Publié le 2 Dec 2015 - 11:48
SENEGAL- CULTURE

Hommage du monde des arts au peintre et sculpteur Amadou Sow 

 

Dakar, 1er déc (APS) – Des acteurs du monde des arts et de la culture, des acteurs politiques, des membres du corps diplomatique, des amis et des anonymes ont rendu hommage au peintre, sculpteur et artiste graphique sénégalais Amadou Sow, inhumé mardi en fin de matinée au cimetière de Thiaroye, dans la ville de Pikine.

Plusieurs orateurs ont fait des témoignages et salué, au cours de la cérémonie de levée du corps, à l’hôpital Principal de Dakar, la mémoire de l’artiste décédé dans la nuit de samedi à dimanche à l’âge de 64 ans. Ils ont tous relevé son militantisme, pour témoigner de plusieurs aspects importants de la culture africaine, son talent et sa générosité.  Le ministre de la Culture et de la Communication, Mbagnick Ndiaye, a annoncé que son département avait pris la décision, avant le décès de Sow, de lui rendre hommage lors de la 12e édition de la Biennale de l’art africain contemporain, prévue en mai-juin 2016. Cette décision sera maintenue, selon M. Ndiaye.

L’architecte et cinéaste Nicolas Sawalo Cissé a évoqué le poète Léopold Sédar Senghor, pour rendre hommage au défunt peintre, affirmant que c’est le premier président de la République du Sénégal, "qui est aujourd’hui debout pour l’accueillir".  "Quand il a fallu envoyer de jeunes étudiants sénégalais dans un petit pays en territoire, mais riche en culture, berceau d’une civilisation occidentale, l’Autriche, il fallait faire un bon choix. Il (Senghor) choisit Amadou Sow et d’autres encore, pour porter la parole de la nation sénégalaise", a rappelé Cissé. Senghor "avait le sentiment qu’elle (la culture sénégalaise) était aussi grande que la culture autrichienne", a-t-il dit, ajoutant : "Amadou Sow aura laissé un legs immense à la nation sénégalaise, et il est important qu’il soit encore présent pour les générations futures."

Cheikh Hamidou Kane, lui, a rappelé que "Sow appartient à une culture de l’oralité, au versant hal pulaar, fuutanke, maasinanke, de cette culture orale". Il dit avoir compris que Senghor ait pensé à envoyer Amadou Sow et d’autres artistes dans "l’un des hauts lieux de la culture universelle pour y porter le témoignage de l’existence d’une culture orale".
"Amadou Sow était un militant de sa culture orale. Il l’a défendue et illustrée par la peinture, par la sculpture et par les signes, a poursuivi l’ancien ministre. Il a porté témoignage de cette culture orale dans un monde qui, de plus en plus, rend raison à l’Afrique en identifiant les valeurs dont ce continent est porteur."

Ces valeurs ne sont pas seulement les richesses naturelles, énergétiques ou autres, mais aussi les richesses de la culture et l’identité culturelle, a souligné M. Kane, rappelant que Sow a milité pour la Biennale de l’art africain contemporain de Dakar (Dak’Art), dont il est l’auteur du logo. Pour le professeur Maguèye Kassé, enseignant à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, Amadou Sow est "un passeur de cultures, un passeur de valeurs qui sont fondamentalement le fait de notre nation". M. Kassé rappelle avoir connu le peintre en 1976, quand il était doctorant à l’Université de Vienne (Autriche).

"Et depuis ce jour-là, nous ne nous sommes jamais quittés", a-t-il ajouté.  "Il y a environ 15 jours, certains d’entre nous ici étaient présents au lac Rose, à l’invitation d’Amadou Sow, a raconté M. Kassé. Il avait battu le rappel des troupes. C’est comme si, de façon prémonitoire, il nous rassemblait pour qu’on lui dise, de son vivant, ce qu’on pensait de lui. (…) Nous avons dit, du fond du cœur, ce que nous pensions de la générosité d’Amadou…" En saluant Amadou Sow aujourd’hui, "nous saluons un grand homme, qui a plein de talent et qui est très généreux. Nous savons qu’il a laissé des œuvres pérennes. Chaque fois que la biennale se tiendra et qu’on verra son logo, nous penserons à lui", a conclu Maguèye Kassé, la voix étreinte par l’émotion.

Pour l’historienne Penda Mbow, "Amadou Sow est parti, mais il reste immortel parce qu’il a produit des œuvres de valeur et de qualité". S’adressant à la veuve de l’artiste et à ses enfants, elle a dit : "Vous avez perdu un grand homme, mais vous n’êtes pas seuls. Vous l’avez perdu avec nous. (…) Il avait le talent, la générosité et avait surtout la vertu." Appelé à témoigner, le directeur de la société Eiffage, Gérard Sénac, a affirmé, à propos d’Amadou Sow, qu’il préférait rester sur "les bonnes choses" qu’il a vécues avec lui, ainsi que sur le bonheur partagé. "C’étaient des moments si pétillants, a souligné Sénac. Amadou aimait vivre. Amadou aimait son prochain. Il aimait ses amis et sa famille. Il en parlait souvent. Nous sommes malheureux aujourd’hui, mais je crois que nous sommes aussi tous heureux de l’avoir croisé et d’avoir partagé de bons moments avec lui."

Né le 17 novembre 1951 à Saint-Louis, Sow a effectué sa formation académique à l’Institut national des Beaux-Arts du Sénégal et à l’Académie des Beaux-Arts de Vienne, en Autriche. La peinture, la sculpture, les arts graphiques, la gravure, la céramique et la lithographie sont les techniques qu’il a privilégiées dans son travail. Fin octobre dernier, il inaugurait sa dernière exposition – intitulée "Ecriture et Lumière" - à la résidence de l’ambassadeur d’Autriche, à l’occasion de la Fête nationale de ce pays. Aux journalistes venus assister à l’événement, il disait : "Quand on est un maître, on est maître de soi-même. On sait où l’on va. Je respecte tous ces aspects d’autres cultures et civilisations, mais j’ai ma propre personnalité dans mon travail."

 

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