Publié le 24 Oct 2013 - 13:50
LIBRE PAROLE : CONCERTATION SUR L’ACTE 3 DE LA DECENTRALISATION

Une note d’audience avec le Président de la République

 

Excellence Monsieur le Président de la République,

L’Alliance Jëf Jël considère que la réforme des institutions est un préalable indispensable à la stabilité politique et sociale de notre pays et qu’elle devrait essentiellement satisfaire à trois exigences : Rééquilibrer les pouvoirs, Renforcer l’indépendance et les moyens de la Justice, de l’Administration et des corps de contrôle de l’Etat et Rendre le pouvoir aux citoyens en ouvrant la politique à de nouveaux acteurs.

En rappelant l’urgence à finaliser et à mettre en œuvre les réformes institutionnelles, nous avions la conviction qu’elles constituaient la voie de la rupture en vue d’œuvrer à une véritable perspective de changement et d’assurer un mieux-être palpable pour chaque Sénégalais. Mais également, elles permettraient de consolider notre système démocratique dans le respect du calendrier républicain.

A l’Alliance Jëf Jël, nous n’avons jamais souhaité le report d’une élection. Cette position de principe a été maintes fois réaffirmée. Lorsque la décision unilatérale et illégitime de proroger le mandat des députés fut prise en 2006, nous avions lancé, pendant de longs mois, une vaste campagne de pétition, dans le pays profond, pour dénoncer cette forfaiture. Nous nous étions également opposés au report des élections locales intervenu deux fois (en 2007 et 2008).

Cependant, à mesure que nous nous engagions dans les réformes, nos appréhensions sur leurs implications sur le processus électoral se sont manifestement précisées. Dès lors, notre parti, en toute responsabilité, a invité, il y a deux mois, les pouvoirs publics à admettre ici et maintenant l’impossibilité de la tenue des élections locales à date échue eu égard à l’ampleur des réformes et subséquemment de leurs implications sur le système électoral. En effet, l’Acte III de la décentralisation induisant une refonte des collectivités territoriales, il était plus de réaliste d’anticiper sur ces implications.

Sous ce rapport, nous avions la certitude que «la Reformulation d’une cohérence territoriale rénovée » aurait pour conséquences : la fixation de la nouvelle carte électorale ; la réédition de la quasi-totalité des cartes d’électeur ainsi que la redéfinition du mode d’accession au pouvoir local. Nul besoin de préciser qu’il faudra préconiser une révision en profondeur du cadre légal en vue d’intégrer toutes ces implications dans le code des collectivités locales et le code électoral. 

Excellence, nous avons la claire conscience qu’une politique de décentralisation efface et efficiente contribuera à promouvoir le développement du Sénégal. La Constitution, en son article 102, énonce que les Collectivités locales offrent un cadre institutionnel de la participation des citoyens à la gestion des affaires publiques. C’est également dans cet esprit qu’elles sont dotées de la personnalité morale et de l’autonomie financière, accompagnées de compétences générales et spécifiques les autorisant à initier toute action visant le développement local au plan économique, éducatif, social et culturel. Mais force est de reconnaitre que malgré cette politique « poussée » de décentralisation, les conseils locaux peinent à assumer leur mission du fait de contraintes multiformes d’ordre institutionnel, organisationnel, financier et humain.

Monsieur le Président, l’Alliance JËF JËL, consciente de la nécessité de procéder à l’évaluation des politiques de décentralisation pour une meilleure réorganisation du « pouvoir local » selon de nouvelles modalités, réitère son adhésion à une réforme en profondeur de la décentralisation.

Ainsi, l’Acte III de la décentralisation devra nécessairement induire la refonte hardie des collectivités territoriales en même qu’il reformulera leur cadre humain et financier, leurs compétences ainsi que le mode d’accession au pouvoir local et la limitation du cumul des mandats. A défaut, la réforme serait un simple changement de dénomination. Or, « nul ne saurait tenter de changer l’état-civil de son enfant sous prétexte qu’il ne brille pas à l’école ». Aussi devrions-nous nous interroger sur la pertinence à maintenir tous les départements actuels. Les conseillers des collectivités intermédiaires devraient-ils être élus au suffrage universel direct…?

Excellence, nous aurions voulu disposer d’un délai plus long afin d’avoir l’opportunité d’exposer plus largement notre position sur la réforme. Toutefois, nous souhaiterions y revenir dans le cadre d’une note technique.

Par ailleurs, l’Alliance JËF JËL s’interroge sur la prééminence des réformes  de la Décentralisation par rapport à celles déjà initiées dans le cadre de la Commission Nationale pour la Réforme des Institutions (CNRI) ou encore celles concernant le foncier au Sénégal.

Somme toute, c’est dire, à notre humble avis, que nous gagnerions à envisager toutes ces réformes dans une approche plus globalisante. En outre, devrions-nous, dans le souci de consolider notre système démocratique et renforcer les acquis, pérenniser le Comité de Veille et  mettre en place un « cadre permanent et autonome de concertation, de dialogue et de suivi du processus électoral »  en vue d’arriver aux ententes et consensus nécessaires sur la matière électorale, d’instaurer la confiance et de parvenir aux consensus devant permettre d’engager des élections démocratiques et transparentes.

Dans cette perspective, notre parti a proposé la création d’un cadre dénommé : Commission Nationale de Concertation pour la Régularité Des Elections (CONCORDE). 

L’Alliance Jëf Jël tout en réaffirmant sa posture de sentinelle de la démocratie et de la bonne gouvernance réitère son attachement et sa disponibilité pour un dialogue franc et constructif pour engager toutes réformes dans l’intérêt exclusif du peuple sénégalais.

Dakar, le 22 octobre 2013 Mahamadou Lamine Bara CISSE Deuxième vice-président chargé des Relations extérieures

 

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