Publié le 4 Aug 2021 - 22:26
SÉCURITÉ ROUTIÈRE

Les routes de la mort

 

Lors d’une rencontre organisée, hier, par Partners West Africa, différents experts ont indexé le facteur humain comme principale cause des accidents (90 %) dont 35 % pour défaut de maitrise, 34 % pour imprudence, 12 % pour non-respect des règles de conduite et 9 % pour excès de vitesse ou vitesse excessive.   

 

Loin de Ndioum, dans les salons bien douillets de l’hôtel King Fahd Palace à Dakar, des experts venus d’horizons divers passaient au peigne fin le mal sous toutes ses facettes. Le moins que l’on puisse dire, c’est que les accidents de la circulation n’épargnent aucun axe routier du Sénégal.

A Dakar, rien que pour le premier semestre de l’année 2021, pas moins de 1 830 accidents ont été dénombrés. Commandant de la Compagnie de circulation du commissariat central de Dakar, le lieutenant El Hadj Malick Niang précise : ‘’De janvier au mois de juillet, nous avons dénombré 15 accidents mortels, pour 655 accidents corporels et 1 166 accidents matériels. Au total, nous avons 1 836 accidents dans le secteur de la compagnie. Cela a des incidences énormes sur le plan sanitaire et économique, avec des morts, des handicaps, sans compter les dégâts matériels très importants. Il faut que tout le monde se mobilise, populations, agents des forces de défense et de sécurité, tous, pour combattre ce fléau.’’

Lors de cette rencontre organisée par l’ONG Partners West Africa, dans le cadre de l’Initiative Sahel Road Safety, le constat a été presque unanime. L’écrasante majorité des accidents de la route sont causés par le comportement humain. Ceci est valable aussi bien à Dakar que dans le reste du Sénégal. Lieutenant El Hadj Malick Niang : ‘’Il faut savoir que 90 % des accidents sont causés par le facteur humain. J’en profite pour appeler les usagers à plus de responsabilités, notamment par rapport au port du casque pour les conducteurs de moto, mais aussi à l’utilisation du téléphone pour tous les conducteurs.’’

Dans les détails, le lieutenant Leila Kamara soutient que c’est 12 % pour non-respect des règles de conduite, 9 % pour excès de vitesse ou vitesse excessive, 8 % pour défaillances mécaniques, 35 % pour défaut de maitrise, 34 % pour imprudence.

Pour ce qui est de l’usage du téléphone au volant, c’est souvent source de heurts entre agents des forces de l’ordre et automobilistes. Les uns croyant ne pas enfreindre les règles quand ils ont mis des kits oreillettes. Selon le commandant de la compagnie de circulation, c’est une méconnaissance des dispositions législatives. ‘’Le Code de la route, souligne-t-il, a été précis. Ce qui est interdit, c’est l’usage d’un téléphone au volant. Il faut que les gens sachent que ces interdictions, c’est pour leur propre sécurité. Quand vous décrochez votre téléphone, vous pouvez recevoir une bonne ou une mauvaise nouvelle. Dans tous les cas, cela peut perturber la conduite. Voilà pourquoi on vous l’interdit. Si vous ne pouvez pas ne pas prendre l’appel, il faut garer le véhicule’’.

8 accidents sur 10 causés par les deux-roues

Dans la lutte contre l’insécurité routière, les deux-roues doivent bénéficier d’une attention particulière. A ce propos, les chiffres livrés par le capitaine Abdoul Aziz Seck, Commandant de l’escadron de surveillance routière de la Légion de la gendarmerie Ouest, sont tout simplement effarants. Il affirme : ‘’La part des deux-roues dans les accidents est très importante. En ce qui concerne nos statistiques, huit morts sur 10 sont liés aux deux-roues. C’est aussi parce que les gens ne mettent pas de casque. Et à chaque choc, cela occasionne souvent des dommages irréversibles. Ce sont des traumatismes crâniens souvent irréversibles ou directement la mort. Nous le disons et nous le répétons : il faut que les conducteurs mettent des casques pour leur protection.’’

Alors qu’on n’a pas fini d’énumérer les nombreux accidents causés par les deux-roues, voilà qu’apparait jusque dans la capitale le phénomène des vélos-taxis, pourtant formellement interdits par la législation. Tolérés dans presque toutes les régions du Sénégal, les vélos-taxis font encore l’objet de rejet à Dakar. Le commandant de la compagnie de circulation se veut on ne peut plus clair. ‘’L’autorité a donné des instructions très fermes même. Cela ne peut pas passer à Dakar. C’est formellement interdit. Et nous sommes en train de prendre des dispositions pour l’éradiquer. S’il s’agit de ‘thiak thiak’ pour les livraisons, il n’y a pas de problème. Mais pour le transport de passagers, c’est hors de question. L’autorité a donné des instructions et nous menons des opérations pour que ça cesse’’.

A l’intérieur du pays, les vélos-taxis sont devenus une réalité indéniable, à telle enseigne que même l’Etat a été amené à les prendre en charge, dans le cadre du plan de résilience économique et social, au même titre que les chauffeurs de transport en commun.

Concernant cette problématique, les voies sont un peu divergentes. Pendant que certains préconisent tout bonnement une application rigoureuse de la loi qui ne permet pas la pratique, d’autres invitent à tenir compte de la réalité économique et sociale. Lieutenant Leila Kamara de la gendarmerie : ‘’On dit que ce n’est pas autorisé. Mais le constat est que c’est une réalité. Je pense que l’urgence est de les organiser, de réglementer le secteur, de les immatriculer. C’est une question hautement importante, car ces motos sont source d’insécurité et même de criminalité.’’

Il est hors de question d’admettre les vélos-taxis à Dakar

Sur ce dernier point, la cause semble bien entendue. A en croire le capitaine Seck, l’autorité a pris une mesure pour faire immatriculer les deux-roues. Il informe : ‘’C’est une question de sécurité très importante, parce que tout le monde a entendu les problèmes de vols à l’arraché avec usage de moto. Il est donc bon que ces véhicules soient immatriculés et qu’ils souscrivent à une police d’assurance aussi. Et détenir un permis de conduire.’’

Par ailleurs, il a été question de la responsabilité des forces de défense et de sécurité, avec la corruption sur les routes, le laxisme dans la répression, les problèmes d’infrastructures, d’éclairage, la vieillesse du parc automobile, entre autres. Mais aussi la drogue et l’alcool. Lieutenant Leila Kamara de la gendarmerie : ‘’L’usage de l’alcool est très fréquent sur la route. Trente à 40 % des accidents sont liés à l’usage de l’alcool et de la drogue. D’où l’intérêt des alcootests. En guise d’exemple, il y a eu un conducteur qui a fauché une personne au niveau de Ngor-Almadies. Toujours sous l’emprise de l’alcool, arrivé à hauteur du pont de Hann, il a heurté une moto avec trois personnes à bord, laquelle est tombée du pont. Si ma mémoire est bonne, il y avait deux morts. Un cas typique de l’indiscipline sur la route et de certains comportements irresponsables.’’

Mettre le citoyen au cœur pour lutter contre les accidents

Afin de lutter contre le fléau, la directrice exécutive de l’ONG Partners West Africa a appelé à une démarche plus participative et inclusive, pour une prise en charge efficace de la problématique. Directrice exécutive de PWA, le professeur Adjaratou Wakha Aidara Ndiaye déclare : ‘’Il faut savoir que les chiffres ont montré que le facteur humain impacte à 90 % dans la survenue des accidents. Le projet accompagne donc l’Etat du Sénégal, qui a beaucoup investi dans les infrastructures et le renouvellement du parc, dans le facteur humain. Les recommandations majeures issues de nos échanges, durant ces dernières années, c’est de mettre au cœur de la lutte les populations, mais avec un accompagnement et une volonté politique. Nous espérons qu’ensemble, nous pouvons relever le défi’’.

C’est dans ce cadre que des sessions de formation ont été organisées un peu partout sur le territoire, grâce au concours des forces de défense et de sécurité, s’est félicitée le Pr. Wakha Aidara Ndiaye, notamment la mise en place de deux guides de sécurité.

MOR AMAR

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