Des débats compliqués en perspective
Jusque-là secrète et impénétrable, la Commission nationale de réforme des institutions a décidé enfin de communiquer à partir de cette semaine. Des occasions, avec les partis politiques, la société civile et la presse, de dévoiler la part d'ombre qu'elle entretient sur les orientations susceptibles d'être proposées aux différents acteurs.
La Commission nationale de réforme des institutions (Cnri) a-t-elle été sensible aux critiques formulées par une partie de l’opinion publique ? A trois mois du dépôt de ses conclusions sur la table du président de la République, la commission dirigée par Amadou Makhtar Mbow et dont la démarche était jugée assez peu inclusive, s’ouvre (enfin) au public. Elle a prévu cette semaine, en effet, une série de «rencontres d’informations» avec la presse, les partis politiques et les organisations de la société civile. Et les débats pourraient être houleux ou, à tout le moins, vifs, au regard des positions exprimées par certains secteurs de la vie politique et sociale nationale.
Nombreux sont aujourd'hui les Sénégalais qui doutent de la pertinence de cette commission dont le travail semble avoir été déjà fait. C’est par exemple le point de vue de Me Mame Adama Guèye, membre du M23, qui parle de «redondance» par rapport aux conclusions générales dégagées par les Assisses nationales alors que le chef de l'Etat s’était pourtant engagé à accepter les dites conclusions «sans réserves». C'était dans l'entre-deux tours de la présidentielle du 25 février. «Je ne vois pas ce que la Commission peut apporter de nouveau aux assises nationales», avait déclaré l’ancien patron du Forum civil dans une interview accordée à EnQuête. «Il revient au président de la République de prendre ses responsabilités et de prendre ce qu’il veut des conclusions des Assises. Il ne faut pas, par le détour d’une commission, donner l’impression que c’est celle-ci qui a proposé une feuille de route (alors que) c’est le président de la République (…) Il y a urgence de trancher la question», poursuivait l’avocat.
Et parmi les urgences, il y a la réduction du mandat du président de la République de 7 à 5 ans, ainsi que le cumul des fonctions de président de la République et de chef de parti. Mais si Macky Sall a réaffirmé à plusieurs reprises sa volonté de respecter sa promesse de revenir au quinquennat, il n'est pas acquis qu’il quitte la tête de son «jeune parti». A moins que la Cnri ne lui accorde une…dérogation à propos du cumul.
Autre question aux multiples enjeux, c’est celle du mandat du président de l’Assemblée nationale qui arrive à expiration le 31 juillet 2013. Plusieurs positions s’opposent au sein de la mouvance présidentielle. Pour des raisons très strictement politiques, plusieurs responsables de l’Apr veulent le maintien de la durée actuelle tandis d’autres partis comme Rewmi militent en faveur du retour immédiat au quinquennat pour plus de «stabilité de l’institution» que représente l’Assemblée nationale. D’ailleurs, ses députés ont annoncé le dépôt d’une proposition de loi dans ce sens. Une initiative que le Secrétaire général du gouvernement a assimilé à de la «politique politicienne». «Quand on est dans une perspective de recadrage institutionnel et judiciaire, on ne peut pas fonctionner comme si on n’avait pas de perspective en faisant du tripatouillage, du cas par cas. C’est ce qui déstructure notre société», avait répondu Seydou Guèye. «Sur la base de nouvelles orientations données par le président de la République, nous avons une possibilité de discuter de manière plus structurée». Autrement dit, cette question fait déjà partie de l'agenda de la commission Mbow chargée d'en dégager une appréciation.
EnQuete