Publié le 8 Jun 2020 - 18:53
EXPIRATION DE SA PERMISSION DE DEUX MOIS

Hissène Habré est de retour en prison 

 
 
L’ancien président tchadien a regagné sa cellule à la prison du Cap manuel, en suscitant toujours autant de sentiments controversés.  
 
 
Après deux mois passés en résidence surveillée auprès des siens, l’ancien président tchadien, Hissène Habré, est retourné en prison hier. Le ‘’Vivre avec le virus’’, prôné ces derniers jours, par les autorités avec l’assouplissement des restrictions, aurait-t-il eu raison de sa ‘’liberté’’ ? Pour les victimes de Habré, un retour progressif à la normale de la marche des prisons s’accompagne de la réincarcération de l’ex-dirigeant tchadien. 
 
Dans un communiqué publié hier, Abdourahmane Guèye, survivant sénégalais des geôles de la période au pouvoir de Habré, se rassure : ‘’Il est naturel qu’il continue de purger sa peine en prison où il est bien protégé du virus dans sa cellule individuelle. Nous saluons une fois encore l’engagement du gouvernement du Sénégal en faveur de la justice.’’ 
 
Les 60 jours accordés par les autorités pénitentiaires de la prison du Cap manuel, en raison de la pandémie de coronavirus ayant expirés, la démarche de renouvellement de cette permission initiée par les avocats de Hissène Habré auprès du juge d’application des peines a été rejetée. Une décision incompréhensible, pour Mme Fatimé Raymonde Habré, épouse de l’ex-dirigeant tchadien, condamné le 30 mai 2016 à la prison à perpétuité pour crime contre l’humanité, crime de guerre et torture, notamment pour des faits de violence sexuelle et viol. 
 
Dans un communiqué, elle exprime toute sa préoccupation : ‘’Aujourd’hui, au Sénégal, nous sommes au pic de la pandémie, avec plus de 4 000 cas et ce, officiellement. Autrement dit, les risques sont plus graves encore pour la santé du président Habré qu’au début de la permission. Avec étonnement, le juge d’application des peines a refusé le renouvellement au motif qu’il fallait réintégrer la prison et attendre un mois avant de formuler une autre demande.’’
 
Madame Habré dénonce un acharnement contre son mari et une décision hautement politique concernant son retour en prison. Et pour preuve, souligne-t-elle, les arguments des autorités ne reflètent pas le droit sénégalais : ‘’Cette décision confrontée aux textes nous a montré que la réintégration obligatoire n’existe nulle part. Mieux, l’article 75 du décret organisant le régime des permissions stipule qu’il est possible qu’une permission programme plusieurs sorties, autrement dit, on voit bien que l’obligation de réintégrer la prison a été posée par le juge, parce qu’elle répond à la commande politique d’un retour en prison.’’ 
 
Un jour plus tôt, elle expliquait sur emedia.sn que le juge d’application des peines avait posé deux conditions : que le président Hissène Habré réintègre la prison avant de demander un renouvellement de permission ; et qu’il pourrait le faire qu’après un mois en prison. Autrement dit, il faudrait attendre le 6 juillet pour refaire une demande. 
 
Du côté du collectif des victimes de l’ancien président tchadien, même s’il est normal de se faire du souci pour la santé de Habré, le passé ressurgit très vite pour certains. Comme Abdourahmane Guèye, qui témoigne sur un homme qui ‘’n’en avait rien à faire quand c’est nous qui pourrissions dans ses prisons. Affamés, torturés, humiliés. Il se fichait que ses détenus mourraient dans ses cellules’’. Mais aujourd’hui, c’est un homme de 78 ans, malade, qui est entre les mains de la justice et dont les proches se désolent que l’Etat sénégalais ‘’ferme les yeux sur son état de santé’ et qu’il ‘’piétine toutes les conventions internationales régissant le droit à la santé’’.
 
 
TROIS QUESTIONS A FATIMÉ RAYMONDE HABRE, EPOUSE DE L’EX-PRESIDENT TCHADIEN 
 
‘’Hissène Habré est un sans-papiers au Sénégal’’ 
 
De retour de la prison du Cap manuel que son mari a retrouvée hier, après l’expiration de sa permission en raison du coronavirus, Mme Habré déplore un mutisme des autorités sur l’état de santé de son époux qui serait incompatible avec son incarcération. 
 
Dans quelles conditions avez-vous laissé votre mari ?
 
C’est la prison. Les gens ne veulent pas voir qu’il est malade. Je ne comprends pas cet acharnement contre sa personne. Le président n’a rien fait au Sénégal. Je ne peux pas être rassurée. Il est dans des conditions de stress qu’il est difficile de supporter. Après 7 années passées en prison, pourquoi refuser le débat sur sa santé ? Peu importe le médecin qui l’examinera, aucun ne dira qu’il est apte à purger une peine de prison. Est-ce que les deux mois qu’il a passés à la maison ont empêché le pays de marcher ? Il est traité comme une personne tellement dangereuse qu’il faut que l’on mobilise toutes les forces pour l’arrêter. Un jour, nous voulions aller à La Mecque. Son passeport a été bloqué depuis. Il est sans papiers. On l’a laissé trainer un bras cassé pendant trois mois. Comment c’est possible dans un pays comme le Sénégal ? Depuis 20 ans, c’est un harcèlement juridico-médiatique constant que nous subissons. 
 
Mais selon les autorités, c’est un prisonnier international. Pas celui du Sénégal…
 
C’est n’importe quoi. Ce sont des échappatoires. Si c’est un prisonnier international, qu’on nous donne les adresses où plaider notre cause. Le Sénégal a bien dit que les juges qui l’ont condamné étaient simplement en détachement auprès de la Chambre africaine. Ils étaient toujours sous la hiérarchie du ministère sénégalais de la Justice. L’exécution de la peine s’est faite ici. Donc, le pays a toujours gardé la main sur cette affaire. On a affaire à la Direction de l’administration pénitentiaire sénégalaise. C’est le ministre sénégalais de la Justice qui parle. Il a dit, sur emedia.sn, que le dossier est en instruction devant le juge d’application des peines. C’est faux ! La décision nous avait été notifiée depuis le vendredi (5 juin 2020). Il s’est exprimé un jour après pour dire cela. Il veut cacher le lien qu’il entretient avec le juge d’application qui est sous sa hiérarchie.  
 
Comment avez-vous passé ces deux mois ? 
 
C’est lorsqu’on s’est assis et un peu reposé que j’ai réellement vu combien le président était fatigué et malade. Pendant ces deux mois, les gardes pénitentiaires qui rendent fidèlement compte de nos agissements à leur hiérarchie, peuvent témoigner ; nous n’avons pas fait de bilans médicaux. Et ce n’est pas fini, nous avons encore deux ou trois rendez-vous que l’on va devoir faire à partir de la prison. Il a passé le reste du temps à se reposer et à prendre ses médicaments. 
 
 
Lamine Diouf

 

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