Publié le 16 Dec 2024 - 20:44

Sénégal et BP : les stigmates ‘ coûts et surcoûts ’  

 

Après le Mozambique dont les réserves de gaz recouvrables en offshore sont estimés à 5 000 milliards de m3, le méga- gisement gazier à cheval entre les frontières maritimes du Sénégal et de la Mauritanie Grand Tortue Ahmeyim, sont estimés à 1400 milliards de m3 de gaz, c’est une manne de plus de 100 milliards au cours actuel du GNL qui attend les deux pays voisins sur les 20 ans et seulement dans la phase 1 et 2. L'opérateur public  britannique BP  détient 60%,  le reste entre l’Américain Kosmos Energy puis  les compagnies nationales sénégalaises PETROSEN et mauritanienne SMH.

C’est un champ offshore d’une complexité inouïe sur le continent et qui engage BP, son partenaire américain Woodside et les deux pays le Sénégal et la Mauritanie sur presque 30 ans à 50 ans de partenariat pour le développement de champ gigantesque. Les réserves de gaz recouvrables dans le large bassin de MSGBC seraient estimées selon les experts les plus conservateurs à plus de 20 000 m3 de gaz.  

Comme tout projet d’une telle technicité et d’un gigantisme jamais réalisé sur le continent en offshore. Un champ sur un périmètre de plus de 13000 m2 avec des forages à des profondeurs de plus de 2 500metres. C’est un pari financier et technique que seul un super – major comme BP peut engager… pour moins de 4 milliards de USD dollars, environ 3 000 milliards de FCFA dans la facture proforma.  

Malheureusement, comme d’ailleurs la plupart des méga – projet, c’est d’ailleurs le cas au Mozambique, le premier gaz suscite toujours des interrogations légitimes sur les retards et de plus en plus sur les coûts et surcoûts après les audits financiers et comptables initiés séparément par les états partenaires après moult reports et bien sur la montée exponentielle des factures. Ces coûts et surcoûts sont imputables aux investissements de développement, aux dépenses d’exploitation principalement. Il faut souligner qu’entre temps l’expertise locale de l’ingénierie projet dans les hydrocarbures s’est étoffée avec l’apport de professionnels et hauts cadres du secteur issus de la diaspora.  

L’enjeu pour les États partenaires : le Sénégal et la Mauritanie c’est le cost gaz ou l’amortissement des investissements initiaux – de l’exploration à l’exploitation -  essentiels à la mise en exploitation et surtout les recettes et dividendes pour les États. Pour l'opérateur chef de fil, plus les coûts sont élevés, plus il supporte des coûts financiers qui vont grever le plan d’amortissement des coûts pétrolier dans le cadre du contrat de partage de production. Ce sera donc moins pour les États sur les 3 voire les 5 premières années et plus de revenus pour BP aux titres des charges d’exploitation dans les phases amont.

Le gap dans les coûts récupérables entre BP et les deux rapports d’audit du Sénégal et de la Mauritanie se chiffre presque à environ 2 milliards de dollars US soit plus de 1400 milliards de FCFA soit presque 3 ans de production de tout le champ pétrolier. Face à la fiabilité des audits comptables sénégalais et mauritaniens c’est la bonne foi de BP qui est sur la balance avec à la clé’ les futures phases de développement de GTA. Les bons comptes faisant les bons amis….

Face aux appétits des actionnaires de BP qui vient de rétropédaler par rapport à ses engagements sur le climat, c’est le pacte de confiance du partenariat stratégique entre l'opérateur britannique et nos deux états qui est remis en question en attendant toujours le chargement du premier méthanier. A Dakar comme à Nouakchott on ne transige plus sur les intérêts supérieurs de nos états et BP gagnerait à changer ses méthodes et son logiciel.

 

Moustapha DIAKHATE

Expert Infrastructure et Politique Energie

 

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