La vérité sur les avenants
Non contents de ne pas terminer les travaux de construction de l’Aibd et de livrer l’infrastructure aéroportuaire à date échue (novembre 2014), les responsables de Saudi Bin Ladin Group (Sbg) se permettent d’exercer un chantage sur l’Etat. Ce que la direction générale de l’Aibd juge inacceptable et exige que Sbg s’engage à fixer une date de livraison définitive avant la signature d’un 5ème avenant. En attendant, EnQuête revient sur les différents avenants paraphés jusque-là, entre les autorités sénégalaises et l’entreprise saoudienne.
Alors ministre d’Etat dans le gouvernement socialiste dit de majorité présidentielle élargie (mars 1991), Abdoulaye Wade avais émis l’idée de la construction d’un nouvel aéroport international à Dakar. Un projet qualifié à l’époque d’éléphant blanc par Ousmane Tanor Dieng, tout puissant ministre d’Etat directeur de cabinet du président Abdou Diouf. Mais 9 ans après, le pape du Sopi accède au pouvoir suite à l’alternance du 25 mars 2000. Et comme il fallait s’y attendre, Me Wade remit au goût du jour son projet phare. Dans le montage financier initial, les sommes avancées pour la réalisation de l’infrastructure s’élevaient à 350 000 000 d’euros soit 229 milliards de F CFA. C’est ainsi que le premier avenant a été signé en 2007. Avec pour objectif de mettre en place les terrassements, voiries et des travaux liés au recasement pour 2 721 215 Euros (environ 1 783 000 000 F CFA).
Le second avenant, conclu le 07 juillet 2010, était motivé par les contraintes découlant de l’indisponibilité du financement à long terme (FLT) du projet. Par la prise en compte de prestations supplémentaires et par la présence de cavités. Le montant de cet avenant était de 70 026 334 Euros ; avec une prolongation de 14 mois dans la durée des travaux. La nouvelle date d’achèvement des travaux était fixée pour le 03 novembre 2011. Mais cette échéance ne sera pas respectée par Saudi Bin Laden Group (Sbg). Avant même cette date (novembre 2011). L’entreprise saoudienne a demandé et obtenu un troisième avenant. Lequel a été signé le 7 juin 2011 avec une prolongation du nouveau délai contractuel de 12 mois. Cet avenant a pris en compte les nouvelles réclamations de Sbg. Mais cela n’a pas amené l’entreprise saoudienne à respecter la nouvelle date de livraison.
Prenant prétexte du refus des populations de Mbadatt de quitter les lieux pour rejoindre les zones de recasement, Sgb sollicite un quatrième avenant pour finir les travaux. La date de fin de travaux est alors fixée à novembre 2014. Mais SBG n’a pas, une fois de plus, respecter la date de livraison.
Aujourd’hui donc, plus de 303 milliards de F CFA ont été investis dans la construction de l’aéroport international Blaise Diagne. Et depuis janvier 2015, les travaux sont au ralenti. Si Aibd parle de 85% de taux de réalisation, Sbg parle, elle, de 90%. ‘’Les Saoudiens ne travaillent plus, ils sont juste une trentaine de personnes à être sur les lieux’’, confie un responsable de l’Aibd. Pire, la société saoudienne doit de l’argent à certaines entreprises sous traitants.
‘’Sbg ne respecte pas le Sénégal, non seulement elle n’a pas envoyé les meilleurs ingénieurs sur le chantier, mais elle se permet de faire du chantage’’, se désole une haute autorité de l’Aibd. D’ailleurs, de l’avis de notre interlocuteur, il ne fait pas l’ombre d’un doute que le projet a été mal monté dès le début. Car, poursuit-il, le gouvernement de l’époque n’a pas pris en compte les capacités financières, techniques et de main d’œuvre de Sbg. Une entreprise qui n’a pas jusqu’ici investi un seul franc dans la construction de l’aéroport international Blaise Diagne. Et qui se permet d’exercer un chantage sur l’Etat car convaincu que la réalisation de cette infrastructure aéroportuaire constitue un enjeu prioritaire pour l’actuel régime dont le projet d’émergence doit prendre son envol depuis la nouvelle agglomération de Diamniadio.
Risque de blocage des projets connexes
Mais en réalité, le problème fondamental tourne autour des réclamations formulées par SBG. En effet, la direction générale de l’aéroport internationale Blaise Diagne demande à Saudi Bin Ladin Group la signature d’un cinquième avenant afin de l’engager de manière précise et définitive sur une date de livraison de l’aéroport, dont la construction dure depuis près d’une dizaine d’années. Mais, non seulement les autorités de Sbg refusent de donner une suite favorable à cette requête, mais pire, elles veulent imposer à l’Etat du Sénégal leur loi. En effet, elles conditionnent leur engagement dans cet avenant à la satisfaction d’une réclamation de près de 100 milliards de F Cfa, ce qui est contesté par AIBD et l’État du Sénégal. Ces derniers ont été confortés dans leur position par Studi International, le cabinet chargé du contrôle des travaux de l’Aibd, qui aurait alerté en son temps sur le caractère nébuleux des réclamations de Sbg.
Selon nos sources, cette situation imposée par Sbg cause un énorme préjudice à l’Etat du Sénégal. En fait, la construction de l’aéroport connaît un ralentissement qui, à date, fait perdre plusieurs centaines de milliards à l’Etat du Sénégal et risque de bloquer tous les projets connexes.
En d’autres termes, au-delà de l’Aibd, Saudi Bin Laden Group tient en otage les projections de développement du pays, compte tenu des grands projets inhérents à la livraison et à l’exploitation de cet ouvrage. Dès lors, la question que l’on se pose est de savoir jusqu'à quand va durer ce bras de fer. Pour le moment, une chose semble sûre : aussi bien la direction générale de l’Aibd que le ministre de l’Economie, des Finances et du Plan refusent de signer le 5ème avenant sans un engagement ferme de Sbg quant à la date de livraison de l’ouvrage aéroportuaire.
MAME TALLA DIAW