Le monde de Mbida sous verre
Les tableaux rutilants de l’artiste Mbida, véritable virtuose du sous-verre, ont élu domicile, depuis mardi et jusqu’au 28 avril, à l'Institut culturel français de Dakar. Une promenade dans ce décor entre nationalisme pictural et nostalgie des fastes d’antan.
C’est un Birahim Fall, alias Mbida, extrêmement assagi qui s’est présenté, mardi, à la presse pour une conférence donnée à l’occasion de l’exposition, jusqu’à la fin avril, de ses toiles à l’institut français de Dakar. Ayant pour thème ''Ma peinture, mon monde et moi'', cette communication a été pour lui le canevas parfait d’un échange sans tabou avec le public. ''Je suis arrivé à un âge vénérable où (NDLR : 63 ans), le plus important est de transmettre le maximum d’amour. C’est pourquoi, aujourd’hui, moi qui ne sais finalement m’exprimer que par ma peinture, je veux me faire comprendre de ceux à qui je n’ai jamais accordé le temps de me comprendre'', a déclaré l’artiste, presque zen dans son approche des choses.
Entouré de ses célèbres sous-verres saturés de vie, de femmes, d’instruments de musique et de fleurs, l’artiste a pris - pour une fois ? - le temps d’expliciter sa vision de l’art, de la vie. ''Ma philosophie, en peinture, a toujours été de mettre un maximum de couleurs dans un minimum d’espace'', a raconté Mbida, glissant, dans le même souffle, qu’il répugnait peindre des choses ''tristes, pas joyeuses''. Autre thématique cruciale pour le peintre, celle de l’enfance : ''Mes tableaux sont presque tous à propos de l’enfance, de mes souvenirs tendres de cette période où je restais des jours entiers à contempler les fleurs, la nature, et la beauté des femmes, de ma mère en particulier'', s’est-il confié en montrant du doigt une de ses œuvres, ''la femme-paon'', pour que le public puisse en admirer le détail exquis.
Tout n’a pas toujours été pourtant rose dans la vie de cet artiste : dépression, alcoolisme, drogue, amputation de son pied droit… il a parlé, sans ambages, de tous les sacrifices faits sur l’autel de la peinture, cette muse cruelle qui lui a presque coûté jusqu’à sa santé mentale. ''En regardant derrière, je me rends compte que c’est 40 ans de ma vie que m’ont bouffé mes pinceaux… Je ne regrette pas, néanmoins, parce qu’un tableau est un acte d’amour. En cela, il n’a pas de prix'', a-t-il confessé. Une belle chose à dire pour l'artiste en béret pour qui, ''aimer une œuvre, c’est déjà l’acheter à moitié''.
Sophiane Bengeloun