Des transporteurs parlent d’arnaque...

Pour nombre de transporteurs, le contrôle technique des véhicules et sur la charge à l’essieu est une manière pour l’État de se faire de l’argent sur leur dos.
Coups de klaxon réprobateurs hier, au lancement du Guide du conducteur par le ministère des Infrastructures et des Transports, en collaboration avec l’ONG Borderless. L'événement a été transformé en tribune de complaintes par les transporteurs. Venus en masse, ceux-ci en ont profité pour dire tout le mal qu'ils pensent des contrôles de la charge à l’essieu et technique des véhicules. Selon eux, c'est une manière pour l’État du Sénégal de se sucrer sur leur dos.
''Le centre de contrôle technique et le contrôle de la charge à l’essieu ne sont que des instruments pour se faire de l’argent. Le matériel pour effectuer les opérations ne sont même pas encore prêt'', s’est insurgé Modou Mboup, transporteur. Comme si la corporation s'est passé la consigne, personne n'a voulu rater l’occasion pour énumérer les difficultés rencontrées durant les opérations de contrôle. ''Le matériel que vous avez amené pour la pesage à l’essieu n’est même pas bon. Comment peut-on peser un camion citerne de 30 000 litres à Dakar, qui paie 20 000 F Cfa, et qui arrivé à Tambacounda, doit débourser 120 000 FCfa ? C’est inadmissible’’, a tempêté Ndongo Fall.
Toutefois, les conducteurs demandent des concertations au préalable avant l’application des mesures de sanctions. Il se trouve que ces concertations ont été bien menées, à en croire le directeur des Transports terrestres, Dramé Seck. ''Nous les avons conviés depuis plus de deux mois à faire des essais, des contrôles, de la sensibilisation. Aujourd’hui, il s’avère nécessaire de prendre l’ensemble des observations des opérateurs de transports qui sont sur le corridor afin d’apporter les rectificatifs nécessaires'', a-t-il cependant indiqué. M. Seck a même émis l’idée de rencontrer à nouveau les transporteurs. ''Nous sommes dans la concertation. Le contrôle de la charge à l’essieu existe dans le dispositif juridique sénégalais. Depuis 2004, le Code de la route avait prévu le coût du contrôle de la charge à l’essieu à 9500 F Cfa. Nous sommes en train de l’appliquer mais il y a certains réglages à faire'', a ajouté le directeur des transports terrestres.
''Obligations''
Par ailleurs, le ministère des Transports et l’ONG Borderless ont lancé le Guide du conducteur routier qui, selon Dramé Seck, est l’un des meilleurs en terme d’information dans la sous-région. ''Toute personne, qui a l’intérêt de travailler avec le Sénégal sur l’ensemble des corridors, doit être au courant de ce guide'', a-t-il déclaré. Le guide, qui sera mis à la disposition des transporteurs, comporte tous les éléments dont ceux-ci ont besoin en matière de code de la route, d’action de la police et de la gendarmerie, pour assurer la sécurité routière. ''Aujourd’hui, nous avons fait un pas. Nous ne pouvons pas parler de compétitivité de nos économies sans qu’il y ait une libre circulation des personnes et des biens. Qui parle de libre circulation des personnes et des biens, dit que tout conducteur doit connaître ses obligations'', a avisé Dramé Seck. Le guide est aussi bien disponible en Français que dans les langues nationales comme le Wolof, le Diola, le Sérère et le Manlinké.
CONTRÔLE ROUTIER : ''Le Sénégal peut mieux faire''
Le ministère des Infrastructures et des Transports a, dans le même temps, procédé à la publication de l’enquête sur le nombre de contrôles sur les corridors Dakar-Bamako, Abidjan-Bamako, Abidjan-Ouagadougou, Lomé-Ouagadougou, le temps de contrôles et les pots-de-vin, réalisée entre le 1er et 30 juillet 2012 par l’Observatoire des pratiques anormales (OPA). Au Sénégal, les résultats de l’enquête notent une nette amélioration par rapport à l’année précédente.
En 2011, le rapport pointait 2,9 contrôles, 4 232 F Cfa de taxes illicites et 31 minutes de retard. Pour 2012, le nombre de contrôles est passé à 1,6 ; 2 011 F Cfa de taxes illicites et 28 minutes de retard. ''Les résultats en 2012 sont satisfaisants, mais le Sénégal peut encore mieux faire. En deux ans, les perceptions ont diminué de plus de la moitié. Il faut juste réduire le nombre de postes de contrôle pour diminuer le temps perdu'', a soutenu Chimère Ndiaye de la Chambre de commerce, d'industrie et d'agriculture (CCIAD) de Dakar.
Du côté de certains transporteurs, c'est un autre son de cloche. Le responsable de transporteurs, Gora Khouma, a noté des efforts de la part de la police et de la gendarmerie, mais a estimé que les contrôles doivent se faire dans les règles de l’art. ''Il faut qu’on laisse l’argent et qu'on fasse de vrais contrôles. Il faut contrôler les véhicules, savoir ce qui se trouve réellement à l’intérieur. Nous n’avons aucun problème avec les postes de contrôle, mais ce sont les postes de sécurité qui nous fatiguent'', a-t-il dénoncé. D'autres routiers sont allés même jusqu’à indexer des policiers et gendarmes qui procéderaient à plus de contrôles qu'il n'est indiqué. ''Chaque jour, la police et la gendarmerie continuent de faire des tracasseries. Qu'il y ait infraction ou pas, les pots-de-vin sont devenus monnaie courante. En partant à Bamako, il faut au minimum consacrer 100 000 F Cfa à distribuer dans les différents postes'', a accusé Malick Diop.
ALIOU NGAMBY NDIAYE
AVERTISSEMENT!
Il est strictement interdit aux sites d'information établis ou non au Sénégal de copier-coller les articles d' EnQuête+ sans autorisation express. Les contrevenants à cette interdiction feront l'objet de poursuites judiciaires immédiates.