Publié le 14 Dec 2012 - 22:05
CONCOURS D’ENTRÉE À L’ENA

Dysfonctionnement ou magouille caractérisée ?

 

 

Au Sénégal il continue de se passer des choses bizarres et extraordinaires. Deux candidats au concours d’entrée à l’Ecole nationale d’administration du Sénégal (ENA), Tabouret Agne et Abdou Khafoor Diop, viennent d’affirmer au cours d’une conférence de presse, qu’après leur admission au concours d’entrée officiellement déclarée et publiée par le directeur de l’établissement, ce dernier est revenu sur cette décision sans aucune espèce de justifications. A leurs places, d’autre candidats ont été retenus. Plus grave, l’autorité supérieure saisie depuis le mois de juin dernier, n’a pas réagi jusqu’à présent, dans le sens d’élucider cette affaire.

 

Il faut dire que certains responsables de l’Administration, l’impunité aidant, sont coutumiers de tels faits qui ont été constatés à l’ENA et au CFPA (Centre de Formation et de Perfectionnement Administratifs). M. Guèye, un collègue à nous, a été victime d’une injustice similaire à un concours. Déclaré admis au concours d’entrée à l’ENA et retenu sur une liste d’attente, il a constaté à sa grande surprise, une candidate qui venait après lui sur la liste d’attente retenue à sa place. Et malgré ses protestations, il n’a jamais eu gain de cause.

 

Mais c’est le contraire qui s’est passé, s’agissant du cas suivant, similaire à celui de Tabouret/Khafoor, que nous avons vécu, en tant que candidat au Concours d’entrée au CFPA (Centre de formation et de perfectionnement administratif), vers les années 70’. Et l’auteur de cet abus de pouvoir n’était personne d’autre que Philippe David, ‘’Magistrat colonial, puis Haut fonctionnaire’’, personnage opaque pour reprendre l’expression de feu Président Mamadou Dia, paix à son âme, en visite récemment à Dakar (cf. Enquête du 3 décembre 2012). L’affaire est entrée dans l’histoire des recours pour excès de pouvoir, sous l’appellation ‘’Affaire Issaga Keita’’ (...) Avant le concours, David a initié un arrêté primatoral fixant le nombre de places à 40. Avant la fin du concours et la proclamation des résultats, il substitua au premier arrêté un autre ramenant le nombre de places à 30.

 

 

Et en définitive, les 30 candidats qui avaient concouru et déclarés admis par le jury n’ont pas été admis dans notre promotion, la 5ème. Issaga Keïta, classé 31ème sur la liste des 40 candidats déclarés admis, ne s’est pas laissé faire. Il prit son courage à deux mains et intenta un procès contre l’Etat, pour excès de pouvoir, devant la Cour Suprême. Naturellement la Cour Suprême invalida le second arrêté avec comme conséquence l’admission d’Issaga Keïta et des 9 autres candidats. Cela, 2 ou 3 ans après, en compagnie de la 7ème ou la 8ème promotion. Puis la reconstitution de leur carrière, au moment de leur nomination par le Ministre de la Fonction publique dans leur corps respectifs. En d’autres termes, le même grade que les éléments de la 5ème promotion. Notons qu’à l’époque le Premier ministre était Abdou Diouf que l’on affublait de qualificatifs d’administrateur, ‘’rigoureux et pointilleux’’  quant l’application des textes.  Confrontés à la réalité, tout ceci n’a été que bidon.

 

Alors, si ce que dit nos deux candidats s’avère exact, ils n’ont qu’à poursuivre le combat et y aller jusqu’au bout, à l’instar de feu Issaga Keïta. En quoi faisant ? En attaquant l’acte administratif incriminé devant la Cour suprême. Et si d’aventure ils obtenaient gain de cause, ils devront assigner le directeur de l’ENA devant le tribunal correctionnel pour ‘’faux et usage de faux’’. Il convient de préciser que tant que l’on se complaît à dire que ‘’tout est pourri, ce n’est pas la peine’’, on s’installe dans la facilité voire dans la complicité avec la corruption. Il y a lieu de signaler que pour une affaire moins grave, l’Amicale des administrateurs civils a fait invalider par la Cour suprême un décret de Senghor qui nommait son neveu, non titulaire du diplôme de l’ENA, dans le corps des administrateurs civils.

 

Donc, tous les hommes et femmes, toutes les organisations démocratiques (syndicats, partis politiques, associations, etc.), épris d’équité et de justice, devraient dénoncer cette bêtise et permettre à ces honnêtes citoyens de faire l’économie d’une démarche judiciaire. C’est bien de parler de ’’l’indice de perception de la corruption (IPC)’’. Mais également, il est bon de se mobiliser pour traquer ceux qui en sont à la base. Car la moralité dans tout çà, c’est que nous sommes en face d’une méthode de fabrique de futurs ‘’hauts fonctionnaires ripoux ‘’. En effet, si d’aventure ces  pistonnés, arrivaient un jour aux centres de décisions de l’Administration, ils seraient capables de faire n’importe quoi. Et n’importe qui pourrait leur faire faire n’importe quoi. Parce que poreux au chantage et formatés pour corrompre et être corrompus. N’a-t-on pas vu un haut fonctionnaire, ‘’sortie de l’ENA’’, qui coordonne actuellement un grand corps de contrôle de l’Etat, à qui Wade faisait faire toutes sortes de bévues, se ‘’vanter’’ d’avoir fait du ‘’travail noir’’, rien que pour ‘’réussir’’, solliciter l’aide d’un Khalife général (sans obtenir satisfaction), pour faire rapporter son affectation à Saint-Louis ?

 

 

Dakar, le 12 décembre 2012

Ababacar Fall-Barros

Ancien contrôleur de gestion à la Direction du Budget

Ministère des Finances

 

 

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