Un signe «d'honorabilité et de souveraineté»
A partir de juillet 2013, le Sénégal va appliquer la réciprocité sur les visas. Dès l’annonce de la nouvelle, les membres de la société civile sénégalaise ont crié leur joie et apprécié la mesure.
Ré-ci-pro-ci-té. C'est désormais l'option faite par l'Etat sur la question des visas, dans le cadre des rapports du Sénégal avec d'autres pays. Annoncée lundi à l'Assemblée nationale par le ministre des Affaires étrangères, la mesure qui entre en vigueur en juillet 2013 semble convenir aux organisations de la société civile ainsi qu'aux universitaires. C’est un signe ‘’d’honorabilité’’. Président de la Ligue sénégalaise des droits humains (LSDH), Me Assane Dioma Ndiaye estime «anormal» que les rapports entre le Nord et le Sud soient ‘’déséquilibrés’’.
Regrettant les difficultés éprouvées par les Africains à sortir de leurs pays à cause ‘’d’innombrables restrictions’’, l’avocat fustige les raisons toujours avancées pour les justifier. En particulier les besoins pressant des ressortissants de pays du Sud à aller vers ceux du Nord, plus riches. Cette explication ne tient pas la route, indique Me Ndiaye, du fait que c'est plutôt l'Afrique qui aiguise les appétits des pays développés grâce à ses énormes richesses et potentialités. Partant de là, le patron de la Lsdh estime que l’application de la réciprocité des visas par le Sénégal va ‘’susciter beaucoup de respect envers les Sénégalais, et du point de vue des droits de l’homme, c’est plus humain que les gens soient traités au même pied d’égalité’’.
Dans le même sillage, le Pr. Oumar Sankharé de l’université Cheikh Anta Diop déclare : ‘’Il n’y a aucune raison que les Sénégalais éprouvent de nombreuses difficultés à voyager alors que ce n’est pas réciproque chez les ressortissants des pays du Nord’’. Le Pr. Sankharé, deuxième Africain agrégé de grammaire française, s’est vu refuser le visa en juin dernier alors qu’il devait se rendre à Paris. Un acte qui avait soulevé la colère des étudiants de l’Ucad qui, à travers une marche de protestation devant l’Ambassade de France, avaient dénoncé ‘’l’humiliation’’ que les Français venaient d'infliger à leur professeur émérite.
‘’C’est comme si cette décision a été prise pour moi’’
La nouvelle mesure de réciprocité prise par les autorités sénégalaises est un signe ‘’d’honorabilité’’ et de ‘’souveraineté’’, dit l'agrégé de grammaire et spécialiste de Senghor. Elle montre que ‘’les Sénégalais tiennent à leur honneur’’. Se rappelant avec amertume son cas, Sankharé pousse un ouf de soulagement. ‘’J’ai été victime de cela et aujourd’hui, c’est comme si cette décision à été prise pour moi.’’
Pour sa part, le Président de l’Association des écrivains du Sénégal, Alioune Badara Bèye formule ‘’une appréciation très positive’’ de cette décision. Il est vrai que les acteurs culturels en général, les écrivains en particulier, éprouvent les pires difficultés à obtenir un visa, surtout avec le Consulat de France. En cela, l’application prochaine de la réciprocité sur ce dossier est un ‘’symbole de patriotisme’’, se réjouit ABB. D'autant plus, ajoute-t-il, que le Sénégal n’a pas grand-chose à perdre en prenant ce risque. ‘’(Des centaines ou milliers de) touristes apportent plus de maux à notre pays qu’ils n’en résolvent ! Regardez ce qui se passe sur la station balnéaire de Saly’’, fulmine l’écrivain.
Au plan économique, Me Assane Dioma Ndiaye espère que la mesure, si elle est effectivement mise en œuvre, ne peut être que bénéfique pour l'économie nationale qui pourra alors en capter les «devises». Cela est tellement vrai que les frais de visa font rentrer «énormément d'argent» de l'autre côté, chez certaines ambassades présentes à Dakar et «qui ne vivent presque que de ça». Selon Me Ndiaye, chaque Sénégalais dépense en moyenne 40 mille francs pour obtenir le visa à l’ambassade de France. Des sommes non restituées en plus, visa accordé ou pas...
AMADOU NDIAYE
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