Les industriels turcs à la conquête du marché sénégalais
La coopération entre le Sénégal et la Turquie se renforce et les échanges commerciaux entre les deux pays montent en flèche avec un volume d’importations en provenance de la Turquie évalué à 95 milliards de F Cfa en 2012. Si la Turquie est une destination privilégiée de nos hommes d’affaires, les industriels turcs investissent au Sénégal dans des secteurs divers, notamment l’agroalimentaire, l’automobile. Ils s’intéressent aussi à l’agriculture.
Une délégation d’hommes d’affaires et industriels turcs réside depuis dimanche à Dakar. Ainsi, le Sénégal est devenu en quelques années une destination privilégiée des investisseurs et hommes d’affaires turcs. Plus de 25 hommes d’affaires turcs s’activent dans notre pays. Ce qui montre par ailleurs l’excellence des relations entre les deux pays.
Celles-ci seront renforcées en novembre 2012, quelque mois après l’arrivée de Macky Sall au pouvoir. Le Premier ministre Abdoul Mbaye, accompagné d’une forte délégation d’hommes d’affaires sénégalais, avait alors effectué une visite en Turquie. Quelques mois après, c'est-à-dire en janvier 2013, le Premier ministre turc va lui rendre la pareille. Reccep Tayyip Erdogan va séjourner à Dakar pendant deux jours.
Depuis dimanche donc, des hommes d’affaires et industriels turcs sont à Dakar à la recherche de partenaires. Ces industriels représentent différents secteurs d’activités, notamment l’agroalimentaire, l’agriculture, l’automobile, le textile, le mobilier… Selon le conseiller commercial de l’ambassade de Turquie au Sénégal, Koray Yozgalti, il y a ‘’à peu près plus de 25 hommes d’affaires turcs qui sont installés à Dakar, en plus des autres qui font des va-et-vient entre Dakar et Istanbul.
Les investissements turcs au Sénégal concernent beaucoup de secteurs comme l’industrie, l’agroalimentaire. L’un des plus grands investissements est, d’après M. Yozgalti, la construction de l’usine FKS, une industrie de farine sur la route de Rufisque. Dans le domaine de l’éducation, le groupe scolaire Yavuz Selim reste une référence dans les investissements. Cependant, les Turcs s’intéressent aussi au secteur de la santé avec le centre ophtalmologique turc à Sacré-Cœur.
2,4 milliards d’exportation vers la Turquie
Par ailleurs, la Turquie apporte son expertise dans le domaine de la construction. L’entreprise turque Summa Turizm Yatirimciligi A.S a en charge la construction du centre international des conférences de Diamniadio. En outre, avec la compagnie Turkish Airlines, la coopération commerciale entre les deux pays monte en puissance. D’après le conseiller commercial de l’ambassade de Turquie au Sénégal, Turkish Airlines offre une ligne directe qui facilite le déplacement des hommes d’affaires sénégalais vers la Turquie et même vers l’Europe, l’Asie, à partir d’Istanbul.
‘’Il y avait deux vols par semaine. Maintenant, il y a quatre vols par semaine et dans un délai, nous attendons 7 vols durant les 7 jours. Turkish Airlines facilite le déplacement des hommes d’affaires entre les deux pays’’, renchérit-il. Sur le plan commercial, malgré une forte présence des produits turcs sur le marché sénégalais, la balance commerciale penche en faveur de la Turquie.
Selon Augustin Faye, directeur de cabinet du ministre du Commerce, de l’Entrepreneuriat et du Secteur informel, qui présidait lundi la rencontre à la Chambre de commerce, d’industrie et d’agriculture de Dakar avec les hommes d’affaires turcs, les importations du Sénégal en provenance de la Turquie sont passées de 28 milliards en 2008 à 95 milliards en 2012, alors que les exportations du Sénégal vers la Turquie se chiffrent à 2,4 milliards de F Cfa. Cette tendance, le Sénégal souhaite l’inverser, ajoute Augustin Faye.
A partir de Dakar, la Turquie peut conquérir le marché ouest-africain. Grande puissance européenne et puissance économique mondiale, la Turquie s’ouvre de plus en plus au marché africain.
3 QUESTIONS À KORAY YOZGALTI, CONSEILLER COMMERCIAL A L'AMBASSADE DE TURQUIE : ‘’Le Sénégal a aujourd’hui l’expérience de la Turquie des années 1980-1990’’ M. Koray Yozgalti, depuis quelques jours, une délégation d’hommes d’affaires turcs est à Dakar. Comment se portent les relations commerciales et économiques entre les deux pays ? Il y a, depuis quelques années, une amélioration de la balance commerciale entre le Sénégal et la Turquie. Par contre, il y a un réel déséquilibre dans le commerce entre les deux pays. L’année passée, les importations de la Turquie en provenance du Sénégal ont augmenté à peu près de 30 à 80%. Mais, nous voudrions vraiment l’égalité des échanges. Nous faisons de notre mieux, mais pour l’instant, sauf le poisson et les autres produits de la mer, nous sommes loin de trouver des produits sénégalais à importer. Ces dix derniers mois de l’année 2013, les exportations du Sénégal vers la Turquie ont diminué à peu près 9% et se chiffrent à 100 millions de dollars. Les importations du Sénégal en provenance de la Turquie ont augmenté de 85%, disons à 500 millions de dollars. Par contre la balance commerciale reste déficitaire pour le Sénégal ? Bien sûr, il y a amélioration des relations commerciales. Il n’y a pas seulement le volet commercial. Nous voudrions surtout investir au Sénégal. Systématiquement, FKS, une minoterie, a été établie au Sénégal avec succès. Ces derniers temps, une unité de construction de matériel en PVC est déjà installée. Il y a d’autres hommes d’affaires turcs qui veulent installer leurs sociétés à Dakar pour renforcer nos relations. Il ne faut pas aussi oublier la clinique ophtalmologique vers Sacré-Cœur. Je suis depuis 3 ans au Sénégal, mais le pays a aujourd’hui la même expérience que la Turquie des années 1980-1990. A l’époque, pour attirer les investissements extérieurs en Turquie, nous avions élaboré : premièrement, notre système des impôts, deuxièmement, nous avions établi un nouveau code concernant les banques et surtout nous avions rendu transparent notre système d’encouragement des investissements pour les sociétés nationales et même pour les sociétés internationales. C'est-à-dire, un homme d’affaires, avant d’investir en Turquie, embrassait toutes les possibilités et savait tous les avantages à obtenir. Donc la politique d’amélioration du climat des affaires que le Sénégal est en train de mener vous inspire confiance ? Ce sont des mesures salutaires et le Sénégal est également sur la même voie. Mais le changement de politique prend toujours un certain temps. Donc il faudra patienter pour avoir les fruits de ces résultats. Au moment de notre changement à l’époque, nos exportations étaient à 15 milliards de dollars. Maintenant, nous sommes à 175 milliards de dollars cette année. La délégation qui est actuellement à Dakar est venue, non seulement pour la promotion de la Turquie, mais, elle cherche aussi des collaborateurs sénégalais pour investir dans des secteurs différents. Il y a des représentants de secteurs comme l’agroalimentaire, l’agriculture. Parce que nous considérons que le Sénégal a une grande possibilité de produire dans le secteur de l’agriculture. Et nos hommes d’affaires vont apporter la technologie au profit des paysans sénégalais. Ce qui limite un peu les relations entre les deux pays est qu’il manque un accord sur le libre échange. Dans un délai, nous devons tomber d’accord sur la signature de cet accord. Ce sont des choses politiques que je ne maîtrise pas, puisque je suis un technicien. |
ALIOU NGAMBY NDIAYE