Les explications, défis et perspectives

Le Sénégal a rempli, pour la première fois, certains critères de sortie de la catégorie des pays moins avancés (PMA), lors de l'examen triennal du Comité des politiques de développement en 2021.
En 2011, lors de l’adoption du Programme d’actions d’Istanbul (PAI 2011-2020), la communauté internationale s’était engagée à ce que la moitié des pays les moins avancés (PMA) soit évaluée selon des critères relatifs au capital humain, au revenu et à la vulnérabilité. Ainsi, lors de la dernière session du Comité des politiques de développement (CPD) qui s’est tenue en février 2021, le Sénégal a été évalué et a été retenu parmi les pays éligibles à la sortie des PMA.
Hier, lors de la cérémonie d'ouverture de l’atelier de validation du rapport sur le profil de vulnérabilité du Sénégal et de l’étude sur l’impact de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) sur les perspectives de transformation structurelle, le secrétaire général du ministère de l'Économie, du Plan et de la Coopération a confié que le Sénégal a rempli, pour la première fois, deux des critères de sortie des catégories des pays les moins avancés, avec un revenu national brut (RNB) de 1 370 $ US et un indice de capital humain (ICH) de 66,1, à la faveur notamment des progrès accomplis dans le cadre de la mise en œuvre du Plan Sénégal émergent (PSE).
Pr. Allé Nar Diop indique que le cadre macroéconomique du pays a été excellent au cours de la période de mise en œuvre du PSE, avec des taux de croissance historiques de plus de 6 % en moyenne par an. De plus, le ‘’World Economics’’ classe l'économie sénégalaise dans le top 3 des économies mondiales les plus performantes ayant réalisé une croissance économique moyenne régulière au cours des dix dernières années.
Cela montre, à suffisance, selon lui, que notre pays est résolument engagé sur la voie d’une transformation structurelle. "Par ailleurs, le gouvernement a érigé le capital humain au rang des piliers de la politique de développement économique et social. Ainsi, la mise en œuvre des politiques et programmes de l’équité sociale à travers l’accès aux services sociaux de base, à la couverture sanitaire des populations et la protection des groupes vulnérables a permis d’obtenir des résultats et des impacts probants sur l’amélioration des conditions de vie des populations, notamment à la base. Les programmes tels que le Programme d’urgence de développement communautaire (PUDC), le Programme de modernisation des villes (Promovilles), le Programme d'urgence de modernisation des axes et territoires frontaliers (Puma) ont permis de réduire les inégalités et disparités territoriales tout en améliorant les conditions de vie des populations", a rappelé M. Diop.
Toutefois, il a relevé certains défis, notamment la persistance des effets des crises de la Covid-19, la forte inflation, l’impact du changement climatique, l’emploi des jeunes et des femmes ainsi que la résilience du secteur agricole.
Une des clés réside, d'après lui, dans l’exploitation les ressources non renouvelables, notamment le pétrole et le gaz, qui va permettre de stimuler la création de valeur ajoutée, renforcer les liens intersectoriels et réinvestir les rentes qui en découleront dans le développement durable.
Il a aussi rappelé que le travail élaboré sur les profils de vulnérabilité découle d’un processus mené en collaboration avec la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCD) et le Comité des politiques de développement (CPD) conformément aux directives du gouvernement.
De plus, vu l’importance de la Zlecaf, le ministère de l’Économie, du Plan et de la Coopération, a-t-il rappelé, a collaboré avec la Commission économique pour l’Afrique (CEA) pour analyser son impact sur les perspectives de transformation structurelle de l’économie nationale et ainsi compléter la stratégie de sortie. "Le contexte actuel, marqué au niveau international par l’adoption du Programme d’actions de Doha en faveur des pays les moins avancés pour la décennie 2022-2031, témoigne d’une volonté renouvelée de la communauté internationale en faveur des PMA et nécessite un engagement fort de l’ensemble des partenaires au développement, notamment le secteur privé, la société civile et les services étatiques. Les résultats des travaux permettront de mieux renforcer le diagnostic et d’affiner davantage les options stratégiques dans le processus d’élaboration du Plan national de développement et de son plan d’actions prioritaires (PAP) 2024-2028. Avec la mise en œuvre de la prochaine phase du PSE, nous avons bon espoir que le Sénégal continuera de remplir les critères de sortie des PMA, et se classera parmi les pays à revenu intermédiaire dans les prochaines années. Ce scénario constituera une opportunité pour améliorer l’attractivité en investissements directs étrangers et permettra au Sénégal de jouer un rôle plus important au niveau sous-régional et africain", a-t-il confié.
En somme, fondamentalement en ligne avec les priorités du PSE, selon lui, le profil de vulnérabilité a identifié quatre domaines prioritaires qui se soutiennent mutuellement et qui sont à la base d'un chronogramme pour un reclassement dynamique. Il s'agit d'accélérer le changement structurel et en renforçant la compétitivité, investir dans le capital humain pour la création d'emplois productifs, tracer une voie graduelle et inclusive de transition à une économie à faible teneur en carbone et mobiliser des ressources financières adéquates pour le développement durable.
Toutes les propositions de politique économique, selon lui, vont guider les interventions en faveur de la consolidation des acquis du PSE et renforcer les chances d’une sortie ordonnée et sans heurts de la catégorie des PMA.
"L’indice de vulnérabilité économique et environnemental (EVI) du pays reste largement au-dessus du seuil attendu"
La coordonnatrice résidente du Système des Nations Unies au Sénégal déclare, également, que le pays a rempli pour la première fois certains critères de sortie de la catégorie des pays moins avancés (PMA), lors de l'examen triennal du Comité des politiques de développement en 2021. Aminata Maiga a expliqué qu'il avait largement atteint le seuil de reclassement concernant le revenu national brut par habitant et avait atteint de justesse le seuil de l'indice du capital humain.
"Cependant, l’indice de vulnérabilité économique et environnemental (EVI) du Sénégal reste largement au-dessus du seuil attendu. La prochaine évaluation prévue en février 2024 devrait permettre au Comité des politiques de développement d’examiner les informations pertinentes et les développements socioéconomiques et environnementaux récents afin de recommander la sortie du Sénégal de la catégorie des PMA, si les tendances positives notées en 2021 se sont consolidées. Dans ce cas, le Comité des politiques de développement communiquera sa décision à l’Ecosoc et au gouvernement sénégalais", a indiqué la coordinatrice.
L'atelier, selon elle, permettra d’examiner les rapports sur le profil de vulnérabilité du Sénégal et sur l’impact de la Zlecaf sur les perspectives de transformation structurelle. Ces deux études conduites sous le leadership du ministère de l’Économie, du Plan et de la Coopération ont bénéficié de l’appui de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) et du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), et permettront de mettre en exergue les goulots d’étranglement et les facteurs de mitigation des risques d’une sortie de la catégorie des PMA.
Le reclassement du Sénégal hors de la catégorie des PMA, d'après elle, impliquera aussi la suppression progressive des mesures de soutien international dédiées aux PMA, notamment en matière de commerce et de financement concessionnel.
C’est pourquoi une préparation adéquate au reclassement est nécessaire, afin de s’assurer que les avancées confirmées sur le plan structurel et la dynamique de transformation amorcée soient durables et inclusives.
"Par ailleurs, l’entrée du Sénégal, pour la première fois, dans le cercle des producteurs de combustibles fossiles, devrait entraîner des répercussions considérables sur sa trajectoire de développement et consolider la dynamique de la transformation structurelle de l’économie et la crédibilité du Sénégal en tant que destination d’investissement viable. C’est pourquoi les Nations Unies et d’autres partenaires techniques et financiers du Sénégal se sont engagés à accompagner le gouvernement afin que l’exploitation du pétrole et du gaz génère des répercussions positives pour les jeunes et les femmes au Sénégal et d'éviter le piège des pays à revenu intermédiaire. Par ailleurs, le gouvernement a démarré les travaux d'élaboration du Plan national de développement (PND) et son Plan d’actions prioritaires (PAP) qui couvrira la période 2024-2028. Cette actualisation du Plan national de développement offre l’opportunité d'intégrer le reclassement dans le processus de planification nationale, en anticipant sur l'évolution des conditions extérieures clés", a précisé Mme Maiga.
CHEIKH THIAM