Les journalistes à l'épreuve des médias sociaux
Autant les réseaux sociaux peuvent être une niche d’informations pour les journalistes, autant ils peuvent les nuire. C’est ce qui ressort du panel organisé hier, à la fondation Frederich Ebert, par la Convention des jeunes reporters du Sénégal (CJRS), dans le cadre de la Journée mondiale de la presse célébrée le 3 mai.
''Parler sans crainte. Quelle responsabilité pour la presse avec les nouveaux médias dits réseaux sociaux''. C’est le thème du panel organisé par la Convention des jeunes reporters du Sénégal (Cjrs), hier dans le cadre de la Journée mondiale de la presse célébrée le 3 mai. Animé par les journalistes Tidiane Kassé et Mame Less Camara ainsi que le professeur de droit de l’information, Bouna Manel Fall, le panel a été une occasion de disséquer le thème sous toutes ses coutures.
Selon Mame Less Camara, ''la notion de journaliste commence à se dilater'' avec l’avènement des réseaux sociaux, parce qu’englobant des gens qui ne sont pas des journalistes classiques mais des journalistes citoyens''. D'après le professeur de radio, cette situation est source de désinformation et préjudiciable au journaliste qui ''court le risque d’être confondu à d’autres dont le journalisme n’est ni la vocation ni l’ambition''. ''Cela peut dévaloriser le travail qu’il fait et faire en sorte qu’il soit de moindre impact à l’endroit du public'', a insisté Mame Less Camara.
Abondant dans le même sens, son confrère, Tdiane Kassé, pense que les journalistes doivent être forts par rapport à cette tendance. ''Le défi, en tant que journaliste, c’est de ne pas subir cette dictature de l’information rapide et sans aucune base que livrent les réseaux sociaux comme Facebook ou Twitter'', indique le journaliste sportif. Parce que, argue-t-il, ''avec les réseaux sociaux, le journaliste n’a plus le monopole de l’information ni le privilège de la formater. Or ceux qui animent les réseaux sociaux n'ont pas le souci de la rigueur, de la vérité, de l'exactitude''. À ce niveau, le professeur Bouna Manel Fall déplore le vide juridique, en laissant entendre que la loi sénégalaise est en retard concernant les bloggeurs. Même si, par ailleurs, la loi sur la cybercriminalité prévoit des sanctions de 1 an à 7 ans et une amende de 500.000 à 10 millions de francs Cfa, lorsque le journaliste bafoue le respect de la protection des droits de la personnalité.
Toutefois, Tidiane Kassé invite les journalistes à profiter de l’opportunité qu’offrent les réseaux sociaux. ''Les bribes d’informations mises sur la toile sont des pistes d’investigations sur lesquelles il faut travailler'', suggère le journaliste formateur tout en insistant sur la prudence.
La peur, pas une qualité du journaliste
S’agissant de la crainte qui peut habiter un journaliste quant à la publication d’une information, le directeur de publication de Waa Sports (ex-Walf Sport) lance à ses jeunes confrères : ''Nous avons plusieurs motifs de crainte. Mais le journaliste doit surtout craindre pour la qualité de son travail, sa rigueur, la véracité de l’information et son impact sur la société.'' En d’autres termes, il est question de la responsabilité du journaliste.
Quant aux causes de cette crainte, Tidiane Kassé explique qu’elles sont à la fois externes et endogènes. Concernant les causes externes, elles sont surtout liées aux groupes de pression. ''La religion, les raisons économiques peuvent être des facteurs de crainte'', avance Mame Less Camara. Le professeur de radio estime du reste que la première source de la peur c’est le journaliste lui-même. ''Jusqu’où il est prêt à aller, à exposer parfois sa sécurité, à remettre en cause sa carrière parce qu’il est sûr parfois qu’un discours plaît plus à son patron qu’à un autre...'', s’interroge-t-il.
Aussi a-t-il relevé la manière dont les journalistes traitent les informations concernant les chefs religieux. Mais pour Tidiane Kassé, il y a une évolution. Toujours est-il que les deux doyens de la presse s'accordent à dire que ''la peur n’est pas une qualité du journaliste''. ''Ce n’est pas qu’il faut être un téméraire'', tempère Mame Less Camara, mais ''le public a droit à la vérité (…). Si le journaliste ne met en avant que sa sécurité pour taire une information, cela veut dire qu’il trahit sa mission ou qu’il s’est trompé de métier''.
FATOU SY
AVERTISSEMENT!
Il est strictement interdit aux sites d'information établis ou non au Sénégal de copier-coller les articles d' EnQuête+ sans autorisation express. Les contrevenants à cette interdiction feront l'objet de poursuites judiciaires immédiates.