‘’Je ne compte pas bouger, même si je suis condamné’’
Barthélemy Dias ne compte pas céder son fauteuil de maire de Dakar sans combattre. Hier, à l’occasion d’un point de presse, le premier magistrat a dénoncé une cabale du régime visant à le destituer de son poste et affaiblir, au passage, la candidature de Khalifa Sall.
Le 22 décembre, jour du jugement de la Cour suprême concernant l’affaire du meurtre de Ndiaga Diouf, sera une journée normale pour Barthélemy Dias.
Hier, à l’occasion d’un point de presse à la mairie de Dakar et devant un parterre de partisans, il a indiqué ne vouloir changer aucunement ses habitudes. ‘’J’ai décidé de ne rien changer dans mes habitudes. Je ne compte pas me rendre à la Cour suprême. J’irai à la Foire internationale de Dakar, au Cices, pour rendre hommage à nos exposants, avant de rejoindre Khalifa Sall à l’intérieur du pays pour poursuivre le processus de parrainages’’, a-t-il déclaré d’entrée.
Cette confiance affichée par le maire de Dakar vise à évacuer la polémique autour d’une possible déchéance de son poste de premier magistrat de la capitale, en cas de confirmation de sa condamnation par la Cour suprême. Pour rappel, l’édile de la ville de Dakar avait été condamné en première instance, puis en appel, à deux ans de prison, avec six mois ferme pour coups mortels à l’encontre de Ndiaga Diouf.
‘’Rassurez-vous, je ne compte pas bouger d’ici (NDLR : Mairie de Dakar), même si je suis condamné. Je suis un citoyen sénégalais qui a été victime d’une agression dans sa mairie qui est un démembrement de l’État et ce régime qui m’accuse d’assassinat n’a sorti aucune preuve pour démontrer ma culpabilité, depuis 12 ans. Paradoxalement, ce dossier est réactivé à chaque élection’’, soutient l’ancien patron de la Convergence des jeunesses socialistes qui s’empresse d’indiquer que cette audience de la Cour suprême se tient sur sa demande et il n’a que pour finalité d’examiner si la procédure judiciaire déposée en Cour appel a été conforme à la loi. ‘’Il ne s’agit nullement de revenir sur le jugement’’, informe-t-il.
Poursuivant son propos, l’ancien maire de Mermoz Sacré-Cœur dénonce, à travers cette machination, une tentative de sabotage du processus de parrainage de Khalifa Sall, en tentant de débaucher des députés de Taxawu. Les parlementaires de Taxawu (14 députés), renseigne-t-il, sont dans le viseur du pouvoir qui utilise certains procédés pour essayer de les retourner. ‘’Le but de toute cette affaire de Ndiaga Diouf est de faire perdre mon mandat de député, afin de contrecarrer notre processus de parrainage. Mais c’est peine perdue, car j’ai déjà parrainé Khalifa Sall en ma qualité de député de Dakar. Car, en me condamnant, le régime espérait toujours faire perdre un parrain à Khalifa Sall. Mais il oublie que la session parlementaire s’achève le 5 janvier 2024 et c’est à cette période que le Conseil constitutionnel contrôle la régularité des parrainages (27 décembre au 12 janvier). Donc, il ne peut y avoir de session pour procéder à mon remplacement à l’Assemblée nationale’’, soutient-il.
Imbroglio autour de l’octroi de la taxe (CEL-VA) à la mairie de Dakar
Toujours sabre au clair, Barthélemy Dias n’a pas hésité à cogner sur le gouvernement d’Amadou Ba qu’il accuse de vouloir étrangler financièrement la mairie de Dakar. ‘’L’année dernière (2022), nous avons reçu, comme Contribution économique locale sur la valeur ajoutée (CEL-VA), une taxe qui est recouvrée à plus 95 % par les agents de la mairie, la somme de 3,121 milliards F CFA. Cette année, le gouvernement veut nous allouer comme CEL-VEA, seulement 55 millions. C’est inacceptable, en tant que maire de Dakar, de voir ainsi l’État vouloir dépouiller la ville de Dakar. Nous ne mendions pas, nous voulons juste que l’État nous alloue la somme que rapporte réellement cette taxe’’, martèle-t-il, avant d’indiquer que si cette manœuvre vise à neutraliser Khalifa Sall et son parti, en vue de la présidentielle, ‘’l’argent de la mairie n’a jamais servi pour financer des campagnes. Nous voulons juste alerter l’opinion que si cette taxe n’est pas versée à la mairie, c’est beaucoup de programmes sociaux : évacuations sanitaires, bourses, voirie urbaine, éclairage public qui risquent d’être compromis. Nous avons un programme de voirie urbaine prévu sur trois ans pour une somme de 15 milliards 300 millions. Si la mairie venait à se voir amputer de cette taxe, elle risquerait de suspendre ou de couper les budgets de certains programmes sociaux’’, alerte-t-il.
Sur ce, le maire de Dakar lance un appel à Macky Sall pour l’inviter à mettre fin à cette cabale contre la ville de Dakar. ‘’Nous avons vu un candidat à la Présidentielle (NDLR : Amadou Ba) qui, il y a longtemps, avait refusé un prêt garanti de 20 milliards pour la ville de Dakar. Je n’accepterai pas que, pour des querelles politiques, on veuille déshabiller ou détruire Dakar. Notre ambition est de dérouler notre programme pour Dakar en matière de toilettes publiques, terrains synthétiques, centres médicaux scolaires, pavoisement des grandes artères, centre d'hémodialyse, salle IRM à hôpital Abass Ndao, entre autres, d’ici l’année 2024. Vous ne pouvez pas remettre en cause notre volonté de travailler pour les Dakarois à travers de viles manœuvres pour déstabiliser la mairie’’, conclut-il.
Barthélemy Dias sur les traces de Khalifa Sall Selon un juriste interrogé par nos soins et qui a voulu garder l’anonymat, il faudra attendre le verdict de la Cour suprême qui doit statuer sur la décision de la Cour d’appel de Dakar concernant cette affaire Ndiaga Diouf, pour faire une analyse complète de la situation. Mais si la cour décide de rejeter le pourvoi en cassation de Barthélemy Dias et de confirmer le verdict de six mois ferme pour coups mortels à l’encontre de Ndiaga Diouf, il y a de fortes chances qu’il puisse perdre son mandat, mais cette perte ne sera pas automatique. Il faut que le ministre de la Justice saisisse son homologue des Collectivités territoriales pour lui notifier la révocation du maire de Dakar. De fait, selon l’article 138 du Code général des collectivités territoriales, ‘’lorsque le maire démissionne, décède, est révoqué ou suspendu, son remplaçant exerce la plénitude de ses fonctions’’. Cette disposition avait entraîné la destitution de Khalifa Sall, le 31 août 2023, de son poste de maire au profit de sa première adjointe Soham El Wardini. |
MAMADOU MAKHFOUSE NGOM