Publié le 9 Jul 2024 - 11:27
2e ÉDITION DU SAREDO AU SÉNÉGAL

La plaidoirie des acteurs du secteur informel

 

Hier, lors de la cérémonie d’inauguration de la 2e édition du Salon régional de l’entreprenant  de droit Ohada (Saredo), la Plateforme des associations du secteur informel (Pasi) a fait une plaidoirie pour une meilleure considération des marchands ambulants et Cie. Un mémorandum a été remis à la promotrice de ce salon, Essoukou Hyacintha Anicha qui, à son tour, le remettra aux autorités sénégalaises.

 

‘’La loi 76 prend le marchand ambulant comme un délinquant, en même temps que les mendiants. Toutes ces  lois qui sont contre les marchands ambulants sont caduques. Parce que le secteur informel contribue à hauteur de 82 % du PIB. Ce n’est pas négligeable, c’est un levier de développement’’, a déclaré Cheikh Gawane Wade, porte-parole de la Plateforme des associations du secteur informel (Pasi) hier, à la cérémonie d’ouverture du Salon régional de l'entreprenant de droit Ohada (Saredo).

Ainsi, la Plateforme des associations du secteur informel (Pasi) demande une réactualisation des textes qui réglementent le secteur informel. Elle veut une nouvelle législation du secteur qui sera en adéquation avec la situation économique, sociale et politique. "Nous  Pasi sollicitons l’abrogation de la loi n°67-50 et du décret n°76-018. Également, l’État doit faciliter l’amélioration des normes et réglementations des travailleurs pour une meilleure prise en charge des travailleurs dans le déroulement du PAP3, l’intégration des travailleurs informels pour sa mise en œuvre",  a soutenu Cheikh Gawane Wade.

Le président du  Rassemblement des acteurs du secteur informel (Rasi) partageait ainsi les difficultés rencontrées par ce secteur au Sénégal, en raison de  plusieurs facteurs. L’autre facteur est la pluridisciplinarité des acteurs qui interviennent dans le secteur. Cela constitue un handicap pour un interlocuteur fiable, selon M. Wade.

En effet, il explique que l'intersectorialité des politiques publiques ne favorise pas une meilleure communication entre les travailleurs informels et les autorités administratives, ce qui entrave leur prise en charge effective et efficiente de leurs préoccupations administratives, compromettant ainsi le bon déroulement des politiques publiques. "Les  travailleurs informels peinent à trouver un référent face à leurs difficultés.  Par conséquent, il est urgent pour les autorités d’intégrer les travailleurs dans leurs processus décisionnels pour une meilleure prise en charge de leurs besoins", a indiqué Cheikh Wade.  

Ensuite, par rapport à l’espace public, la Plateforme des associations du secteur informel estime qu’il est l’élément fédérateur dans l’existence du phénomène de travailleurs informels. La politique de modernisation de la ville de Dakar a entraîné des déguerpissements des marchands et des conséquences économiques très lourdes. De ce fait, dans la mise en place des grands travaux, la Pasi sollicite l’État à prévoir des infrastructures pour des équipements décents pour les travailleurs informels.

"Beaucoup de travailleurs informels ont perdu leur travail et se retrouvent dans une précarité absolue. Malgré les initiatives de la ville de Dakar pour le recasement des marchands, il est important pour l’État de trouver un espace, en collaboration avec la Pasi, pour recaser les travailleurs informels", a indiqué le porte-parole du jour Cheikh Wade.

Le président de Rasi (membre de la Pasi)  note que plateforme est toujours dans la recherche de recasement des acteurs et qu’il serait important, lors de l’élaboration des plans d’urbanisation, d’intégrer les marchands, notamment avec le programme Dakar Horizon 2035 et surtout dans la nouvelle ville de Diamniadio.

En outre, M. Wade souligne l'urgence  de régler l’occupation anarchique par des solutions inclusives à travers la politique mise en place par l’État telle que la Stratégie nationale intégrée pour la transition de l’économie informelle.  

D’après la Pasi, cette transition se matérialise par la formation professionnelle des jeunes et des femmes. "La formation est importante pour les jeunes du secteur. Les interlocuteurs sont divers. C’est pourquoi il faut créer une direction du secteur informel pour faciliter la formalisation.  Il nous faut un fonds d’aide pour le secteur afin de participer à la formalisation. Il faut aussi des sites dédiés aux marchands, car ce qui existe ne leur convient pas.  Cette inconvenance est due à la non-implication des marchands dans le processus de recasement", a soutenu Cheikh Gawane Wade.  

Pour parer à cela, il estime qu'il faut intégrer ces derniers en amont dans le travail pour une meilleure appropriation.  ‘’Toutefois, dit-il,  la Pasi a l’intention de mettre en place des projets communs pour le secteur, car ceci va favoriser la réorientation des jeunes vers les métiers durables et communautaires, et qui ont un impact positif dans le développement du pays. La transition juste permet aux gens de migrer dans d’autres secteurs en créant des coopératives".

Économie sociale et solidaire (ESS)

Lors  de sa prise de parole,  la mairesse de Golf-Sud, Khadija Mahecor Diouf, a d’abord estimé que le  continent africain est en passe de devenir le prochain plus grand marché mondial. "Avec une population jeune et dynamique, des ressources naturelles abondantes et une résilience économique sans pareille, l'avenir appartient à l'Afrique. C'est ici que se trouvent les opportunités de croissance et de développement", a soutenu Mme Diouf.

Cependant, dit-elle, pour réaliser ce potentiel, il faut endogénéiser nos économies, c'est-à-dire développer des solutions et des innovations provenant de l'intérieur de nos frontières et adaptées à nos réalités locales.

Elle soutient que le Sénégal est particulièrement honoré d'accueillir cette deuxième édition d'un salon qui rassemble les forces vives du continent africain. Le thème de cette année, ‘’Promotion du statut de l'entreprenant de droit Ohada, levier puissant pour la valorisation des acteurs du secteur informel’’, prend toute son importance, d’après Khadija Mahecor Diouf.

L’édile souligne que le statut de l'entreprenant de droit Ohada est un cadre juridique spécialement conçu pour permettre aux entrepreneurs du secteur informel de se formaliser, d'accéder à des financements et de bénéficier de protections juridiques. C'est, dit-elle,  un outil "puissant" pour intégrer ces acteurs dans le tissu économique formel et ainsi améliorer leur contribution au développement économique de nos États. "La promotion du statut de l'entreprenant de droit Ohada ne se limite pas seulement à la formalisation. Elle vise également à offrir des opportunités de formation et de développement des compétences. Une économie forte et durable repose sur des entrepreneurs bien formés et informés. Nous devons donc investir dans des programmes de formation adaptés, des ateliers pratiques et un accompagnement constant pour permettre à nos entrepreneurs de naviguer dans le monde des affaires avec assurance et efficacité", a indiqué la mairesse de Golf-Sud.

Elle soutient que l’économie sociale et solidaire (ESS) joue un rôle crucial dans ce processus. Elle représente un modèle économique alternatif qui met l'accent sur la coopération, la solidarité et la durabilité, selon Mme Diouf.

"En intégrant les principes de l'ESS, nous pouvons créer des entreprises qui ne se contentent pas de rechercher le profit, mais qui œuvrent également pour le bien-être de la communauté et la protection de l'environnement. L'ESS est un vecteur de développement inclusif et durable, et il est essentiel de promouvoir ce modèle auprès de nos entrepreneurs et acteurs économiques", a déclaré Khadija Mahecor Diouf. Elle renseigne  que le  Salon régional de l’entreprenant de droit Ohada se veut être "une plateforme d'échanges et de partenariats, un lieu où les idées se rencontrent et où les solutions émergent".  

C'est, dit-elle, "une occasion pour nous tous de partager nos expériences, de tirer des enseignements des meilleures pratiques et de mettre en place des stratégies communes pour un avenir prospère et inclusif".

Genèse du salon

Greffier de formation, la présidente du comité d’organisation de Saredo a relaté la genèse  de ce salon. "J’encadre les jeunes. Au départ, c’était avec mes propres fonds que je leur donnais des revenus pour qu’ils puissent se débrouiller et réaliser des activités rémunératrices", a expliqué Essoukou Hyacintha Anicha. "Mais ils se sont heurtés à la municipalité. C’était en 2019. Et on a pioché. On est tombé sur le statut de l’entrepreneur du droit de l’Ohada. Je me suis dit que ça devait faciliter la chose. Parce que le cadre est approprié", a-t-elle poursuivi.

Mais Essoukou Hyacintha Anicha a dû faire face à de nombreuses difficultés. C’est ce qui l’a poussé à envisager une plateforme plus grande pour faire entendre sa voix, et être porte-parole des sans voix. La première édition du Saredo, tenue à Cotonou au Bénin, a permis la création du Haut conseil de l’entreprenant  et la mise en place de son bureau régional. Cette institution a pour but de servir d'acteur de propositions et de mise en œuvre de politiques de promotion du secteur informel. Elle sert d'interface entre les États-gouvernements et les acteurs économiques.

BABACAR SY SEYE

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