Publié le 19 Dec 2023 - 23:15
PATRIARCAT, PRESSIONS SOCIALES, QUÊTE DU POUVOIR

"Aminata" explore le conflit entre tradition et modernité

´´Aminata´´ réalisé par Djibril Vuille, a été sélectionné dans la prestigieuse compétition officielle de la sixième édition du festival Dakar court. Tourné principalement le long de l'autoroute à péage de Dakar ce film plonge le spectateur au cœur d'une confrontation entre modernité et tradition, abordant la question du patriarcat et de l'égalité des sexes. Le choix du lieu est symbolique, car cette nouvelle ville, qui se veut futuriste, était autrefois désertique avant la construction de l'autoroute et des infrastructures qui l'accompagnent.

Djibril Vuille, né d'un père sénégalais et d'une mère suisse, a découvert le Sénégal pour la première fois en 2003 en compagnie de sa mère. En 2018, il est revenu dans ce pays en compagnie de son père et c'est à ce moment-là qu'il a constaté les changements. "Lorsque nous sommes sortis de l'aéroport, mes souvenirs d'enfance ne correspondaient plus du tout à la réalité de ce pays. J'ai réalisé à quel point il avait évolué, à quel point il avait changé. Cela m'a inspiré pour réaliser ce film, afin de montrer où nous en étions avant et où nous en sommes maintenant", explique Djibril Vuille. Ainsi, les personnages du film incarnent ce conflit entre tradition et modernité.

Le réalisateur nous présente ici un conflit entre Abdoul, un homme confronté à la pression de la société pour affirmer sa masculinité, et sa femme, qui a poursuivi des études et aspire à travailler. Abdoul, surnommé "Capitainé" par sa femme Boussole, occupe un poste de péage dans le but de se rapprocher de son rêve d'avoir sa propre maison. Malgré le fait que Boussole puisse gagner un salaire bien plus élevé que le sien, Abdoul n'ose pas lui confier cette responsabilité en raison des attentes culturelles liées à l'image de l'homme. Après deux mois sans être payé, la pression se fait sentir de toutes parts. "Oh ma boussole, nous sommes dans une situation difficile", confie le "Capitaine". Sa femme lui fait remarquer qu'il n'a pas osé réclamer son dû comme un homme, ce qui touche son ego.

´´J’ai toujours eu une imagination très vivante ´´

Les mauvais conseillers murmuraient à Abdoul: "Les anges nous ont quittés. Si tu veux de l'argent, il faut aller le prendre." Dans sa quête effrénée de richesse et de pouvoir, Abdoul, à la base une personne au cœur pur, finit par prendre une décision regrettable. Il se met en quête de ces "anges", mais dès qu'il met la main sur une part d'argent, il s'engage dans la mauvaise direction. Sous l'emprise de la pression, il franchit la ligne rouge et s'enfonce dans des profondeurs obscures. La tragédie marque sa fin.

Djibril Vuille nourrissait depuis toujours le désir de raconter des histoires, une ambition qui lui aurait été impossible sans la magie de l'image. Dès l'âge de 9 ans, il s'initie aux tournages. "Lors d'une fête de quartier, j'ai vendu des affaires pour pouvoir me procurer une caméra. Avec cette caméra, j'ai beaucoup filmé avec mes amis. J'ai essayé. En Suisse, j'ai rencontré des personnes passionnées par le cinéma à travers des associations. Par la suite, j'ai rencontré mon producteur grâce à la télévision suisse, qui m'a aidé dès mon plus jeune âge à développer mes compétences", confie le cinéaste sénégalo-suisse.

Djibril Vuille a toujours été animé par cette volonté de présenter des images au public, afin que celui-ci puisse également ressentir ses émotions. "Depuis mon enfance, j'ai toujours eu une imagination très vivante. Je concevais des mondes et je voulais également montrer qu'il y avait des sentiments à l'intérieur de moi que je pouvais exprimer. Et pour moi, la caméra était le meilleur moyen de donner une forme fictionnelle à des choses qui étaient peut-être un peu trop personnelles", explique-t-il.

M. Vuille prévoit de créer un court métrage en combinant des prises de vues en Suisse et au Sénégal. Il est aussi en train de travailler sur un long métrage qui sera entièrement tourné en Suisse.

BABACAR SY SEYE

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