Les multiples significations des objets en Afrique
La Galerie nationale et la Section sénégalaise de l'Association internationale des critiques d'art (Aica-Sénégal) ont organisé, hier, une conférence sur le thème : ’’Low art et hight art dans la création : Élément d’une culture
visuelle au Sénégal’’.
La place de l’imagerie dans la société sénégalaise a été au cœur d’un débat, hier, à la Galerie nationale d’art. Autour du thème ‘’Low art et hight art dans la création : Élément d’une culture visuelle au Sénégal’’, des amoureux des arts visuels ont partagé leurs pensées. Selon le critique d’art Aliou Ndiaye qui s’interroge sur les études interculturelles, les cultures visuelles et l’esthétique de l’art, quand on parle de l’imagerie sociale et populaire, sont une façon de dire que tout ce que la société produit peut être utile à l’art, à la fonction décorative ou artistique. C’était là une manière, pour lui, de revenir sur les différents aspects qui gravitent autour de la culture visuelle, afin de déterminer ‘’comment cette production de l’imagerie au niveau local, mais aussi au niveau des arts contemporains affecte nos façons de construire des images et de les utiliser dans nos sociétés’’.
Voilà les questions qui ont réuni les acteurs. Ils se sont également employés à voir la manière d’interroger l’imagerie sociale, mais aussi celle artistique contemporaine et les confronter à certaines questions qui sont liées à la communication visuelle, à l’esthétique, à l’histoire de l’art et des religions.
D’après Aliou Ndiaye, il y a tellement d’éléments que l’on retrouve dans un environnement immédiat, mais on n’y prête pas attention, alors qu’ils ne sont pas là uniquement pour une fonction décorative. Le spécialiste note, en outre, qu’il y a énormément de croyances autour de ces objets. Autant d’éléments qui ne sont pas là uniquement pour embellir. ‘’Vous pouvez entrer dans n’importe quel véhicule de transport en commun, vous trouverez des choses qui, dans la vie simple, servent à autre chose. La petite sandale d’un bébé que l’on voit à l’intérieur d’un taxi n’est pas là gratuitement, c’est un objet, une image qui a une certaine connotation liée à l’imaginaire. Il y a aussi un végétal qu’on appelle la courge ; il y a des coupures de courge que l’on retrouve dans des voitures parfois. La queue de vache qui pend derrière un taxi, aussi, a une fonction par rapport à ce désir de protection’’, a-t-il expliqué.
Par ailleurs, note Aliou Ndiaye, il y a une imagerie religieuse qui est présente dans les voitures, dans les maisons et même dans beaucoup d’endroits différents. Et, de l’utilisation d’une image, il y a un conflit ouvert. ‘’La photo n’est pas accrochée pour créer du beau, mais pour travailler sur le rapport de la croyance sur cette communauté qui vit dans cette maison. J’ai observé, à plusieurs reprises, que quand ces images sont utilisées dans d’autres contextes pour servir à quelque chose d’autre, cela peut créer des conflits. C’est le cas de la statue avec Abdoulaye Wade (Ndlr : polémique autour du monument de la Renaissance africaine), la Karmen de Joe Gaï (Ndlr : dans le film ‘’Karmen Geï’’ ; Joe Gaï Ramaka avait utilisé, dans une scène, un ‘’khassaïde’’, ce qui n’avait pas plus à des gens se réclamant du mouridisme), entre autres’’.
En définitive, informe l’expert, ce sont les utilisations qui créent les conflits, mais pas l’image constituée d’objets qui sont des patrimoines partagés par une communauté qui leur est propre.
Par ailleurs, il estime que ces objets peuvent avoir une autre connotation, dans un autre lieu. ‘’Quand on est dans une galerie, on crée du beau. Mais ailleurs, cela traduit le contraire’’.
HABIBATOU WAGNE