Publié le 14 Nov 2019 - 21:30
RECONNU COUPABLE DU DÉLIT DE DIFFAMATION

L’artiste Mc Balédio condamné à payer 500 mille à l’Etat et aux 4 syndicats d’enseignants

 

Le tribunal grande instance de Kolda a finalement reconnu l’artiste Mc Balédio coupable de diffamation. Il a été condamné à payer des amendes au Sels/Authentique, au Saems, à l’Uden et à l’Ades. Le single, qui contient les paroles incriminées, n’a pas été censuré. Le verdict a été rendu ce mercredi 13 novembre.

 

Mamadou Diao alias ‘’Mc Balédio’’ est édifié. Le tribunal grande instance de Kolda considère que les paroles de son nouveau single, ‘’Moussé Kalabanté’’, sont diffamatoires. Elles dépassent les limites admissibles en matière de liberté d’expression artistique. Même si l’artiste est un personnage public connu pour son sens toujours bienveillant de l’humour et de la formule. Les juges jugent que ces paroles du ‘’Lion du Fouladou’’ portent atteinte à l’honneur des enseignants qui avaient demandé, par le biais de leur avocat, Me Prosper Djiba, lors du procès, la somme de 10 millions à payer à chaque syndicat représenté pour le préjudice moral. Mais aussi 10 millions à payer à Waly Diatta et à Moustapha Kandé.

Finalement, l’artiste a été condamné à payer la somme de 500 mille francs Cfa répartie comme suit : 100 mille francs à allouer à chaque organisation syndicale (Sels/Authentique, Saems, Uden et Ades) et la somme de 100 mille francs Cfa à titre de dommages et intérêts pour tous les préjudices confondus.

Une sentence qui réjouit les enseignants. ‘’Nous nous félicitons de ce verdict. Car, en aucun moment, nous n'avons souhaité l'arrestation de ce jeune frère pour certains et neveu pour d'autres. L'objectif, pour nous, était de lui faire comprendre qu'il a franchi le Rubicon d'une part, et faire dans la dissuasion, d'autre part. C'est la valeur pédagogique et symbolique de ce procès’’, ont-ils dit.

Selon eux, l'autre enseignement à tirer, est qu'il faut, à la vérité, reconnaître l'existence du phénomène. Le seul tort du rappeur a été de généraliser. ‘’Par conséquent, nous demandons aux collègues de faire preuve de responsabilité, de probité morale et intellectuelle et de professionnalisme. Ce qui est pardonné, pour le cas d'espèce, à l'étudiant, l'élève, l'ouvrier et un agent d'un autre corps, ne saurait l'être pour l'enseignant, du simple fait de l'autorité qu'il exerce sur l'élève’’, a déclaré Saloum Sonko, professeur de lettres au Cem II de Kolda, par ailleurs secrétaire général du Sels/Authentique/Section Kolda.

‘’Si, pour les autres, l'acte pourrait être assimilé à un détournement de mineure, pour l'enseignant, c'est purement et simplement un viol. Nous devons garder à l'esprit que la société nous a confié ce qu'elle a de plus cher. Par conséquent, c’est très normal qu'elle nous observe, nous épie, j'allais dire. Nos moindres faits et gestes sont surveillés, notre fréquentation, langage et accoutrement également. A Kolda, ma région, dans ce procès, il n'y a ni vainqueur ni vaincu, car le procès a opposé des fils d'une même région. Aux leaders d'opinion (journalistes, artistes, hommes politiques...) sensibilisons, dénonçons et critiquons, s'il le faut, mais arrêtons de peindre Kolda en noir, car il ne se passe rien à Kolda qui n'existe ailleurs’’.

Propos malveillants

Le procès s’est tenu le 2 octobre dernier. Ce jour-là, l’artiste avait soutenu, devant une salle d’audience pleine comme un œuf, que Waly Diatta, professeur d’Eps au lycée Alpha Molo Baldé de Kolda, par ailleurs secrétaire général du Saemes/Section Kolda, avait engrossé une de ses élèves. Ce que ce dernier n’a pas contesté. Il a poursuivi que Moustapha Kandé, enseignant à l’école élémentaire au village de Saré Siminty, avait eu des problèmes dans le village où il servait. Parce qu’il entretenait des rapports sexuels avec la femme du chef de village qui fut son tuteur. ‘’D’ailleurs, suite à ce problème, la femme voulait l’empoisonner. Ce qui avait poussé son chef hiérarchie à affecter Moustapha Kandé dans un autre village’’.

Ces déclarations avaient poussé Moustapha Kandé à dire aux juges qu’il allait porter plainte contre l’artiste. Mais, d’après nos recherches, aucune plainte n’a été déposée au parquet, ni au commissariat, encore moins à la brigade de gendarmerie de Kolda, jusqu’à présent. Lors des débats d’audience, Saloum Sonko, le secrétaire général du Sels/A/Section Kolda, avait justifié leur action en justice en ces termes : ‘’L’artiste nous a traités de bandits, car il soutient, dans son single, que nous enseignants sommes des coureurs de jupons. Il soutient que les enseignants couchent avec leurs élèves et les femmes d’autrui dans les villages. Il poursuit, dans sa chanson, que les enseignants n’épargnent pas les femmes des chefs de village. Nous sommes des bandits à éliminer.’’

L’artiste s’en était défendu en ces termes : ‘’Dans mon single, je n’ai visé personne. Mais j’ai tenu à dénoncer les faits réels de la société. J’ai dit que les ‘Moussé Kalabanté’ détruisent l’avenir de nos enfants qui sont appelés, demain, à devenir des cadres. Mais, en aucun cas, j’ai cité ou visé une personne. Donc, que celui qui se sent morveux se mouche.’’ 

Des propos largement partagés par les Koldois qui considèrent que le single dit la vérité, au vu des arrestations répétitives des éducateurs, ces dernières années.

EMMANUEL BOUBA YANGA (KOLDA)

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