Publié le 5 Apr 2013 - 09:15
MUSIQUE-PAPE DIOUF, SUCCESSEUR DE YOUSSOU NDOUR ?

 Portrait d'une star en devenir

Alors que Youssou N'Dour se consacre à ses activités de ministre du tourisme, Pape Diouf est présenté comme son successeur sur la scène musicale sénégalaise. Portrait d'un jeune artiste en devenir.

 

Ce soir-là, des milliers de Sénégalaises se sont mises sur leur 31. Elles se sont faites belles pour aller danser le 23 mars sur les rythmes endiablés de Pape Diouf, le nouveau roi du mbalax. La scène ne se déroule pas dans les rues de Dakar mais dans celles de Paris. Le Zénith a fait le plein, des fans se sont retrouvés bredouilles à l’entrée de la salle, sans place pour aller applaudir leur nouvelle idole.

 

Sur scène, Pape Diouf, jeune trentenaire, rappelle un certain Youssou N'Dour. Le rythme bien sûr, le mbalax sur lequel les Sénégalais adorent danser. La langue aussi, le wolof. Les paroles qui alternent les chansons d’amour et les leçons de vie. Pape Diouf chante notamment le respect dû aux "anciens", la tolérance, la téranga. Des paroles qui ne peuvent qu’aller droit au cœur de ces milliers de Sénégalais bien souvent nostalgiques de leur pays d’origine. Jusque que dans la gestuelle et les sonorités, Pape Diouf rappelle énormément son illustre aîné.

Il possède un charisme qui lui permet de déplacer les foules et a poussé ses fans à le surnommer "le nouveau Youssou N'Dour".

 

Pourtant, lorsqu’on le retrouve dans son hôtel du quartier de l’Opéra, Pape Diouf est devenu un tout autre homme. Très affable, il demande des nouvelles de la famille de son interlocuteur, même s’il le voit pour la première fois. Pape s’habille à la manière d’un jeune de ces banlieues dakaroises dont il est originaire. Des baskets, un jeans. "Mon père m’a toujours dit qu’il fallait vivre simplement. Je ne juge pas les sapeurs congolais. Ils font ce qu’ils veulent mais ce n’est pas mon style. Moi, j’ai toujours opté pour la simplicité" explique Pape avec un grand sourire.

 

Un successeur au maître du mbalax

 

"Roi du mbalax ? Je ne revendique pas le titre, il y a encore bien du chemin à parcourir avant d’en arriver là", prévient-il. Même s’il reconnaît que ses concerts font le plein depuis que le tenant du titre n’est plus dans la course. En effet, ministre depuis 2012, Youssou N'Dour ne donne plus de concert. Dès lors, ses fans ont forcément cherché un successeur au maître du genre.

 

Que son style soit aussi proche que celui du "roi Youssou", cela n’a rien d’étonnant. "Cet homme a toujours été mon idole. Je l’imite depuis toujours" confesse Pape qui ne cache jamais son admiration pour son mentor.

 

Il est vrai que les deux hommes présentent de troublants points communs. "Moi aussi, je suis issu d’une famille de griots. J’ai commencé à chanter régulièrement à quatorze ans dans les baptêmes. Mon oncle me frappait pour que j’arrête. Il aurait préféré que je me consacre à mes études, mais j’ai choisi de continuer malgré tout" explique Pape qui a connu une enfance difficile à Pikine, une banlieue de Dakar. "Je ne suis jamais parti en vacances. Pendant les congés, je vendais dans les rues pour le compte de ma mère, du persil, des arachides ou de la lessive Omo. C’était dur, mais à la fin de la journée, j’arrivais à me faire 500 francs CFA (moins d’un euro), cela nous permettait de vivre" se rappelle Pape Diouf qui a quitté l’école en CM2. Il s’est aussi essayé au métier de plombier.

 

Tout comme Youssou N'Dour, il appartient à la puissante confrérie mouride. Très pieux, il est, tout comme son modèle, défenseur d’un islam modéré : "Ce sont les confréries qui nous protègent de l’intolérance" estime-t-il.

 

Autre point commun, Pape flirte avec le monde politique. Il vient d’être reçu par le président Macky Sall et loue l’activisme de la première dame. "Marième Faye est venue dans les banlieues et elle a aidé à reloger les déshérités. C’est un geste que j’ai beaucoup apprécié. J’ai grandi dans ces quartiers inondés. Je sais ce que c’est que de vivre dans ces zones qui n’ont pas été assainies. Toute ma famille habite encore en banlieue" explique Pape qui s’est installé dans le centre de Dakar, mais continue à se rendre chaque semaine à Pikine. Il se produit plusieurs fois par semaine dans les plus grandes salles dakaroises.

 

Des années de galère à la gloire

 

 

Fort du succès de "son pari parisien", Pape Diouf prépare une tournée européenne. Mais peut-il pour autant détrôner le "roi Youssou" ? "Avec Abdou Guité Seck, ancien lauréat du prix Découvertes RFI, Pape Diouf est l'un de ses successeurs les plus prometteurs. Et ce n'est pas pour rien qu'il collabore avec des structures appartenant à Youssou N'Dour qui a du flair pour détecter de jeunes talents. Mais succéder à Youssou dans le cœur des Sénégalais et avoir le même retentissement planétaire n'est pas du tout facile" estime Ndèye Khady, chroniqueuse au magazine Gouvernance.

 

Quoi qu’il en soit, Pape ne se laissera pas démonter facilement. "Mon inspiration me vient de loin. De la banlieue où j’ai grandi, des années de galère. C’est de là que tout est parti. Souvent quand j’avais fini de vendre mes arachides, je revenais à pied de Dakar. Jusqu’à Pikine, sur la route, c’est là que je composais des chansons dans ma tête. Ce sont celles que j’interprète aujourd’hui. Je suis la voix de la banlieue. La banlieue est tout le temps dénigrée. Alors que c’est là que ça se passe. Nous sommes l’avenir et le cerveau du Sénégal." Pape ajoute d’une voix enjouée : "Les gens qui viennent de là savent que je suis l’un d’eux. Ils se reconnaissent en moi. C’est pour eux que je chante".

 

RFI

 

 

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