Publié le 7 Nov 2022 - 19:34
DÉMANTÈLEMENT D’UNE CELLULE DE TERRORISTES A KOLDA

Le cerveau de la cellule arrêté, puis déféré à la Dic

 

Le présumé terroriste Alpha Yaya Barry, âgé de 37 ans, est désormais mis à la disposition de la Division des investigations criminelles pour la poursuite de l’enquête. Il a été arrêté, le 29 octobre dernier, par les éléments de la police du commissaire Malick Dieng, puis déféré, ce samedi 5 novembre, à la brigade antiterroriste de Dakar, pour la poursuite de l’enquête.

 

Ce samedi 5 novembre, Alpha Yaya Barry, âgé de 37 ans, a été extirpé des locaux du commissariat central de Kolda et mis à la disposition de la Division des investigations criminelles (Dic). Depuis lors, il est entre les mains de la brigade antiterroriste qui poursuit l’enquête. L’entrepreneur originaire de la Guinée est poursuivi pour trafic d’armes et actes de terrorisme. Les enquêteurs lui reprochent également d’être à la tête d’une vaste campagne de recrutement et de formation de candidats terroristes.

Il serait également impliqué dans le meurtre d’Aminata Touré, plus connue sous le nom de Méta Touré. Une femme émigrée, âgée de 40 ans, qui vivait en France depuis plus de 10 ans et qui a été battue à mort, le samedi 3 septembre dernier vers 4 h du matin, sur l’axe Kolda - Bignarabé.

Son arrestation fait suite à une dénonciation. Un individu basé au Portugal a saisi la police de Kolda pour l’informer de la présence d’Alpha Yaya Barry dans une résidence du quartier Gadapara, dans la commune de Kolda. Il a soufflé aux policiers qu’il est mêlé à des affaires de terrorisme. Et qu’avec ses partenaires, ils sont en train de construire un centre pour former des terroristes.

Les policiers se sont rendus au lieu indiqué et y ont trouvé le nommé Alpha Yaya Barry, né le 3 novembre 1985 en Guinée. La fouille de la chambre de l’entrepreneur guinéen a abouti à la découverte des statuts d'une société dénommée African Security Academy. Ladite société, selon les enquêteurs, est composée de six associés, tous originaire de la Guinée, mais vivant en Belgique.

L’enquête a ensuite permis aux enquêteurs de découvrir qu’effectivement, un centre d’instruction de 6 ha, basé en pleine forêt de Saré Madiw, village situé dans la commune de Bignarabé, dans le département de Médina Yoro Foula, est en train d’être construit. Il se trouve à 10 km de Kolda.

Détournement d’objectifs

Mieux, les policiers ont interrogé le préfet du département de Médina Yoro Foula, Alioune Badara Mbengue, qui a dit ne pas être au courant de l'installation d'une telle société, malgré l'existence d'un arrêté d'approbation de la sous-préfecture de Ndorna, en date du 1er avril 2022.

Auditionnés le 31 du même mois, le maire de Bignarabé, Kaba Diao, son 1er adjoint Danguya Kandé et le président de la commission domaniale Boubacar Baldé ont tous déclaré qu’ils n’ont jamais vu, ni rencontré Alpha Yaya Barry, avant de préciser que ‘’c’est Hamidou Diallo (il était alors 3e adjoint au maire) qui a acquis le domaine, en 2012. C’est lui qui avait tout démarché pour le compte de la société incriminée’’.

Ils ont ajouté qu’Hamidou Diallo leur a dit être en contact avec des partenaires prêts à investir sur son domaine, pour un projet agroécologique (maraichage et pisciculture). Que ledit projet créerait des emplois pour les jeunes du terroir. Et pour cela, les investisseurs de la société African Security Academy ont posé comme condition la réaffectation des terres au nom de ladite société. Tel était l'objet de la demande de délibération, en date du 22 mars 2022, formulée par Alpha Yaya Barry au maire.

Ensuite, la commission domaniale a été instruite et une visite de terrain a été effectuée par son président et un membre de sa commission, le conseiller Balla Wandiaga. Le conseil municipal a été convoqué et la réaffectation a été actée et approuvée par l'autorité administrative.

Ils ont tous également déclaré qu’ils ignoreraient que les travaux avaient débuté dans le domaine. Ils ont ajouté avoir été surpris de ce qu'ils ont vu sur le site.

En effet, selon eux, ce dont il était question, c'était l'aménagement d'un champ agroécologique, générateur d'emplois pour les jeunes et non l'installation d'un centre de formation en matière de sécurité. Il s'agit là, selon le maire et ses collaborateurs, d'un détournement d'objectifs.

Alpha Yaya Barry dit avoir subi une formation de garde rapprochée

Un transport sur le site, en compagnie des autorités administratives, locales et du mis en cause, a permis de découvrir deux chambres, un bâtiment de quatre chambres, une cuisine, un magasin, un réfectoire et des blocs sanitaires. Les maçons trouvés sur les lieux étaient à pied d’œuvre pour l'installation des portes et des fenêtres.

Entendu par les enquêteurs, le chef des travaux a déclaré : ‘’Le sieur Alpha Yaya Barry, en m'engageant, m’avait parlé d’un projet agricole. Je me suis posé des questions, à la vue de la configuration des bâtiments. Mais, au finish, je me suis juste contenté d'exécuter la commande qui a été faite.’’

Entendu, Alpha Yaya Barry s'est présenté comme un entrepreneur originaire de Guinée, ayant la nationalité polonaise. ‘’J’ai subi une formation de garde rapprochée à l'European Security Academy (ESA), de 2013 à 2015. Au cours de cette formation, j’ai appris le maniement des armes automatiques et semi-automatiques’’, a-t-il martelé.  Il a ajouté : ‘’A la fin de ma formation, en association avec les nommés Yaya Barry, Ibrahima Barry, Ibrahima Ba et Mouhamed Diallo, nous avons décidé de reprendre le modèle ESA en Afrique de l'Ouest. Et nous avons porté notre choix sur le Sénégal, plus particulièrement Kolda.’’

A la question de savoir pourquoi avoir opté pour Kolda, le présumé terroriste a répondu : ‘’La stabilité politique du Sénégal et la position géographique de Kolda, qui est frontalière à trois pays : Gambie, Guinée-Bissau et Guinée.’’

Ce n’est pas tout. Le mis en cause a ajouté : ‘’Mes associés et moi avons réuni, pour le début des travaux, la somme de 115 000 euros, soit 75 millions F CFA. On attendait des financements de certaines institutions de l'Union européenne et des responsables d’ESA, qui nous ont donné leur accord de principe.’’

La brigade antiterroriste est désormais chargée de faire la lumière sur cette affaire.

NFALY MANSALY

 

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