Les gens de mer sur des charbons ardents
Avec l’apparition du pétrole et du gaz offshore au Sénégal, les travailleurs de la mer ne veulent pas être les laissés-pour-compte. Hier, le Syndicat national des gens de mer et de l’offshore pétrole et gaz du Sénégal a tenu une conférence de presse au siège de la CNTS Keur Madia, pour dénoncer un certain nombre de problèmes.
Le Syndicat national des gens de mer et de l’offshore pétrole et gaz du Sénégal est sur le qui-vive, dans un contexte où le pays attend son ‘’first oil’’.
Hier, en conférence de presse, son secrétaire général, Cheikh Tidiane Ndiaye, a débuté les hostilités en rappelant aux autorités que, pour éviter la malédiction du pétrole, ils doivent inclure tous les acteurs de la mer. D’autant que l’exploitation du pétrole et du gaz en mer touche en premier lieu le marin.
À ce titre le SG ne comprend pas que ‘’les gens de mer soient laissés en rade sur cette affaire, alors qu’ils doivent en bénéficier avant toute autre personne’’.
Dans cette veine, le syndicat s’insurge contre le ministre du Travail qui, dit-on, veut accaparer la tutelle des marins travaillant en offshore, alors que jusque-là, ce secteur était sous l’autorité de l’Anam (Agence nationale des affaires maritimes).
Ensuite, ils ont mis en exergue d’autres problèmes qu’ils rencontrent dans leur travail quotidien. ‘’Depuis deux ans, nous discutons avec les autorités compétentes, mais aucun avancement n’a été noté’’, souligne le SG Cheikh Tidiane Ndiaye. Pour qui l’État doit opter pour des discussions afin que chacun puisse en tirer profit. Alors qu’il est noté l’absence d’un cadre juridique qui lie les travailleurs de l’offshore, regrette le secrétaire général qui trouve cette situation ‘’inadmissible’’.
Secrétaire administratif du syndicat, Aly Aidara a insisté sur la nécessité de former les marins. ‘’Pour faire profiter aux Sénégalais des offres du secteur de l’hydrocarbure, il est impératif, pour le pays, au regard des enjeux et perspectives, que les marins sénégalais soient bien formés dans les métiers du pétrole et du gaz’’, dit-il.
A ses yeux, l’État du Sénégal à l’obligation de créer un environnement favorable à la formation des Sénégalais, afin de leur permettre d’être aptes à l’emploi dans le secteur de l’hydrocarbure, pour assurer une bonne dynamique de gestion équitable des ressources pétrolières et gazières. Cela s’inscrit, ajoute-t-il, dans une perspective de suppléer et de compléter les politiques de l’État dans ce domaine.
‘’La Plateforme des syndicats des marins de la pêche, du commerce et du pétrole, en collaboration avec l’École nationale de formation maritime, les structures de formations agréées et des sociétés de placement des gens de mer, se veulent porteuses du projet de formation qui aide à mettre en place un dispositif adéquat pour adapter la formation des marins dans l’offshore’’, renseigne-t-il. Un tel projet a pour ambition l’insertion d’un grand nombre de jeunes, mais également donner au pays une main-d’œuvre qualifiée capable de participer activement au développement économique.
‘’Traitement inhumain des gens de mer dans les navires’’
Ainsi, Yoro Kane dénonce le traitement inhumain des gens de mer dans les navires. Il révèle qu’ils travaillent 20 heures par jour et reçoivent un salaire de 74 000 F. Il explique que cela est dû à une non-révision de la convention collective nationale qui est obsolète et qui date de 1976. Malgré les multiples dénonciations des organisations syndicales, explique-t-il, l’État n’a pas pensé à une révision de cette convention. Or, informe M. Kane, l’employeur peut renvoyer un travailleur quand il le veut et ne rien craindre.
‘’Les marins ont décidé de prendre leur destin en main. On a commencé avec les navires de l’Union européenne qui sont au nombre de 78. On a mené des actions, la semaine passée, en bloquant tous les navires en Côte d’Ivoire, avec la collaboration des syndicats ivoiriens’’, révèle-t-il.
En effet, renseigne Yoro Kane, dans les accords de pêche que le Sénégal a signés avec l’UE, se trouve un protocole qui dit qu’on ne doit pas payer en deçà du salaire de l’OIT (Organisation internationale du travail), qui doit être de 405 000 F CFA. Mais, regrette-t-il, personne ne respecte cela. On se contente de payer les salaires de la convention qui est de 74 000 F CFA, fulmine M. Kane.
Moustapha Lô, secrétaire chargé de l’offshore dans le syndicat national des gens de mer, de renchérir que le secteur du transport maritime ne recrute pas et ne retient pas. Or, ce domaine génère beaucoup d’emplois et les premiers bénéficiaires sont les jeunes. Il considère que l’État peut régler la question de l’emploi, en réglant les problèmes dans ce domaine.
Il aussi fait cas de la stigmatisation que subissent les femmes dans ce domaine. ‘’Des femmes sont refusées à des postes, du fait qu’elles sont femmes, ce qui n’est pas normal’’, dénonce-t-il.