CHEMINS PLATONICIENS,
Tel est le titre du nouvel ouvrage de l’émérite DJIBRIL SAMB maitre de conférences, professeur des universités. DJIBRIL SAMB prix la bruyère médaille d’argent de l’académie français considéré par la communauté scientifique internationale comme l’un des meilleurs spécialistes de PLATON. Mais ces chemins-là furent tout d’abord platonisants avant que d’être platoniciens ! C’est désormais une tradition bien installée depuis Louis Althusser que de scinder la pensée des grands auteurs de l’envergure du professeur DJIBRIL SAMB en deux grands moments : celui de la gestation ou de la jeunesse de l’œuvre et le moment de l’accomplissement ou de la maturité. Précisons que l’auteur des CHEMINS PLATONICIENS prend explicitement ses distances avec une telle tradition en récusant dès les premières lignes de sa préface l’appellation « dialogues socratiques » au profit de l’appellation « premiers dialogues » qui est sienne depuis les années 1970.
Chemins Platonisants avant que d’être platoniciens disions-nous : un parcours platonisant long comme un fleuve qui le conduisit à l’étude, à l’érudition de toute la production philosophique de PLATON .si l’autre avouait qu’être humain suffisait à ce que rien d’humain ne lui fût étranger , du Professeur DJIBRIL SAMB on pourrait tout aussi bien dire la même chose: en tant que philosophe et platonisant rien de ce qui est philosophique et en l’occurrence de philosophiquement platonicien ne lui est étranger ! l’ouvrage CHEMINS PLATONICIENS est justement en quelque manière une économie générale de son parcours intégral du texte de PLATON .
Tout commencera donc par la fréquentation des « premiers dialogues » ; le professeur Samb entend par ce vocable de premiers dialogues « Un ensemble de textes écrits par Platon de 399 à 388 BC ».
Des dialogues qui ont en commun d’être « aporétiques » et « élenctiques ».
De L’APOLOGIE DE SOCRATE nous osons parier que le professeur SAMB retint principalement tout le caractère décisoire, démiurgique même d’une influence intellectuelle majeure ; une influence pouvant même décider de la vie intellectuelle tout comme de la destinée d’un homme tout court !
De l’Hippias Majeur que toute définition en appelle nécessairement à un effort pour subsumer la multiplicité du sensible sous l’unité du concept.
Du LACHES que le courage se nourrit nécessairement de savoir et s’en tempère s’il ne veut cesser d’être humain.
Du CHARMIDE que la sagesse ne se satisfaisait ni de la seule modération ni de la seule pudeur ni de s’occuper seulement de ses propres affaires.
Il en sera ainsi de toute la production dialogique et épistolaire de PLATON ; Platon au sujet duquel le professeur SAMB bat en brèche une idée largement répandue à savoir que PLATON ne serait que le fidèle porte-parole de SOCRATE, son disciple dévoué : bien au contraire le professeur SAMB enseigne que par maints endroits PLATON assume non pas le parricide parfait mais au moins son devoir d’infidélité à l’égard du maitre.
Selon le professeur SAMB il est arrivé plusieurs fois que PLATON avoue son scepticisme à l’égard de la préférence affiché par SOCRATE pour la brachylogie ; la maccrologie aurait aussi ses vertus pédagogiques selon PLATON.
Une forte et solide érudition va naitre du contact prolongé avec le texte de PLATON. Texte de Platon dont le professeur DJIBRIL SAMB avoue « avoir le religion ». Une érudition qui aurait traversé durablement les chemins de PLATON pour accoucher de cet ouvrage de synthèse justement intitulé CHEMINS PLATONICIENS. Ouvrage qui se décline et se déroule en un tapis de dix chapitres toujours écrit dans le même style : alerte, concis, tout en fine beauté, si caractéristique du professeur SAMB.
Le Chapitre I s’ouvre sur une biographie de PLATON. Un Platon nourri aux sources du devenir Héraclitéén et de la mystique du nombre des Pythagoriciens. Un Platon partagé entre la tentation du politique et la réalité de son parcours du « grand livre du monde ».
Dans la suite du remarquable ouvrage intituler LES PREMIERS DIALOGUES DE PLATON : STRUCTURE DIALECTIQUE ET LIGNE DOCTRINALE (Dakar NEAS 1997), ce présent ouvrage CHEMINS PLATONICIENS revisite les pas de naguère. Mais c’est toujours avec la même ardeur, celle de la solitude du débutant sans doute prémonitoire de la gloire futur du professeur Samb dans sa traque de la vérité de PLATON. Chemins d’hier accoucheurs telle phénarété de SOCRATE d’un génie bien sénégalais.
Le professeur DJIBRIL SAMB révolutionne ou à tout le moins renouvelle grandement la lecture, la compréhension, l’interprétation du texte platonicien.
Avec le professeur SAMB il y va prioritairement de l’exégèse interne du texte et seulement par nécessité de son exégèse externe. Une grille de lecture toujours à l’écoute des moindres frémissements du précepte unificateur. Le but étant d’assimiler la structure définitionnelle dont le précepte unificateur est gros jusqu’à la percée de l’essence ! Telle est l’ingénieuse méthode herméneutique appliquée par le professeur SAMB et qu’il résume lui-même en ces termes : « quelle que soient les démarches particulières mises en œuvre dans les premiers dialogues, elles s’articulent toujours autour de l’APU (l’appel du précepte Unificateur) et de L’EPU (L’exigence du précepte unificateur) qui définissent deux étapes bien délimitées mais dialectiquement liées puisque la réalité de l’un conditionne celle de l’autre »
De ce parcours des premiers dialogues de PLATON le professeur Samb en arrive à une double conclusion : la fidélité de PLATON à l’exigence d’universalité et à l’exigence d’identité : l’enjeu est d’établir la condition minimale de possibilité d’un philosopher. Philosopher dont la première vocation elle-même est d’être universelle ; un philosopher qui se veut réflexion sur la condition humaine.
Mais au-delà de la stricte possibilité d’un philosopher, il s’agit surtout de la possibilité même « d’un dialogue interhumain ». Mais l’exploration platonicienne du professeur Samb a ceci de rupturale et novatrice qu’elle nous rappelle sans cesse la nécessité d’un vivre humain. Un humain se définissant tout d’abord comme « un animale rationale » !
A votre tour, le tour des CHEMINS PLATONICIENS pour un humain réconcilié avec l’humain !
Sans surtout oublier que pour le Professeur SAMB le bon et le bien enseignés par PLATON seront toujours bons et biens pour le bien vivant comme pour le bon vivant.
El Hadj Songdé DIOUF
Professeur de Philosophie