Publié le 14 Aug 2017 - 18:54
PLUS DE 282 MORTS EN MOINS DE HUIT MOIS DANS DES ACCIDENTS

L’hécatombe sur la route 

 

Au Sénégal, ces dernières semaines, plusieurs cas d’accidents tragiques ont été notés sur la route : à Dakar et à l’intérieur du pays. En moins de huit mois, plus de 282 morts sont enregistrés. Pourtant, face à cette situation devenue récurrente, l’Etat du Sénégal a pris dix mesures d’urgence pour la freiner. Le phénomène, dit-on, coûte 77 milliards de francs Cfa au pays. 

 

Plus de 282 morts sur la route en moins de huit mois. La recrudescence des accidents est une réalité à Dakar et à l’intérieur du pays. Hier, un accident s’est produit sur l’autoroute, à hauteur de Colobane. Il a occasionné plusieurs blessés. Il vient élargir la liste des tragédies qui assaillent passagers et usagers. A l’issue des élections législatives du 30 juillet dernier, plus de 10 Sénégalais ont péri sur les routes nationales.

Traumatisé par cette situation, le directeur des Transports routiers, Cheikhou Oumar Gaye, plaide pour la reprise des opérations ‘’coup de poing’’ qui ont prouvé leur efficacité. ‘’Nous avons senti une amélioration. Parce que le premier trimestre de 2017, nous avons enregistré 186 décès en janvier, février et mars. Après le Conseil ministériel de février, avec la prise des 10 mesures au mois de mars (voir ailleurs) nous avons senti une nette amélioration au second trimestre, c’est-à-dire entre avril, mai et juin où nous avons noté 86 décès. Donc, nous avons réduit presque plus de la moitié du nombre de décès connus au premier trimestre’’, disait-il récemment.

Mais ces opérations ‘’coup de poing’’ ont été allégées pour les besoins de la campagne électorale, poursuit-il. D’où, sans doute, l’hécatombe actuelle.

Il faut dire que le début de ce second semestre 2017 est macabre sur les routes. En quelques jours, en ce mois d’août, un accident meurtrier a été noté à Gathié, une localité de la région de Kaffrine. Conséquences : 5 morts, tous des étudiants ressortissants de Sédhiou. Ils avaient quitté le campus universitaire pour aller voter dans leur localité d’origine. Sur le chemin du retour, le chauffeur du bus qui, rapporte-t-on, tentait de doubler un camion-citerne, n’a pu réussir sa manœuvre. Le même jour, c'est-à-dire le 1er août, deux vies ont été emportées à Mbour. Les maçons ont été percutés par un camion transportant du sable. La liste des drames ne s’arrête pas là. Quelques jours plus tôt, 4 personnes ont trouvé la mort et 49 autres blessées dans un accident de la circulation, à hauteur de Keur Babou. C’est un village du département de Mbirkilane, dans la région de Kaffrine. Venant de Dakar, le transport en commun s’est renversé après avoir dérapé.  

‘’Chaque année, 500 personnes meurent sur nos routes’’

Il faut dire qu’en 2016, les chiffres ont fait état de 600 décès sur la route. Loin des 430 morts par accident de 2015. La moyenne mensuelle dépasse les 22 à 25 décès, cette année. La recrudescence de ces accidents de la route laisse penser que l’amélioration accélérée des infrastructures routières à partir des années 2010 n’a pas contribué à diminuer ce phénomène qui continue d’emporter des citoyens.

Rien qu’en 2014, les sapeurs-pompiers ont enregistré 12 547 accidents de la circulation, dont 16 ferroviaires, pour 22 441 victimes constatées, dont 433 décès. Et Dakar est en tête avec 5 653 accidents pour 8 225 victimes, dont 126 morts. Thiès et Diourbel, qui polarisent les 2 principales capitales religieuses, suivent avec 3 644 accidents ayant causé 115 décès. Le podium est complété par Kaolack, Fatick et Kaffrine, pour 1 119 accidents occasionnant 61 décès. Au bas du tableau, on retrouve Tamba et Kédougou, avec 450 accidents pour 23 morts. ‘’Chaque année, au Sénégal, nous perdons 500 personnes sur nos routes. Le coût économique des accidents de la route est de plus de 1 % du Pib - Produit intérieur brut - soit plus de 77 milliards de francs Cfa par an’’, informe le ministère des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement.

Le Cetud considère que les accidents de la route sont liés à plusieurs facteurs : pannes mécaniques, vétusté du parc, infractions au code de la route, incivilité, conduite sans permis, etc. Nombreux sont donc les ‘’maux’’ liés à la sécurité routière. Pour l’améliorer, le ministère des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement (Mittd) et ses partenaires ont décidé de ‘’frapper fort’’ en modernisant les dispositifs de contrôle et en prenant des mesures dissuasives, mais aussi répressives. Selon le Cetud, 90 % des accidents de la circulation sont d’origine humaine. En plus du comportement humain au volant, continue-t-il, les principales causes d’accidents restent aussi l’état du véhicule (5 %) et celui de la route (5 %).

Il s’agit là donc de faire des réformes en profondeur pour la réduction des accidents de la route. C’est ainsi, dit-on, que le Mittd a déployé ‘’d’importants efforts’’ pour la sécurisation et la numérisation des titres de transport, l’extension de l’activité de contrôle technique moderne des véhicules automobiles sur tout le territoire national. S’y ajoute la mise en place d’un guichet unique automobile pour le processus de dédouanement et d’immatriculation des véhicules importés d’occasion. La mise en œuvre de cette politique aura ‘’immanquablement’’ un impact positif sur la mobilité dans les transports.

Malgré toutes ces ambitions et cette batterie de mesures, on constate que le mal persiste : le problème reste entier.

‘’Tolérance zéro’’, une annonce sans effet

Selon des secouristes habitués des accidents, la majeure partie des accidents de la route est liée au facteur humain. Une opinion largement confortée par les statistiques officielles qui relèvent que 92,8 % des accidents découlent du comportement de l’homme sur la voie publique. Il s’agit de l’insouciance, de l’indiscipline et du laxisme des usagers de la route (conducteurs, passagers, piétons…). Le secrétaire général du ministère des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement de confirmer : ‘’43 % des accidents de la route concernent le conflit entre la voiture et le piéton ; 5% des causes d’accidents procèdent de l’état du véhicule. Plus de 2 % sont dus à l’état de la route et 92 % de ces accidents sont dus au facteur humain (aux comportements sur les routes, la somnolence au volant, l’utilisation de substances psychotropes (la drogue), le défaut de maîtrise…’’

Pour remédier à la situation, les autorités ont multiplié les initiatives, les mesures et les projets de réformes, dont le permis à points, l’augmentation de l’âge minimum pour être conducteur de véhicules poids-lourd. Il s’y ajoute l’amélioration et l’entretien régulier des signalisations diurnes et nocturnes sur l’ensemble des axes routiers, l’installation de systèmes de contrôle de la charge à l’essieu des camions gros-porteurs sur certains axes routiers stratégiques du pays, entre autres. Et en dernier lieu, suite à la cascade d’accidents sur les routes du pays entre la fin de 2016 et le début de cette année 2017, le chef de l’Etat, las d’appeler à une ‘’tolérance zéro’’ sans être entendu, a instruit le Premier ministre de tenir un conseil interministériel sur la question, pour la prise de mesures énergiques et radicales.

Malgré tout, on dénombre encore des morts sur la route.

Il faut dire que cette situation est un phénomène qui dépasse les frontières sénégalaises. Selon quelques statistiques de l’Organisation mondiale de la santé (Oms), les accidents de la route entraînent 1,25 million de décès par an environ et 20 à 50 millions d’autres personnes sont blessées, parfois même handicapées. Ils sont la première cause de décès chez les jeunes âgés de 15 à 29 ans. Et 90 % des décès sur les routes surviennent dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, qui possèdent environ la moitié du parc mondial de véhicules. La moitié des tués sur les routes sont des ‘’usagers vulnérables’’ (piétons, cyclistes et motocyclistes). Si rien n’est fait, les accidents de la route deviendront, selon les projections, la septième cause de mortalité d’ici à 2030.

GORA KHOUMA DE L’UNION DES ROUTIERS DU SENEGAL

‘’Il faut des centres de formation pour lutter contre les accidents routiers’’ 

Le secrétaire général de l’Union des Routiers du Sénégal (URS), face à la recrudescence des accidents de la route qui le préoccupe, invite l’Etat du Sénégal à mettre en place des centres de formation dans les différentes localités du pays. Pour, détaille Gora Khouma, former les chauffeurs dans le but de juguler les accidents routiers. ‘’Il faut, impérativement, passer par une formation digne de ce nom pour avoir le permis de conduire. Il ne s’agit pas dire qu’on va sensibiliser les gens. Si on ne met pas l’accent sur la formation, il y aura toujours des problèmes sur la route’’, avance M. Khouma, contacté hier par ‘’EnQuête’’.

Le patron de ladite structure est loin d’être emballé par les mesures prises par l’Etat pour freiner les accidents de la route (voir ailleurs). C’est une batterie de 10 mesures d’urgence. Au bout du fil, Gora Khouma n’accorde aucun crédit à ces décisions qui, pense-t-il, restent au stade de discours. Loquace, il minimise : ‘’Moi, personnellement, je ne vois pas l’importance des textes ou les lois pour faire face à ce phénomène. Les réunions et conseils interministériels sur la question (accidents de la route) ne servent absolument à rien.’’ A ses yeux, hormis la formation ‘’permanente’’ des chauffeurs qui lui tient à cœur, l’Etat doit s’ouvrir à tous les acteurs, aux populations. Ceci, précise-t-il, pour qu’ils aillent vers une assise profonde dans le but de régler le problème des accidents de la route. Les chauffeurs, constate-t-il, travaillent 24h/24h. ‘’Ils ne se reposent pas. Sur la route, il y a beaucoup de pressions qui pèsent sur eux. Ils subissent des tracasseries dans le cadre de leur travail’’, essaye-t-il de défendre ses camarades qui, la plupart du temps, sont accusés d’être les artisans de ces accidents tragiques.

CROISADE CONTRE LES ACCIDENTS DE LA ROUTE

Les 10 mesures d’urgence de l’Etat du Sénégal

Par le biais du ministère des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement, l’Etat du Sénégal travaille à freiner les accidents de la route. Les 10 mesures d’urgence prises par le gouvernement s’inscrivent dans le cadre de lutte. Il s’agit :  

1-l’immobilisation et la mise en fourrière de tout véhicule en circulation dont le propriétaire n’a pas présenté à la visite, sans motif valable, à l’expiration du délai de visite technique ;

2-les réparations à effectuer sur le véhicule seront constatées par l’expert chargé des visites de la zone géographique où l’infraction a été commise et une mise en demeure d’effectuer les réparations dans un délai d’un mois, sous peine de retrait définitif dudit véhicule de la circulation, sera envoyée au propriétaire ;

3-les opérations de mutation de Dakar vers les régions pour les véhicules de transport public interurbain de voyageurs et de marchandises sont suspendues à titre provisoire sur tout le territoire national ;

4-il est formellement interdit toute transformation de véhicule destiné au transport de marchandises en véhicule de transports de passagers ;

5-les transformations des véhicules d’origine destinées à augmenter les places assises pour les passagers ou à créer des porte-bagages supplémentaires sont interdites et une tolérance zéro est appliquée contre les surcharges de personnes et de bagages pour l’ensemble des véhicules ;

6-l’âge des conducteurs de véhicules de transport urbain de passagers taxis urbain est fixé à 25 ans au minimum, et l’âge minimum requis pour l’obtention du permis de conduire pour les conducteurs de véhicules de transport public interurbain de passagers et de marchandises est fixé à 30 ans ;

7-tous les véhicules motorisés à deux roues doivent se faire immatriculer gratuitement auprès des services compétents du Ministère chargé des Transports terrestres pendant six mois, à partir du jeudi 16 mars 2017 ;

8-tout conducteur de véhicule à deux roues qui circule sur la voie publique, avec ou sans passager, sans porter un casque homologué verra son véhicule immédiatement immobilisé sans préjudices de l’amende forfaitaire prévue à son encontre par les dispositions réglementaires du Code de la route ;

9-les véhicules dont l’état de vétusté est tel que la circulation du véhicule compromettrait gravement la sécurité des personnes ou des biens seront mis en écarts ;

10-les dispositions du Code de la route relatives à l’usage du téléphone au volant, au port de la ceinture de sécurité, à l’excès de vitesse, au respect de la signalisation horizontale et verticale ’’seront rigoureusement appliquées.   

PAPE NOUHA SOUANE

 

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