Publié le 23 Jun 2023 - 20:20
TRANSITION ÉNERGÉTIQUE ET FINANCEMENT DES INFRASTRUCTURES

Le Sénégal décroche un financement de 2,5 milliards d’euros

 

Plaidant pour plus d’investissement dans le domaine des infrastructures et de la transition énergétique par le gaz naturel, le président de la République, Macky Sall, a annoncé, hier à Paris, un financement de plus de 2 milliards d’euros levés auprès du G7, dans le cadre du programme ‘’Just Energie for Transition’’. En contrepartie, le Sénégal, qui devient ainsi le quatrième pays à bénéficier de l’initiative, s’engage à porter ses énergies renouvelables de 30 % actuellement à 40 %.

 

Financements des infrastructures, transition énergétique : voilà deux questions qui ont été au cœur des interventions du président de la République Macky Sall au Sommet sur le nouveau pacte financier ouvert à Paris hier et qui va être clôturé aujourd’hui. Sur le financement des infrastructures, le président de la République a tenu à relever, d’emblée, la nécessité de revoir les règles du jeu en la matière, pour une meilleure prise en charge des besoins des pays en développement.

Selon lui, le modèle actuel n’est pas adapté, ‘’compte tenu du fait que les règles ne sont pas en adéquation avec les besoins des clients, des pays’’. ‘’Ces règles ne tiennent pas compte des urgences en matière de développement et même pour la prise en charge des enjeux climatiques. Il faut des solutions urgentes et immédiates. L’attente a été trop longue’’, dénonce Macky Sall.

Dans la même veine, le président Sall soulignera que le climat est certes une question fondamentale sur laquelle tous les pays doivent faire des efforts, mais qu’il ne faudrait pas que cette question supplante et soit un frein à la prise en charge des autres urgences. Il déclare : ‘’Il faut changer la gouvernance pour répondre aux besoins de nos pays. Et le besoin le plus urgent, c’est les infrastructures. Nous avons de vastes territoires où il manque presque de tout. C’est aussi cela l’urgence qu’il ne faut pas oublier. Il n’y a pas que le climat, même si nous assumons et continuerons d’assumer nos engagements sur cette question.’’

Comme pour marquer sa bonne fois, il cite l’exemple du Sénégal dans le domaine des énergies renouvelables. ‘’Nous sommes déjà à 30-31 % d’énergies renouvelables ; ce sont des efforts très importants. Nous avons donc des engagements par rapport au climat et nous les mettons en œuvre’’, a insisté le président de la République, invitant ses pairs à permettre aux pays d'utiliser le gaz comme énergie de transition.

DTS : ‘Il y a un fossé énorme entre les engagements et les décaissements’’  

Le moins que l’on puisse dire, c’est que les efforts du Sénégal dans le domaine des énergies renouvelables n’ont pas manqué de taper dans l’œil des bailleurs, qui n’ont d’ailleurs pas manqué de nouer un accord, dans le cadre du ‘’Just Energie for Transition’’. ‘’Le Sénégal, qui avait déjà pris de l’avance en portant à 30 % son ratio en énergie renouvelable, s’est engagé à aller à 40 %. Et cet engagement a eu pour corollaire l’engagement des pays partenaires à financer à hauteur de 2,5 milliards d’euros de la part du G7, ce qui est une somme très importante, si on le convertit, sur l’énergie, de l’énergie propre’’, souligne le chef de l’État.

Pour autant, il ne faudrait pas s’attendre à ce que le pays renonce à son désir d’utiliser son gaz comme énergie de transition. Macky Sall d’ajouter sans ambages : ‘’Cela n’empêche pas au Sénégal d’exploiter son gaz pour en faire une énergie de transition et cela va aider à baisser les couts de l’énergie. C’est donc important.’’

À ce jour, seuls trois pays avaient pu bénéficier de ce mécanisme de financement international. Il s’agit de l’Indonésie, du Vietnam et de l’Afrique du Sud. Le Sénégal est donc le quatrième pays. Félicitant les techniciens qui y ont travaillé depuis deux ans ainsi que les pays membres du G7.

S’il se réjouit des engagements pris dans le cadre du ‘’Just Energie for Transition’’, Macky Sall a exprimé son souhait de voir les décaissements s’accélérer pour les DTS. Il peste : ‘’Nous attendons encore les résultats. Entre les engagements et la réception des fonds par les États, il y a un fossé énorme.’’

Comme en informait ‘’EnQuête’’ dans notre précédente édition, le Congrès américain bloque toujours les choses, du côté des États-Unis.

Le DG de la SFI mise sur une approche par secteur

Dans son intervention, le DG de la Société Financière Internationale (SFI) a mis sur la table des propositions très claires pour au moins tirer les populations des pays les moins développés à faire face aux préoccupations liées à certains services sociaux de base. ‘’Je pense qu’on doit pouvoir regarder certains secteurs sains de manière spécifique et aller vers des réalisations concrètes en mobilisant les financements nécessaires. Ensuite, les investisseurs nous disent : ‘Vos projets sont trop petits, qu’on n’est pas intéressé. Pour un projet de moins d’un milliard, on ne regarde même pas.’ Je pense qu’il faudrait aller dans le sens d’agrégation des projets entre les différents pays’’, plaide-t-il, non sans ajouter également le secteur ferroviaire.

‘’D’ici la Cop 28, si on peut prendre certaines questions comme ça et les régler, je pense que ce serait déjà très important’’, renchérit le spécialiste. 

Pour sa part, le représentant de  la Banque européenne d’investissement a mis l’accent sur la nécessité de mettre en œuvre des projets de qualité. ‘’On ne peut pas gaspiller de l’argent pour des infrastructures de mauvaise qualité. Il faut des projets de qualité, qui soient bancables. Pourquoi pas même une expertise interne ou externe qui garantirait la qualité des projets que nous présentons’’, fait remarquer le représentant de la BEI, non sans revenir sur les 11,2 milliards prévus dégagés en appui à l’action climat et les cinq secteurs ciblés : énergie, transports, santé et aménagement urbain.


COUT DE LA DETTE

La grande arnaque !

Alors que le président tchadien réclame une suppression de la dette, Kristalina Georgieva parle de restructuration et donne l’exemple de la Zambie qui a été sauvée de la cessation de paiement. Pour sa part, les représentants d’Axa et de la Société financière internationale ont insisté sur les couts de la dette et de l’investissement dans les pays en développement et appellent de leurs vœux des solutions.

La question de la dette a également été au cœur des discussions du Sommet sur le nouveau pacte financier. Sur ce point, c’est le président tchadien, Mahamat Idriss Deby, qui s’est le plus illustré en demandant et en insistant sur la nécessité de ‘’supprimer’’ la dette, pour permettre aux pays de souffler. 

Alors que la table ronde était clôturée et que tous les intervenants se sont levés, lui a insisté pour l’écouter donner son dernier mot à la suite de premières interpellations sans effet. Cette fois, il interpelle directement la directrice générale du FMI en ces termes : ‘’Madame la Directrice, j’ai posé la question, mais je n’ai pas eu de réponse. Moi, je pense que comme nous avons décidé de prendre un nouveau départ, la meilleure manière de réussir ce nouveau départ, c’est de supprimer purement et simplement les dettes des pays à faible revenu. Je pense que c’est très important.’’

Tout comme le président tchadien, son homologue de la Tunisie, Kais Saied, s’est montré très pessimiste par rapport à l’initiative. À l’entendre, c’est comme si les leçons n’ont pas été tirées des erreurs du passé.

Prenant la parole, la directrice générale du FMI a surtout insisté sur la nécessité de mobiliser les énergies, d’être positif et de travailler ensemble pour relever les défis. ‘’Je pense que tous ceux qui sont là sont venus pour trouver des solutions. Il ne faut donc pas jeter trop tôt le bébé avec l’eau du bain. Travaillons tous ensemble, parce que le statu quo n’arrange personne. Il faut aller vers la restructuration de la dette.  Nous avons montré avec la Zambie que nous pouvons faire des choses’’, a souligné Mme Georgieva, qui n’a pas manqué de revenir sur les efforts qui ont été faits, notamment par rapport aux DTS.

Comment la dette asphyxie les pays en développement

Au-delà de cette question de la restructuration de la dette des pays en développement, il a surtout été question du nœud de ce problème, à savoir le cout de la dette. La plupart des intervenants se sont insurgés contre les taux énormes auxquels les États pauvres empruntent sur le marché.

Selon le représentant d’Axa à la table ronde, il faut assouplir les critères d’appréciation du risque. ‘’Je comprends qu’un investissement dans un pays émergent nécessite une prise de risque différente par rapport à un investissement dans un pays mature. Prenons par exemple la charge du capital : si j’investis un euro dans un pays de l’OCDE, je dois mettre 25 centimes de côté. Si j’investis un euro dans un pays non OCDE, je dois mettre 49 centimes de côté. À mon avis, c’est un cout énorme. Assouplir cette équation va aider à mieux inciter les institutions.’’

Embouchant la même trompette, le directeur général de la Société financière internationale, Matar Diop, est revenu sur l’impact de la perception du continent dans l’évaluation de son risque. Il explique : ‘’Je me rappelle qu’il fut un moment où l’on s’interrogeait beaucoup sur les difficultés des pays africains à accéder à certains mécanismes de financement comme les euros bonds. À ce moment, on avait décidé de faire le Credit Rating. Le Sénégal était le second pays, après l’Afrique Sud. Quand on l’a fait, le Sénégal avait le même Credit Rating que la Turquie. Cela donne une idée sur le décalage entre la perception du marché et la réalité.’’     

Pour lui, c’est la même chose que nous voyons actuellement avec la dette et l’investissement privé. Malgré les difficultés de trouver des financements, ledit mécanisme avait permis de démontrer que le Sénégal avait la même note que la Turquie. ‘’Les problèmes sont donc les mêmes. À l’époque, il y avait une situation macroéconomique qui était bonne, des déficits très bas, des taux d’inflation très bas, mais le marché ne voyait pas tout ça. Il fallait donc un instrument pour aider le marché à comprendre et apprécier mieux le risque des pays. Nous avons donc fait le Credit Rating.  C’est peut-être le même exercice qu’il faudra refaire avec les infrastructures.’’

MOR AMAR (ENVOYÉ SPÉCIAL)

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