Le gouvernement se justifie et accuse
Entre le TER qui fête ses 100 jours d’exploitation commerciale et a du mal à atteindre ses objectifs (en termes de nombre de passagers et de recettes), les ruptures de kérosène et les failles dans le système de santé, le gouvernement se justifie.
Hier, la ministre chargée des Energies et du Pétrole est largement revenue sur les ruptures tant craintes par les populations, à propos de l’approvisionnement du pays en hydrocarbures. Sophie Gladima y est allée de ses certitudes et de ses nuances. Elle déclare : ‘’C’est vrai qu’il y a eu une rupture à un moment donné. Mais ce n’était pas une rupture de produit, mais une rupture d’approvisionnement. Parce que nous avions un problème logistique, dû parfois à l’insouciance des populations…’’
La suite, ça va dans toutes les directions : entre la Sar qui est en arrêt technique prolongé pour des travaux d’extension, la compagnie privée dont les commandes ont connu un retard de livraison… Néanmoins, la ministre se veut optimiste pour la suite. ‘’Normalement, fin avril, nous devrions terminer ces travaux (de la Sar) et début mai, nous devons commencer la production normale, aussi bien du carburant que du kérosène…. Au moment où l’on parle, il n’y a pas de rupture. Et que les avions viennent comme prévu. Il y a eu peut-être deux avions qui ont changé de destination, mais cela n’est pas lié.’’
Les maires invités à donner des terrains à Petrosen TS
Parole de la ministre des Energies qui donne ses échéances. Selon elle, 4 000 t de kérosène sont disponibles ; 7 000 t sont attendues en début mai, soit la couverture d’environ 20 jours. Pour le gasoil, 30 000 t sont disponibles ; 38 000 t sont attendues d’ici fin mai. Pour le super, 15 000 t sont disponibles et 25 000 t sont attendues dont 22 000 t appartiennent à Petrosen TS.
Cette arrivée de Petrosen TS, selon la ministre, va permettre de réguler le secteur. ‘’Quand on prend le prix du carburant, généralement, le privé prend le prix plafond. L’arrivée de Petrosen dans le secteur va donc permettre de tirer les prix vers leur niveau le plus bas. Aussi, les consommateurs vont voir le prix affiché et choisir la station où ils vont faire leur approvisionnement’’, s’est félicitée la ministre, qui invite les maires à mettre à la disposition de la structure des terrains.
Louvoiement sur la dette due aux compagnies
Par ailleurs, Sophie Gladima Siby s’est montrée très nuancée par rapport à la dette due aux compagnies. Interpellée sur ce point, voici sa réponse : ‘’En fait, indique-t-elle, il y a des compensations qui se font. Et régulièrement, ces dettes sont payées. Ce que nous évitons actuellement, c’est de creuser cette dette. Mais nous étions à jour, parce que c’est une dette qui se reconstitue, entre la dette que la Sar nous donne et ce que FSE (Fonds spécial de soutien au secteur de l'énergie) doit payer, il y a un délai de 30 jours.’’ La ministre de continuer : ‘’Nous attendons toujours les documents administratifs et financiers pour pouvoir payer. Et c’est en ce moment que la dette s’accumule. En discutant avec ces compagnies, nous arrivons toujours à juguler et à payer à temps… Actuellement, si la subvention tombe, cette dette qui était de 100 milliards ne sera plus que de 46 milliards pour la période de janvier à mars…’’
Avec les tensions sur les prix, il faut s’attendre à une augmentation du déficit, projeté à 455 milliards cette année, si le baril se maintient à 100 dollars. Dans le budget, ce prix était estimé à 60 dollars, contre environ 105 en ce moment. ‘’De janvier à avril, renchérit-elle, on a injecté 100 milliards F CFA’’.
Malgré tout, l’Etat, selon Mme Siby, campe sur sa volonté de bloquer les prix. ‘’Nous faisons le point tous les jours avec le Mef qui a le portefeuille. Actuellement, le prix réel du super est de 1 055 F CFA ; il est vendu sur le marché à 775 F CFA. Le prix réel du gasoil est de 1 033 F C FA, contre 665 F CFA sur le marché. Nous avons ainsi injecté 100 milliards.’’
Les bonnes et les mauvaises notes du TER
C’est devenu un trophée de guerre que le gouvernement du président Macky Sall brandit à tout bout de champ. Après 100 jours de mise en circulation du Train express régional (TER), les hommes du président multiplient partout les sorties, brandissent leurs chiffres comme pour prendre leur revanche sur l’histoire et sur les détracteurs du TER. Le ministre du Transport terrestre déclare : ‘’Hier, j’ai suivi un reportage à la télé. Ce qui est ressorti des réactions, c’est un sentiment de satisfaction. Le TER, c’est un défi technologique qui a été relevé. Des infrastructures de dernière génération, exploitées dans le respect de la régularité. C’est un train toutes les 10 minutes, des gares desservies avec 50 secondes d’arrêt par gare. Pour rallier Dakar à Diamniadio, avec des arrêts à toutes les gares, c’est 45 minutes. En direct, c’est 22 minutes. C’est des chiffres parlants… Ceux qui critiquaient hier, sont les premiers à féliciter le président de la République.’’
Au-delà de cette satisfaction des voyageurs, le TER, c’est aussi des objectifs non encore atteints, malgré un engouement indéniable des usagers. Depuis sa mise en service, le train transporte, selon les chiffres du ministre Faye, 50 000 passagers en moyenne par jour, soit autour de 5 millions de voyageurs, si l’on tient compte des trois semaines de gratuité. Il faut rappeler que l’objectif initial était de transporter 115 000 voyageurs tous les jours. A terme, avec la deuxième phase, il est prévu 300 000 voyageurs/jour.
Cette contre-performance par rapport au nombre de passagers se répercute naturellement sur les recettes envisagées qui sont évaluées, selon le ministre, à environ 3 milliards F CFA. Actuellement, a-t-il ajouté, seuls 12 sur les 15 trains disponibles sont en service. Les trois déjà disponibles le seront bientôt, en attendant l’arrivée, dans la deuxième phase, de sept autres trains.
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AFFAIRE ASTOU SOKHNA
Diouf Sarr enfonce les sages-femmes
Alors que beaucoup de Sénégalais estiment que l’Etat ne devrait pas se limiter à sanctionner des membres du personnel, qu’il faudrait aller en profondeur et revoir les failles inhérentes au système, le ministre de la Santé et de l’Action sociale oppose principalement le rapport.
Le système de santé a ainsi bon dos. On serait tenté de le croire, à entendre le ministre de la Santé et de l’Action sociale qui invite à ne pas faire d’amalgames. ‘’Ce que je peux dire, indique Abdoulaye Diouf Sarr avec force, c’est que dans ce cas de figure (affaire Astou Sokhna), il n’y avait aucun dysfonctionnement systémique au niveau du point de prestation. C’est ça aussi la vérité et c’est dans ce sens qu’il faut inscrire les décisions que nous avons prises. Elles ne s'adressent pas aux sages-femmes du Sénégal, mais à certaines d’entre elles qui, à un instant T, n'ont pas eu le comportement qu’il fallait. Maintenant, sur le plan administratif, nous avons fait ce que nous recommandait le rapport. Il faut maintenant laisser la justice faire son travail’’.
Toutefois, demande le ministre, il faut éviter les généralisations. Il ne faut pas, selon lui, faire en sorte que ‘’l’arbre d’un comportement individuel de non-qualité cache la forêt de performance, de l'engagement du comportement qualitatif de milliers de professionnels’’.
Dans le même cadre, il est revenu sur la stratégie mise en place, il y a quatre ans, pour la prise en charge des urgences. Diouf Sarr insiste : ‘’On ne peut pas, quand on arrive dans une structure d'urgence, s’entendre dire qu’il faut aller ailleurs, parce qu’il n’y a pas de place. Une urgence, on la traite pendant que le cas est là. Je pense qu’il y a un travail à poursuivre à ce niveau’’, note le ministre.
Au-delà de l’exercice sur le point de prestation, le ministre invite à s’intéresser à ce qui se passe en amont. Dans ce cadre, l’Etat envisage de mettre un coup de balai dans la jungle de la formation.
Regard dans le rétroviseur
Cela dit, Abdoulaye Diouf Sarr est largement revenu sur le système : ses performances ainsi que ses limites. ‘’Tout système, souligne-t-il, est perfectible. Mais il est aussi important de noter les évolutions du système depuis 2012’’. Diouf Sarr de brandir ses chiffres : un budget qui passe de 110 à 230 milliards ; un recrutement de 1 500 agents entre 2020 et maintenant, compte non tenu des 905 agents dans le cadre du Projet de lutte contre la mortalité maternelle et infantile...
Le ministre est aussi revenu sur les bourses de spécialité qui sont passées de 45 à 150 en moyenne, avec une augmentation sensible des montants ; les politiques de gratuité dans les domaines de la dialyse, de la chimiothérapie, de la santé de l’enfant…
Dans le domaine de la dialyse, précise-t-il, nous sommes passés de 24 générateurs en 2012 à 325 actuellement. Il fallait être à Dakar ou à Saint-Louis. Aujourd’hui, on en a dans toutes les régions. Il ne restait plus que Kédougou et bientôt ce sera un vieux souvenir. Pour les ambulances, Diouf Sarr indique que le Sénégal, qui en comptait 172 en 2012, en a acheté plus de 500 depuis. Il ne dit toutefois pas combien sont fonctionnels en ce moment.
Autre point de satisfaction à son avis, c’est la CMU. ‘’Non seulement la prestation est facturée à 20 % de son coût, mais le médicament aussi est subventionné. En dehors des points au niveau des structures, si vous avez la CMU, vous achetez dans les officines à 50 %. Ça aussi, c’est une révolution qu’il faut souligner. Avant, il fallait être un fonctionnaire ou un salarié pour avoir droit à cette assurance. Aujourd’hui, nous sommes à un taux de 56 %, contre 20 % en 2012’’, se félicite le ministre de la Santé et de l’Action sociale.