer d’être un grand chanteur’’, dénonce-t-elle.
Ndèye Seck a été d’abord formée par sa grand-mère. ‘’Enfant, ma mère m’a confiée à l’une de ses tantes qui n’avait pas d’enfants. C’est elle qui s’est occupée de toute mon éducation. Elle était une très grande chanteuse. C’est Mbayang Madior qui a chanté Lamine Guèye, Léopold Sédar Senghor ou encore Aladji Bibi Ndiaye. Elle était très connue’’, se souvient-elle. C’est elle d’ailleurs qui lui a transmis le virus de la chanson. Même si, enfant, cette grand-mère l’avait envoyée à l’école. Seulement, en classe, la petite griotte n’excellait que dans le chant. ‘’A 7 ans, j’étais déjà consciente de mon don. Et à l’école, quand je chantais, mes camarades de classe me disaient que c’était cela mon destin et que je n’avais pas ma place à l’école’’, se souvient-elle. Petite, elle a alors commencé à accompagner Mamy Mbayang dans les cérémonies. Jeune fille, Ndèye Seck est renvoyée chez ses parents à Thiès. Elle se marie mais souhaite continuer à chanter. Ce qui n’enchante pas son époux. C’est cela qui explique quelque part son recul après la sortie de son tube ‘’Signature’’. Pourtant, c’est grâce à cette chanson qu’elle s’est révélée au grand public au milieu des années 1990.
‘’Signaturo ndéké yaay boroom, Adji Balla Tallo ndéké yaay boroom de signéel ma ci’’. Il faut être très jeune pour ne pas se rappeler le refrain de cette chanson qui a égayé bien des générations à cette époque. Et comme on dit, la bonne musique ne meurt jamais. Cet opus en fait partie, elle peut encore faire danser bon nombre de jeunes. Ayant aimé et apprécié cette composition musicale, le public a collé à son auteur le quolibet de ‘’signature’’ pour ainsi l’identifier. Depuis, ce surnom lui colle à la peau comme un deuxième prénom.
Hommage
Au-delà de sa belle voix et de sa prestance, les Sénégalais ont aimé Ndèye Seck parce qu’elle est une dame correcte et bien polie. Sans fioritures, elle s’est toujours présentée au public, simple et souriante. Aujourd’hui, elle a le respect et la reconnaissance des jeunes artistes de sa région ainsi que des autorités locales. ‘’Rien ne se fait à Thiès sans qu’on n’y m’implique. Quand une haute autorité vient ici, on m’appelle pour m’en informer et me demander mon avis aussi sur comment doit être organisée la cérémonie. Les jeunes artistes manifestent beaucoup de respect à mon égard et je ne pouvais espérer mieux’’, confie-t-elle. Et elle n’est pas de ces virtuoses des arts qui ne souhaitent pas qu’on attende leur mort pour leur rendre hommage. Au contraire, elle pense avoir fait assez de choses bien dans ce pays pour interdire à ceux qui le voudraient de lui rendre des hommages posthumes. Signature.
BIGUE BOB