Publié le 28 Nov 2018 - 20:57
EXPLOITATIONS FAMILIALES ET MONDIALISATION

Pape Abdoulaye Seck adoube l’agriculture rurale  

 

Les acteurs de l’agriculture rurale sont en conclave de trois jours à Dakar, pour donner les pistes de réflexion sur les grands défis que leur fixent la mondialisation, les changements climatiques, la pression foncière...

 

L’Initiative prospective agricole et rurale (Ipar) célèbre une décennie d’existence par un colloque international sur l’avenir des exploitations familiales en Afrique de l’Ouest. Coïncidence, le système des Nations Unies a décrété cette décennie celle de l’agriculture familiale, avec la résolution 72-239. La forme la plus répandue d’agriculture a concentré toutes les attentions, dans un contexte de libéralisation économique sauvage et de mondialisation. Le Sénégal a toutefois paré à toute éventualité, avec la loi agro-sylvo-pastorale qui reconnait l’exploitation familiale (Ef) comme modèle à prendre en compte à côté de l’agro-business.

‘‘Les objectifs de sûreté alimentaire ne pourront être actés que si le mouvement paysan dans son ensemble est protégé. La capacité des Ef à assurer la souveraineté alimentaire, à assurer des revenus décents contre la pauvreté, assurer la relève générationnelle et la capacité à s’adapter aux changements climatiques, en dépend en grande partie’’, fait savoir le président du Conseil national des cadres ruraux (Cncr) Nazirou Sall. Les exploitations agricoles, qui concourent à la vitalité du secteur agricole, polarisent 80 à 90 % des exploitations agricoles, poursuit le leader rural.

D’après lui, l’Afrique de l’Ouest comptabilise 330 millions d’individus dans l’agriculture dont 65 % sont des ruraux. Ce secteur, d’après les chiffres du Cncr, participe jusqu’à 35 % de la formation des Pib régionaux et contribue à 16 % aux recettes d’exportation. Elle fournit plus de 80 % de l’alimentation. Les statistiques plus globales du directeur général de l’Institut sénégalais de recherche agricole (Isra), Alioune Fall, rendent plus urgente la diligence des mesures. Les Ef assurent 98 % de la production vivrière en Afrique subsaharienne et sont le premier employeur du monde avec 2,6 milliards de personnes impliquées en 2014.

‘‘Pourtant, beaucoup de personnes pauvres vivent dans les zones rurales, alors que l’agriculture paysanne traduit plus concrètement les options de sortie de crise. Le secteur demeure aléatoire dans un contexte de changement climatique’’, souligne M. Fall qui ne doute toutefois pas que les mesures gouvernementales peuvent mitiger les conséquences. Une grande concentration qui n’empêche pas l’existence de contrastes criards.

En Afrique de l’Ouest et du Centre, plus de la moitié de la population rurale est touchée par la pauvreté, estime le Fonds international de développement de l’agriculture (Fida). ‘‘Les recherches s’accordent à dire qu’il va falloir multiplier la production africaine par cinq, pour nourrir la population, d’ici 2030, alors que ce taux est de 2 en Asie et 1,7 en Amérique latine’’, estime le représentant du Fida. L’organisme a mobilisé 1,3 milliard de dollars et une quarantaine de projets en cours pour 5 millions d’Ef. Il s’inquiète, par ailleurs, que les efforts doivent être concentrés sur les 50 % d’individus dans le monde rural ayant besoin d’appui et de soutien, car le croît démographique devrait faire passer le monde de 7 à 10 milliards d’habitants.

Cependant, Alioune Fall estime que ‘‘l’Isra a pris toutes les dispositions pour accompagner les exploitations familiales. Du fait de la politique agricole axée sur le Pracas (Programme d'accélération de la cadence de l'agriculture sénégalaise), ce secteur repose essentiellement sur les exploitations familiales. Le développement de cultures à haute valeur ajoutée pour rémunérer le travail est une réalité’’, assure le Dg de l’Isra pour qui le projet sur le développement de la filière arachide, le travail sur la modernisation des exploitations familiales, les agropoles au nord, au sud et au centre du pays pour le développement de chaines de valeurs... sont autant de motifs de satisfaction.

Gouvernance foncière

Le ministre de l’Agriculture et de l’Equipement rural (Maer), Pape Abdoulaye Seck, a émis quelques petites réserves, mais a adhéré à l’idée de renforcer les Ef qui, de son avis, ‘‘ont de très bonnes raisons d’exister, de prospérer, d’apporter une contribution remarquable et remarquée à l’atteinte d’une sécurité alimentaire’’. Ayant livré ses convictions en sept points, il a estimé que le regard sur ce type d’exploitation doit évoluer. ‘‘L’idée selon laquelle les Ef sont synonymes de pauvreté, de perfusion prolongée, d’assistance à l’infini doit appartenir aux musées des idées périmées. Des Ef modernisées en quête de diversité, de durabilité sont du domaine du possible, car elles existent. Osons changer nos mentalités et comprenons qu’un autre jour peut se lever, avec des Ef modernisées à la pointe du progrès social et économique’’, a déclaré le Maer. Lequel défend, entre autres, la subvention aux Ef, une discrimination positive pour les jeunes, les femmes et les handicapés, la libéralisation de l’agriculture basée sur un dialogue multi-acteurs et la recherche destinée à transformer durablement la physionomie de l’agriculture. 

Mais c’est surtout la vision gouvernementale sur la gouvernance foncière qui a été le point qui a polarisé les attentes. ‘‘Au Sénégal, en ce qui concerne le foncier, on distingue toujours la sécurisation et l’enregistrement privé, et le transfert définitif des propriétés. Le gouvernement n’est pas pour un marché foncier durable. Nous sommes pour un partenariat gagnant-gagnant entre agro-business et exploitation familiale. Les agro-business ne peuvent s’implanter dans une localité sans avoir des interactions et des interfaces fortes avec les Ef. Elle doit contribuer à la participation de la vie rurale pour justifier qu’elle a une bonne raison de disposer de terres. C’est à partir de ce partenariat qu’on peut massifier ces investissements en milieu rural, tout en gardant la terre comme une propriété de la collectivité’’. 

OUSMANE LAYE DIOP

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