Publié le 29 Jan 2013 - 20:07
COURS MONDIAUX DU BLÉ

 Le pain sénégalais livré aux fragilités des marchés

Entre sécheresse persistante, canicule insupportable et sans doute spéculations de bonne guerre, les disponibilités mondiales en céréales sont en très fortes baisses dans les principales zones de production à travers le monde. Une situation qui fragilise les équilibres mondiaux, notamment pour le blé dont les comptes sont considérés comme très critiques en ce début d'année 2013. Et qui pourrait se répercuter à terme sur le marché sénégalais du pain.

 

 

Quand le blé toussote, les meuniers éternuent forcément. La conséquence en est souvent immédiatement financière : ce sont les consommateurs qui risquent d'en payer la facture... farinée. Les mouvements d'humeur notés depuis quelques semaines sur le marché sénégalais des intrants liés à la fabrication du pain obéissent en grande partie à la nervosité ambiante et durable qui commence à caractériser les cours et stocks du blé au niveau mondial.

 

En effet, les principaux greniers à blé du monde (Russie, Ukraine, Etats-Unis, Argentine, Australie) sont tous fortement affectés par de mauvaises productions imputables aux intempéries et au mauvais temps. Selon des projections publiées par l'Organisation des Nations-Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et rapportées par le très sérieux Financial Times de Londres, l'offre mondiale de blé en 2012-2013 devrait tomber à 661 millions de tonnes alors que la demande est estimée pour la même période à 688 millions de tonnes. Soit un gap de 17 millions de tonnes. Mais la FAO est encore plus pessimiste car elle estime que les stocks mondiaux de blé vont être amputés de 26 millions de tonnes, «soit l'une des trois plus fortes baisses annuelles depuis 1980», indique la même source. «Aujourd'hui, la mauvaise récolte en Sibérie consécutive à un été exceptionnellement sec et chaud a fait grimper les cours internationaux à des niveaux jamais atteints depuis quatre ans, ce qui engendre un renchérissement des denrées alimentaires partout dans le monde», écrit Javier Blas, auteur de l'enquête du FT.

 

La FAO pessimiste

 

La grisaille est partout. L’Argentine et l'Australie prévoient des récoltes inférieures à 35 millions de tonnes contre 45 millions la saison précédente. A cause des fortes chaleurs notées à l'été 2012, la production de la Russie passera de 56 millions de tonnes en 2011-2012 à 38 millions de tonnes pour cette année, d'après le Conseil international des céréales (CIC). Quant à l'Union Européenne, elle n'aura accumulé que 131 millions de tonnes contre 137 millions un an plus tôt.

 

Le blé européen va d'ailleurs être très demandé même si son cours augmente et qu'un pays comme l’Égypte, premier acheteur mondial de cette céréale pour ses 85 millions d'habitants, devra payer plus cher que d'habitude pour s'en approvisionner correctement et, surtout dans le contexte actuel, éviter qu'un front de pénurie alimentaire vienne s'ajouter aux tensions politiques entre islamistes du président Mohamed Morsi au pouvoir et opposition regroupée dans un mouvement de salut national dont l'une des figures est Mohamed El Baradei, l'ancien patron de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). La hausse des cours du blé (dit tendre à partir duquel on fabrique la farine pour le pain) en Europe est nette : entre 2002 et fin 2012, le prix de la tonne est passé d'une fourchette comprise entre 100 et 120 euros à environ 280 euros.

 

Mais au-delà du blé, c'est le marché global des céréales dans le monde qui est passé à l'état de fragilité en s'enflammant. Aux Etats-Unis, la production de maïs pour la campagne 2012-2013 est estimée à 273 millions de tonnes contre 314 millions pour la campagne précédente, d'après l'USDA, le Département américain à l'Agriculture. Pour le maïs, c'est encore plus compliqué avec une production mondiale en retrait de 31 millions de tonnes pour la campagne actuelle, poursuit le ministère américain de l'Agriculture. La faute à la canicule de l'été dernier, relèvent les experts, mais aussi «à une sécheresse très grave». Pour se prémunir contre «les niveaux de stocks très bas», par exemple, «les opérateurs chinois accélèrent leur rythme d'importation de blé».

 

MOMAR DIENG

 

 

 

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