La danse, le parent pauvre
L’Institut fondamental d’Afrique noire (Ifan), en collaboration avec la Direction des arts, a organisé hier un débat animé par deux chorégraphes, Jean Tamba et Gacirah Diagne. La problématique de la danse était le sujet des discussions. C’était au musée Theodore Monod.
Hier, s’est tenu au musée Theodor Monod, le quatrième séminaire sur les politiques culturelles au Sénégal. Une série de rencontres initiée par l’Institut fondamental d’Afrique noire (Ifan) et la Direction des arts. Les danseurs étaient à l’honneur pour cette dernière session du mois de mars. Le danseur et chorégraphe Jean Tamba devait donner les solutions proposées par l’Etat dans le cadre du Plan Sénégal émergent. Seulement, ce dernier a avoué ‘’ne pas maîtriser ce projet’’ qu’il assimile à un ‘’slogan’’. ‘’Un Plan doit être pensé et réfléchi’’, a-t-il dit. Ce qui n’est pas, à l’en croire, le cas du PSE. Aussi, a-t-il considéré : ‘’déjà que la culture n’est pas bien représentée dans le PSE, je crois que la danse doit y avoir une place minime’’. Pis encore, a-t-il avancé, ‘’même dans la politique de l’Etat, on ne sent pas la culture. La danse est le parent pauvre de la culture’’. Ce qui ne doit être. ‘’Nous nous battons pour faire bouger les choses et faire comprendre aux autorités que la danse est un métier. En Afrique, c’est banalisé. Pourtant, en dehors de l’expression, c’est un métier, une science’’, a-t-il plaidé.
Le combat ne se limite pas aux autorités. Il est également urgent de changer la perception que le public a de cette discipline et de ceux qui la pratiquent. ‘’Les gens jugent le secteur par rapport à ce qu’ils voient à la télé. Alors que ce n’est véritablement pas cela la danse. Les médias ont contribué à banaliser la danse’’, a-t-il regretté.
Les choses sont plus graves chez les danseurs hip-hop. Car ces derniers, à l’image de leurs autres collègues, ne sont pas souvent pris au sérieux par la société. D’ailleurs, on leur reproche d’importer leur art. Une remarque que ne partage pas du tout la chorégraphe et danseuse Gacirah Diagne. ‘’Ce n’est pas une perte d’identité. La danse hip-hop vient finalement de nous. Ce sont de jeunes Africains qui se sont trouvés malheureusement dans un autre contexte et qui ont gardé la mémoire du corps. Quand il y a un battle, c’est comme le ‘’géew’’ du sabar. Les gens rentrent et sortent’’, a-t-elle défendu.
La danse hip-hop est définie comme ‘’une danse qui vient de la rue créée par jeunes noirs américains dans le Bronx. Elle a été vulgarisée par Afrika Bambaataa (ndlr il est un Dj et l’un des fondateurs du mouvement Grandmaster Flash et Kool Herc) pour arrêter la violence qu’il y avait dans les quartiers. Il voulait ainsi détourner l’énergie négative qu’il y avait en une énergie positive et créative’’, selon Gacirah Diagne.
En outre, de manière générale, tous les secteurs du 5e art souffrent d’un manque de formation et d’infrastructures. Mais également, la circulation des artistes et des œuvres pose problème. ‘’Même si on crée, il n’y a pas d’opportunités, même à Dakar. Ça devient très difficile quand on va dans les régions’’, a avoué la présidente de l’association ‘’Kaay fecc’’. Le financement en général pose problème. Mais chez les b-boys, cet écueil est en train d’être résorbé. ‘’Pour le financement, il y a quelques éclaircies avec des fonds qui sont mis en place’’, aux dires de Gacirah Diagne. Elle fait ainsi référence au fonds d’aide aux cultures urbaines. Cependant, Jean Tamba n’y voit pas une lueur d’espoir pour le développement de cette danse. ‘’Il y a l’UE et les politiques qui ont commencé à financer une partie du secteur de la danse. Ils ont mis de l’argent parce qu’il faut contrôler cette jeunesse-là’’, a-t-il analysé.
BIGUE BOB