Le FDR monte au créneau

Hier, dans une déclaration solennelle et sans ambiguïté, la Conférence des leaders du front pour la défense de la démocratie et de la République (FDR) a vivement dénoncé ce qu’elle qualifie de ¨projet funeste¨ porté par le régime Diomaye-Sonko. En effet, d’après le FDR, cette proposition de loi vise à décentraliser la gestion du foncier et porte donc un coup fatal à la décentralisation, qui semble être un pilier fondamental du développement local pour le Sénégal.
¨Non à ce funeste projet d’accaparement du foncier et de remise en cause de la décentralisation¨, lit-on dans un communiqué reçu hier à ‘’EnQuête’’. En effet, selon le FDR, la nouvelle proposition de loi en cours d’élaboration par le pouvoir ¨État-Sonko¨, qualifie-t-il, s’apparente à une entreprise de confiscation des prérogatives historiques des collectivités territoriales en matière foncière. ¨Cet incroyable projet, agité par celui que la presse affuble de l’évocateur sobriquet de ‘Goebbels’, cache manifestement un dessein inavouable : il s’agit d’une remise en cause fondamentale de la politique de décentralisation, qui constitue pourtant un des piliers de nos stratégies de développement. Un tel dessein traduit aussi un mépris manifeste de la souveraineté du peuple qui a confié, par son vote, des prérogatives précises aux collectivités territoriales¨, dénonce le FDR.
Autrement dit, c’est un projet dangereux, qui masquerait derrière une technocratie autoritaire et qui traduirait, selon le front, une volonté de concentrer les leviers décisionnels au sommet de l’État au détriment de la souveraineté populaire.
¨En effet, il est communément admis que la gestion du foncier par les élus, pour le compte des populations locales, est un élément essentiel et un acquis intangible des politiques de décentralisation conduites dans notre pays depuis 1960¨, s’indigne le FDR.
D’après le front, il s'agit d’une remise en cause fondamentale de la politique de décentralisation, qui semble être un acquis arraché de haute lutte depuis 1960 et inscrit dans les textes fondateurs. Il rappelle dans ce sens que la gestion du foncier a toujours relevé de la compétence des élus locaux au bénéfice des populations. Depuis les lois du domaine national en 1964, jusqu’au Code général des collectivités territoriales de 2013, en passant par le décret de 1972, tout un arsenal législatif et réglementaire encadre et garantit ce transfert de compétences.
Une concentration suspecte du pouvoir soulignée
D’après le FDR, cette proposition de loi cache mal un dessein politique : ¨Envisager de porter atteinte à ce processus de transfert de certains pouvoirs normatifs aux collectivités de base n’est rien d’autre qu’un crime - le mot n’est pas trop fort !¨, clament les signataires.
Ils rappellent que la libre administration des collectivités territoriales que consacre la Constitution. En son article 25-1, il dispose : ¨Les ressources naturelles appartiennent au peuple. Elles sont utilisées pour l’amélioration de ses conditions de vie. L’État et les collectivités territoriales ont l’obligation de veiller à la préservation du patrimoine foncier¨, insistent-ils.
D’après le FDR, ¨rien ne justifie cet état de fait, si ce n’est la boulimie de pouvoir de l’Etat-Sonko qui se montre déterminé à s’emparer de toutes les ressources du pays¨. Ils affirment que le pouvoir, en concentrant entre ses mains tous les leviers de prise de décision, ‘’exclut les représentants légaux et légitimes des citoyens dans les territoires¨.
Il souligne, par ailleurs, que les véritables problèmes des collectivités territoriales ne résident pas dans le partage des compétences, mais plutôt dans les carences en ressources humaines, en moyens techniques et financiers. ¨S’il ne s’agit que de lutter contre certains abus, le décret 2020-1773 du 16 septembre 2020, modifiant les conditions d’approbation des attributions des terres de culture et de défrichement définies en 1972, suffit amplement¨, dit-il.
Donc, d’après le front, ¨en exigeant une approbation par le sous-préfet ou le préfet des délibérations d’octroi des terres de superficies de moins de 10 ha, par le préfet pour les superficies comprises entre 10 et 50 ha, par le gouverneur et par un acte enregistré au Secrétariat général du gouvernement pour des superficies supérieures à 50 ha, ce décret dote l’Exécutif de suffisamment de moyens d’action¨.
Le FDR va donc souligner, face à aux agissements de l’Etat-Sonko, une non-consolidation des progrès avec la phase II de l’Acte III de la décentralisation et le renforcement des compétences l’Anat. ¨Le pouvoir Pastef cherche à rétropédaler en proposant, sans avoir l’air d’y toucher, une suspension de fait de la politique de décentralisation dans notre pays¨, dénonce le front.
Une réponse inadéquate aux vrais défis
Par conséquent, c’est une très mauvaise ¨solution¨ aux vrais problèmes des collectivités territoriales impactant le foncier, dont les causes découlent des déficits constatés en matière de formation et de ressources humaines, techniques et financières.
D’après leur déclaration, ¨le gouvernement, au lieu de verser dans un jacobinisme de mauvais aloi, devrait plutôt renforcer le contrôle et les moyens d’inspection, recruter des cadres compétents dans la Fonction publique locale et mieux encadrer le personnel des collectivités territoriales¨.
Autrement dit, plutôt que d’ôter aux maires et préfets leurs rôles essentiels, le gouvernement ferait mieux, selon le FDR, de renforcer les services de contrôle, d’appuyer la formation des agents locaux et de professionnaliser la Fonction publique territoriale.
¨Encore une fois, il est incompréhensible qu’on veuille dessaisir les maires, préfets et gouverneurs, et confier leurs prérogatives à l’Anat après avoir nommé, dans des conditions controversées, un cadre de Pastef directeur général de cette structure. On devrait plutôt exiger à l’Anat d’agir pour que les différents projets de production et des infrastructures et équipements collectifs soient conformes au décret 2022-1088 du 5 mai 2022 relatif au visa de localisation. ¨Ils proposent donc d’exiger à ses services qu’ils fournissent effectivement les visas de localisation qui permettront au Sénégal de disposer d’une cartographie vivante de l’occupation du sol dans tout le pays¨.
‘’L’Etat-Sonko n’a assurément pas le droit de transformer l’Anat, qui a pour ambition d’être à la pointe de l’innovation dans le domaine de l’aménagement du territoire, en structure délivrant des permis de lotissements et des permis de culture et de défrichement pour les populations locales¨, rétorquent les leaders.
Face à ce qu’il considère comme une tentative d'accaparement du foncier par le pouvoir central, le FDR appelle à une large mobilisation citoyenne. ¨Il nous faut le répéter : le but est loin de s’inscrire dans une perspective de rupture avec les pratiques décriées ; il s’agit plutôt de réorienter celles-ci au profit exclusif du parti au pouvoir et de ses affidés. C’est pourquoi le FDR appelle tous les maires, les conseillers municipaux, les organisations paysannes et toutes les populations, quels que soient leurs bords politiques, à se mobiliser, dans l’unité, avec lui, pour refuser ce projet d’accaparement foncier et exiger le retrait pur et simple de cette scélérate proposition de loi¨, a-t-il conclu.