Publié le 28 Mar 2017 - 01:07
ZOOM SUR UNE TROUPE DE SAINT-LOUIS

Plombée par les décès, ‘’Bara Yeggo’’ revient avec « Neexa dëkkël »

 

Des querelles internes n’ont pas conduit à la dispersion des membres de ‘’Bara Yeggo’’, comme ce fut le cas dans d’autres troupes traditionnelles. Des décès de certains membres les ont contraints à prendre du recul. La troupe revient prochainement avec une série.

 

‘’Bara Yeggo’’ a été mise sur pied en 1985 à Saint-Louis. La troupe théâtrale s’est fait connaître du grand public, grâce à la télévision nationale (ndlr : RTS). Au départ, c’était une troupe radiophonique sur la Voix du Nord (RTS 3). ‘’Le théâtre à la radio’’ était une initiative de Daba Aw et d’Alioune Badara Diagne Golbert. Sous forme d’émissions, la troupe se produisait à travers les ondes, tous les samedis soir, à 21h. Petit à petit, la troupe s’est fait un nom à Saint- Louis et dans la vallée du fleuve Sénégal. ‘’On a reçu la visite du directeur  Babacar Diagne, à l’époque,  qui nous a demandé de créer un scénario susceptible d’intéresser les Sénégalais’’, se rappelle le scénariste de la troupe Daouda Guissé. ‘’Je me suis empressé d’écrire la pièce théâtrale ‘’Bara Yeggo’’  qui a connu un grand succès’’, ajoute le journaliste à la retraite. Ainsi, cinq épisodes ont été jouées par les comédiens de radio Sénégal et diffusées sur le petit écran.

La  pièce théâtrale  a donné son  nom à la troupe qui signifie en wolof simple ‘’barasawdi’’. La troupe a fait son bonhomme de chemin avec des prestations sur l’ensemble du territoire à l’invitation des fans. Mais le succès a été cassé par des décès. ‘’Brusquement, la Faucheuse est arrivée et nous a pris le talentueux Mansour Seck d’abord, ensuite un autre cadre de la troupe, Abdoulaye Ngom’’, explique Daouda Guissé, gagné par l’émotion, en prononçant ses noms. Il déclare que ces décès (Mame Sèye, Rama Boye etc.) ont plombé l’ascension de la troupe. En plus, à cette époque, lui le scénariste a été affecté à la station RTS de Matam, comme directeur. ‘’Tout cela nous a fragilisés, mais nous étions bien partis et aussi les relations entre artistes étaient très amicales’’. Ce qui était une force, dit-il.

Très prochainement, Bara Yeego revient avec la série « Neexa dëkkël »

Malgré ces coups durs, le scénariste renseigne qu’ils n’ont pas baissé les bras. Ainsi, ceux qui ont aimé leurs productions et leurs prestations pourront peut-être prochainement afficher le sourire. Daouda Guissé déclare que la troupe a repris ses activités depuis quelque temps. Elle travaille sur une série intitulée « Neexa dëkkël » qui, à l’en croire, va relancer  la troupe  à l’écran. ‘’On est en pourparlers avec les télévisions de la place’’, informe-t-il. Interpellé sur le problème du sponsoring, le scénariste rappelle qu’à l’époque  il y avait moins de structures  qui mettaient de l’argent dans le théâtre, contrairement à nos jours. Pour lui, le théâtre permet de conscientiser, de sensibiliser sur des thèmes qui prennent en compte les préoccupations des populations. ‘’C’est un éveil populaire pour impulser  une dynamique nouvelle dans le quotidien des Sénégalais’’, dit-il.

SOUVENIRS AVEC ALIOUNE BADARA DIAGNE

‘’On était au sommet, mais les moyens ne suivaient pas’’

 ‘’J’ai commencé à faire du théâtre à l’école élémentaire, en 1957, à Brière de l’Isle, à l’occasion des fêtes de fin d’année, avec M. Sady, en classe de CE1. J’ai attrapé le virus depuis. Après l’école, j’ai adhéré  à la section culturelle de l’équipe de football ‘’La Saint-Louisienne. De là-bas, je suis  parti à l’ESSOR, une autre équipe de foot et finalement dans mon quartier Balacoss avec l’Union des jeunes. J’ai par la suite continué à radio Saint-Louis avec feu Khady Fall Sophie. Après, il y a eu une rupture. Avec l’arrivée  de Daba Aw, on s’est concerté pour faire revivre le théâtre  à la radio. Daouda Guissé et Marie Madeleine Diallo  ont pris les choses à bras le corps. Daouda  faisait les scénarii et  il jouait en même temps. Madeleine était trésorière et mère de la troupe. On ne jouait qu’avec les éléments de la radio,  comme feu Mame Sèye, Rama Boye etc.

Nous avons connu un grand succès. Nous nous sommes dit qu’il faut sortir. On est allé dans les villages pour faire du théâtre. Et au cours d’une visite du chef de l’Etat Abdou Diouf à Louga, j’ai abordé le directeur de la télé Babacar Diagne, en présence de feu Ali Ndaw, chef de station de ladite région. Et il m’avait promis de passer à la radio à Saint-Louis. A ma grande surprise, il est venu. ‘’Bara Yeggo’’ n’a pas été notre  première production  à la télé. La première, c’est ‘’L’Avare’’, avec  comme acteur principal  feu Mansour Faye et le réalisateur Amadou Moctar Bèye. On avait un très grand projet qu’on n’a pas pu tourner, c’est ‘’La veuve joyeuse’’, car entre-temps, on a connu des lenteurs au niveau de la télé, alors que Daouda Guissé avait mis son cliché ‘’Bara Yeggo’’. Son scénario a été découpé rapidement par Pap Sy. A partir de ce moment, ça a été un mariage d’amour et de raison entre l’équipe de Pap Sy et la troupe de ‘’Bara Yeggo’’. On était au sommet, mais les moyens ne suivaient pas. Ce que donnait la RTS était insignifiant par rapport à la valeur artistique. On s’est arrêté un bout de temps  pour réorienter et trouver des  sommes consistantes pour mieux accompagner  les jeunes qui étaient avec nous. 

 ‘’Il y a eu une traversée du désert’’

Il y’a eu une traversée du désert. J’ai eu un accident très grave sur la route de Dakar. Ensuite, il y a eu un chapelet de décès de grands artistes comme Mansour Seck, Mame Sèye, Serigne Fall, Thiam Dollar, Abdoulaye Ngom et aussi l’affectation de Daouda Guissé. Et moi, je suis parti à la retraite. La différence entre nous et les artistes d’aujourd’hui, c’est la démarche. Pour nous, le théâtre c’est l’impulsion d’une expression  éducative  qui doit aider à incruster les valeurs d’autrefois aux jeunes d’aujourd’hui, pour assurer la dignité de l’homme noir.

Présentement, c’est la recherche du gain, de la célébrité, du voyez-moi et on confond l’humour, la comédie et le théâtre éducatif. Peut-être  les époques différent, mais en les voyant  jouer, sur le plan de la réalisation avec les Tic, il y a un plus pour les acteurs et ils deviennent des stars de la télé. Ils allient les planches et l’écran. Pour être un grand  du théâtre,  il faut un acteur des planches. Cela fait longtemps que nous ne sommes pas apparus, il y a un autre coin qu’il fallait regarder  pour pouvoir s’orienter. On est acteurs pour toute la vie. Et j’encourage toutes les troupes  du Sénégal et je demande à l’Etat de mettre assez de moyens pour propulser le théâtre au Sénégal’’.

FARA SYLLA (SAINT-LOUIS)

 

Section: 
ANNIVERSAIRE COUMBA GAWLO SECK : Les 40 glorieuses de la diva 
THIAROYE 1944-2024 : Le Sénégal face à son histoire, la France face à ses responsabilités
VERNISSAGE DE L'EXPOSITION "VOIX DU SILENCE : TRACE ET RÉSONANCE" : Lever le voile sur l'avortement clandestin
PREMIÈRE ÉDITION SOTILAC : Le Sénégal hisse les voiles du tourisme de croisière
ATELIER ‘’DAKAR AU FIL DES ARTS’’ À L’IFD : Une ville contée en sonorités
EXPO "TRAITS ET LETTRES" AU CARRÉ CULTUREL : Le pouvoir de l'art dans l'éducation et la transformation sociale
AVANT-PREMIÈRE « AMOONAFI » DE BARA DIOKHANE : L'art, l'histoire et le droit au service de la mémoire
EXPOSITION "SYMBOLES DE LA VIE : AU-DELÀ DU REGARD" : Réflexions sur la condition humaine
LE SYNPICS ET CONI IA LANCENT UNE FORMATION : Vers une révolution technologique du secteur médiatique
LIBERTÉ DE PRESSE ET DROIT À L’INFORMATION : RSF appelle les députés à instaurer quatre réformes
BIENNALE OFF : L'Orchestre national raconté à Douta Seck
EXPOSITION FALIA La Femme dans toutes ses facettes
MUSIQUE À L’IMAGE : Plusieurs jeunes formés au Sénégal
CÉLÉBRATION 50 ANS DE CARRIÈRE : L’Orchestra Baobab enflamme l’Institut français de Dakar
15e ÉDITION DE LA BIENNALE DE DAKAR : Seulement deux prix remportés par le Sénégal
BIENNALE DE DAKAR : Un éveil artistique, selon Bassirou Diomaye Faye
CÉRÉMONIE D'OUVERTURE DE LA 15e ÉDITION DE LA BIENNALE DE DAKAR : Dak’Art pour un voyage culturel
EXPOSITION ‘’FAIRE LIEU’’ À DAKAR : Cinq lieux africains comme espaces de transformation
BIENNALE DE DAKAR   - EXPO ‘’DEVOIR DE MÉMOIRE’’ : Un modèle d’engagement culturel
Goncourt 2024