Leçons d’une sortie de route
Avant-hier, lors de ce funeste match comptant pour la deuxième journée de la CAN 2019, les Fennecs ont montré aux Lions tout ce qui leur reste à faire pour gouter enfin aux délices d’un premier sacre africain : le fighting-spirit. C’est cette force mentale, ce supplément d’âme qui ont fait la force des Algériens et qui ont fait cruellement défaut aux Lions. Le couteau entre les dents, prêts pour le combat. Mais surtout, solidaires et généreux dans l’effort, la bande à Mahrez a marché sur des Lions attentistes et comme perdus sur le terrain, sans leur métronome du milieu, Gana Guèye.
Déjà, le premier match aurait dû servir de leçon. Puisque les Tanzaniens ont passé le plus clair de leur temps à essuyer leurs crampons sur les chevilles des Sénégalais. Un traitement de faveur qui a valu aux Lions deux joueurs sur le flanc (Idrissa Gana Guèye et Ismaëla Sarr). D’ailleurs, depuis le début de cette CAN en terre égyptienne, l’engagement physique est une constante. Et les joueurs d’Aliou Cissé ne font que prendre des coups. De ce fait, face à une équipe algérienne, loin d’être plus forte que le Sénégal, mais prête pour la castagne, Sadio Mané et Cie ont pris une volée de bois vert. A croire qu’ils sont devenus masochistes.
Ce déficit dans l’engagement fait, une autre remarque s’impose. Le Sénégal a joué contre une Algérie compact, qui a su mettre ses talents au service d’un collectif en mission : battre le Sénégal contre vents et marées. En faisant preuve de toute la roublardise qui caractérise, souvent, les équipes maghrébines. « L’entraineur a fait un travail remarquable. On savait comment ils allaient jouer. On les a étouffés. L’Algérie a joué avec ses valeurs. On a joué comme des hommes. On a très bien joué, on a mouillé le maillot », a déclaré avec fierté, Sofiane Féghouli, à l’issue du match. Dans cette tirade jubilatoire, une phrase forte : ‘’On a joué comme des hommes’’. En effet, même les Algériens, réputés pour leur beau jeu, mais forts de leurs désillusions passées sur la scène africaine, ont compris qu’en Afrique, il faut mettre le bleu de chauffe, si on veut aspirer à quelque chose.
Mais, ce serait très réducteur de limiter la déroute des Lions au seul manque d’engagement. Car, le constat est implacable que les Lions n’ont ni plan B, ni plan C, encore un plan D. A partir du moment où les Algériens ont contrecarré les plans du sélectionneur- ‘’On savait comment ils allaient jouer’’- les Lions ont trainé leur peine, tout le long du match. Devant sa télévision, on pouvait sentir leur impuissance face à l’équation tactique posée par les Algériens.
De ce fait, on a assisté au triste spectacle d’une équipe désynchronisée, sans génie, ni âme. Et surtout abandonné par un coach qui a peu de suite dans les idées. Tout le monde voyait bien qu’il fallait faire quelque chose, hier. Sauf le sélectionneur. Ainsi, les années passent et les lacunes demeurent. Aliou Cissé reste figé dans ses convictions, ne prend aucun risque et ne sait pas faire preuve d’imagination. Et pourtant, le coach peut le faire. Il connait assez le jeu pour savoir que, désormais, le salut passe par l’initiative. La dernière campagne de League des Champions, qui devenue l’élite du football mondial, a montré que les équipes qui osent, jouent leur va-tout, donnent tout sur le terrain, gagnent.
Autant, à ses débuts, il pouvait avoir l’excuse de l’inexpérience, autant, aujourd’hui, après de nombreuses campagnes dont une coupe du monde, le temps est venu pour lui de faire montre de maturité, de se mettre à la hauteur de l’équipe et de conduire les Lions au sacre, car, cette sélection en a le potentiel.
Heureusement que ce non-match contre les Fennecs n’est pas rédhibitoire et que cette défaite peut être fondatrice d’un nouvel élan et du bon état d’esprit qui peuvent valoir à cette équipe de toucher le Graal.
GASTON COLY