Sur les traces d’un trio révolutionnaire
Le film ‘’The revolution won’t be televised’’ a été projeté hier au Grand-théâtre. Réalisé par la Sénégalaise Rama Thiaw, il retrace le parcours de trois personnes à la fois rappeurs et activistes. Il s’agit des y’en a marristes du groupe Keur-gui.
Des grenades lacrymogènes, des courses-poursuites, des forces de l’ordre armées jusqu’aux dents, face à des manifestants déterminés. Voilà des scènes qui ne manquent pas de captiver l’attention de ceux qui ont suivi le film ‘’The revolution won’t be televised’’. Bref, c’est un vrai soulèvement. Projeté pour la première fois hier au Grand-théâtre de Dakar, ce documentaire qui a reçu le prix de la critique à la Berlinale est un témoignage d’un épisode récent de l’évolution du Sénégal.
L’histoire commence en février 2012 à Dakar par le refus de la population sénégalaise d’accepter la décision du Conseil constitutionnel de valider la candidature du président Abdoulaye Wade pour un troisième mandat. Une tension vive est notée dans la capitale sénégalaise. Ces séquences filmées sont mixées avec le parcours des membres du mouvement citoyen Y’en a marre, en l’occurrence le groupe de rap ‘’Keur Gui’’. L’on montre comment ce groupe de rappeurs originaires de Kaolack a créé une révolution pacifique pour s’opposer contre la volonté du Président d’alors de briguer un troisième mandat.
Sur les premières images, c’est une dame révoltée qui raconte comment elle a été fascinée par la position du rappeur ‘’Thiat’’ (membre du groupe Keur gui). Sous une lampe tempête, elle est concentrée dans l’écriture de quelques pages, cigarette à la main. La caméra de la cinéaste Rama Thiaw a suivi ce groupe tout au long de la révolution. L’auteur du film a montré à travers des images prises en pleine tension, les stratégies adoptées et le courage des rappeurs considérés comme des activistes.
Au chapitre 1, c’est la lutte contre la décision du Conseil constitutionnel. Entre des interdictions de marche, de manifestations, l’arrestation de pas mal de membres de Y en a marre, l’on pouvait également voir les vidéos de quelques éditions de journaux télévisés de la TFM, de Walf Fm et de France 24 qui traitaient de cette ‘’révolution’’ dite pacifique. Il en est de même pour la Une des journaux et la parution de quelques articles.
Dans le deuxième chapitre, il s’agissait plus de dévoiler la défaite de Wade après le travail abattu par le mouvement citoyen. La réalisatrice a également rappelé, par les images, la visite du Président Macky Sall à ce mouvement avant les résultats du second tour. Il disait à l’époque : ‘’Je ferai un mandat de 5 ans et seuls deux mandats seront permis.’’
Il n’empêche, ces trois amis Thiat, Kilifeu et Gadiaga leur manager dont le parcours constitue l’essence du film, ont poursuivi le chemin de la révolte. Au lendemain de cette victoire, ce groupe se rend au pays de Thomas Sankara pour un grand concert et des débats avec des étudiants burkinabés. Ils profitent de ce voyage pour sensibiliser ces jeunes sur la nécessité de s’engager afin de prendre en main l’avenir de leur pays. C’est ainsi que, bien après, le Président Blaise Compaoré a été ‘’chassé’’ du pouvoir.
La fin de ce film de près de deux tours d’horloge a été réservée à la déception de ces activistes face à la gouvernance du président de la République du Sénégal Macky Sall, avec de nouvelles chansons composées pour dénoncer sa gestion. Ainsi, la révolution est perpétuelle chez ces trois amis qui ne sont engagés dans l’art que pour faire vivre leur activisme. Parcours fascinant d’un trio révolutionnaire …
AMINATA FAYE